Europe
Von der Leyen annonce un plan pour réduire la dépendance de l'UE aux terres rares chinoises
Face aux restrictions de Pékin, la présidente de la Commission a annoncé samedi une initiative pour favoriser l'extraction, la transformation et le recyclage des matières critiques dans l'UE. Le commissaire Stéphane Séjourné travaille sur le sujet depuis un an.
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Dans le port de Lianyungang en Chine, des terres rares sont sur le point d'être exportées.
Dans le port de Lianyungang en Chine, des terres rares sont sur le point d'être exportées. (Reuters)
Par Karl De Meyer
Publié le 25 oct. 2025 à 19:09Mis à jour le 25 oct. 2025 à 21:48
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Moins de quarante-huit heures après qu'Emmanuel Macron a dénoncé, au sommet européen du 23 octobre, la coercition économique exercée par la Chine via ses récentes restrictions sur ses exportations de terres rares, Ursula von der Leyen lui a répondu ce samedi.
Au cours d'une conférence organisée à Berlin, la présidente de la Commission européenne a annoncé l'adoption prochaine d'un plan pour réduire la dépendance de l'Union européenne aux matières critiques en provenance de Chine.
Baptisé RESourceEU, cette initiative sera portée par Stéphane Séjourné, le vice-président de la Commission en charge de la politique industrielle. Il travaille sur le dossier, en coopération avec les filières particulièrement concernées (automobile, machines outils, défense, notamment), depuis des mois.
Inspiration japonaise
Bien au-delà de la seule diversification des sources d'approvisionnement, une préoccupation majeure de la politique commerciale de l'UE, le plan de la Commission visera à développer l'extraction de matières critiques sur le territoire de l'Union, augmenter les capacités de transformation et améliorer les procédés de recyclage.
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Stéphane Séjourné a annoncé sur le réseau X « la création d'un centre d'achat commun et de stockage de matières premières », d'inspiration japonaise. Le vice-président de la Commission s'est rendu au Japon le mois dernier pour étudier le mécanisme par lequel les entreprises nippones font connaître leurs besoins en matières premières à une structure étatique qui les acquiert en leur nom.
Ses services font le parallèle avec l'action de la Commission pendant la pandémie. « Ce que nous avons fait pour la santé avec le vaccin contre le Covid, nous pouvons le faire pour notre sécurité économique et nationale avec les matières premières », a encore écrit Stéphane Séjourné sur X.
Leçons douloureuses
Ursula von der Leyen a, elle, fait le parallèle avec la dépendance européenne au gaz russe, devenue une dangereuse vulnérabilité après l'invasion de l'Ukraine. « Nous avons appris une leçon douloureuse dans le domaine de l'énergie, nous n'allons pas faire la même erreur sur les matières critiques », a-t-elle déclaré à Berlin.
L'UE s'est déjà fixé quatre grands objectifs pour 2030 : extraire 10 % des ressources dont elle a besoin sur son territoire, les transformer à 40 % dans l'UE, les recycler à hauteur de 25 % et, dans chacun de ces trois domaines, n'être jamais dépendante à plus de 65 % d'un seul fournisseur.
Bruxelles favorise déjà l'essor d'un nouveau tissu industriel autour des aimants industriels, segment où la dépendance est aujourd'hui très forte : sur les 18.000 tonnes qu'elle consomme, l'UE n'en produit que 1.000 tonnes. La Commission estime possible de porter la production « made in EU » à 6.500 tonnes d'ici 2030, pour des besoins qui devraient alors avoisiner les 35.000 tonnes.
Instrument anti-coercition
En mars, la Commission a identifié 47 nouveaux projets stratégiques situés dans 13 Etats membres, dont la France, qui doivent solidifier la chaîne de valeur des matières premières.
Lors du sommet européen de jeudi dernier, les leaders ont longuement parlé de compétitivité, un an après la publication de l'alarmant rapport de Mario Draghi qui soulignait les multiples décrochages de l'Europe. Emmanuel Macron a insisté sur la coercition que la Chine, mais aussi les Etats-Unis, exercent sur l'Europe.
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Les conclusions du sommet indiquent : « afin de dissuader et de contrer les pratiques commerciales déloyales, le Conseil européen invite la Commission à utiliser efficacement tous les instruments économiques de l'UE ». En clair, les leaders mettent sur la table le possible recours à l'instrument anti-coercition, un puissant outil de défense commerciale adopté en 2023.
Délégation chinoise à Bruxelles
Il permet d'imposer à des Etats ou des entreprises hostiles des droits de douane, des restrictions d'exportations européennes, de bloquer l'accès à des services financiers européens ou de fermer des appels d'offres européens, etc.
Dans une étude en date du 21 octobre, l'ECFR (Conseil européen pour les relations internationales) se prononce en faveur de son activation, notant que « les Européens doivent avoir un levier collectif pour même commencer une négociation avec Pékin, sinon l'acceptation [des restrictions chinoises] devient la nouvelle norme et Pékin continuera une escalade progressive ».
Le Commissaire au Commerce Maros Sefcovic, qui s'est déjà entretenu avec son homologue chinois Wang Wentao en début de semaine, recevra à Bruxelles dans les prochains jours des représentants chinois pour aborder ces sujets devenus hyperstratégiques.
Karl De Meyer (Bureau de Bruxelles)
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