26/12/2025/H17:18:54
En 2019, le groupe des Backstreet boys revenait avec un titre, No Place. Cinq ans plus tard, l’échec cuisant du morceau n’inquiète pas Tiffany Zhong, une entrepreneuse de 27 ans qui a décidé de donner le même titre à son réseau social. Aux Etats-Unis, la malédiction a été vaincue et No Place s’est hissé à la première place des applications les plus téléchargées depuis sa mise en ligne début juillet. En France, les premiers pas du réseau social sont plus timides, comme pour de nombreuses plateformes. L’occasion de se demander si la création d’un nouveau réseau social est encore légitime aujourd’hui.
En effet, quelques réseaux sociaux occupent désormais des places dominantes et ne sont pas prêts à les laisser. « On appelle ça des oligopoles à frange concurrentielle. Vous avez plutôt un gros acteur dominant qui prend l’essentiel du marché et derrière le reste du marché se partage entre plusieurs petits concurrents », résume Julien Pillot, docteur en économie et enseignant-chercheur à l’INSEEC. En rachetant Instagram, Facebook – désormais Meta – fait figure d’un parfait exemple. TikTok le devient également.
Se démarquer des autres
Pour marquer son territoire dans un milieu ultra-concurrentiel et pas forcément rentable, nous ne ferons pas de suspense, il faut donc « soit être sur une audience extrêmement différente, soit sur une offre extrêmement différente », analyse Julien Pillot. « Ceux qui arrivent plus tardivement se contentent de singer ce qui existe en changeant deux trois petits détails ». BeReal a su par exemple se démarquer grâce à son instantanéité.
C’est également là où No Place pourrait tirer son épingle du jeu, selon Marianne Lumeau, maître de conférences à l’université de Rennes. « En ce moment, les grands réseaux sociaux dominants souffrent de quelques problèmes et les consommateurs ont de moins en moins confiance ». Ici, la chercheuse fait référence – entre autres – au scandale de Cambridge Analytica, mais aussi aux risques démontrés d’addiction aux réseaux sociaux et la lassitude face à la publicité et l’influence.
Attirer les utilisateurs
En comparaison, No Place pourrait devenir un bon élève avec son graphisme simple mais coloré et ses interactions uniquement basées sur le texte. De quoi lui trouver des airs de MySpace. « Un réseau social où l’algorithme a l’air un peu plus transparent et n’enferme pas peut trouver sa place. On revient à la base de ce qu’est un réseau social au sens propre, c’est-à-dire d’avoir son réseau de connaissances et pas forcément d’influenceurs ».
Les spécialistes ne sont pas tellement inquiets du lancement. Rome ne s’est pas construit en un jour et aucun réseau social non plus. « Les réseaux sociaux qui tiennent les premières places disposent des effets de réseaux et ces effets de réseaux les protègent contre la concurrence », souligne Julien Pillot. Un réseau social avec un seul membre n’a rien d’un réseau et la plateforme perd de sa valeur. « Il faut qu’il y ait un nombre de primo adhérents suffisants pour pouvoir attirer une manne d’utilisateurs qui va permettre au réseau d’être attractif », explique Marianne Lumeau.
La déroute des anti-X
Seulement, depuis plusieurs mois, les nouveaux réseaux sociaux galèrent à se faire une place malgré la chute vertigineuse de Twitter que beaucoup ont tenté de remplacer. Mais pour la majorité, c’est un échec. Début 2024, Mastodon comptait à peine un million d’utilisateurs actifs, contre 1,4 million pour Bluesky. Jack Dorsey – cofondateur de Twitter – a même annoncé quitter le conseil d’administration de Bluesky. X (anciennement Twitter) aussi connaît un arrêt brutal de sa croissance. La plateforme n’a connu qu’une augmentation de 1,6 % en un an, avancent des chiffres du Financial Times, contre près de 15 % les années avant Elon Musk.
Chez Meta, ça ne va pas tellement mieux. Threads, le Twitter bis, reste encore à construire. Mais les résultats sont plus encourageants. « Threads compte désormais plus de 175 millions d’utilisateurs actifs tous les mois. Quelle année », a déclaré le patron de Meta, Mark Zuckerberg sur ses réseaux sociaux. Si le réseau social s’en sort mieux que les alternatives grâce à la portabilité des utilisateurs via Instagram, les grands évènements [comme les législatives ou l’Euro de football] montrent que les utilisateurs n’ont pas encore adopté le reflex et choisissent toujours de s’informer via les réseaux sociaux habituels.
Spotify se lance à son tour
Pas de quoi décourager d’autres plateformes qui, s’ils n’étaient pas considérés comme un réseau social, ont décidé de le devenir. C’est le cas de la plateforme de streaming Spotify qui a annoncé mardi le lancement d’une nouvelle fonctionnalité : les commentaires sous les podcasts.
« Pour les créateurs de podcasts qui souhaitent élargir leur public, il est essentiel de renforcer leurs relations avec leurs auditeurs et leurs fans. Et pour amplifier leur présence, les créateurs ont besoin d’outils qui leur offrent les fonctionnalités, les informations et la flexibilité nécessaires », résumait un communiqué. De quoi laisser penser que pour concurrencer au mieux, autant ne pas naître réseau social, mais le devenir.
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