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"Libres d'obéir" : comment le management actuel trouve en partie ses racines dans les théories nazies ? [ElseNews]

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"Libres d'obéir" : comment le management actuel trouve en partie ses racines dans les théories nazies ?

Cette bande dessinée suit au fil de leurs conversations, deux amies. Elles échangent au sujet de ce que l'une vit au sein de son entreprise, un management de plus en plus toxique qui va la rendre malade.
En parallèle, et c'est la partie la plus conséquente du livre, son amie explique et lui décrypte théoriquement ce qu'elle vit et comment ses techniques managériales prennent en partie leur source dans les théories nazies.
Principalement autour d'une figure particulière, celle de Reinhard Hohn, un dirigeant nazi qui franchira sans encombre la fin de la seconde guerre. Ce général SS devient, dans les années 50, le père du management moderne allemand, comme le raconte Johan Chapoutot.
“Une des idées de Reinhard Hohn après la seconde guerre mondiale, après avoir fait du service de conseil au patronat, après avoir dirigé un think tank patronal, après avoir également donné ses conseils à la nouvelle armée allemande qui se reconstitue en 1955…son idée c'est que l'économie allemande, ouest-allemande, étant en voie d'atlantisation, puisque les débouchées vers l'Est sont désormais inaccessibles, il faut se mettre à l'école du capitalisme américain et créer quelque chose qui n'existait pas auparavant en Allemagne, c'est les écoles de commerce.
En l'occurrence, c'est une école de formation ultérieure de type MBA pour les cadres qui sont déjà en place. Il crée en 1956 cette école de commerce, enfin cette école de formation des cadres en Basse-Saxe. Chez cet homme qui est un fin intellectuel, c'était un professeur des universités, un fin juriste, cela se combine avec l'idée de créer, d'inventer, un modèle d'organisation du travail, qui est un modèle de management, c'est peu à peu le terme qu'il va employer, qui est le management par délégation de responsabilités et qui lui semble correspondre à l'esprit du temps, mais qui s'enracine également dans les expériences nazies au cours des années 30.
Dans le capitalisme contemporain, celui du néolibéralisme, on ne sait jamais qui est responsable de la catastrophe. C'est-à-dire que lorsqu'on cherche l'ultime donneur d'ordre ou l'ultime responsable de la liquidation de Brandt, par exemple, ou du départ nuitamment d'une entreprise et de ses machines vers la Roumanie, on se rend compte qu'on aboutit, in fine, en bout de chaîne, à une boîte aux lettres vide dans un paradis fiscal.
Les cadres ne seraient plus jamais responsables de rien
Il se trouve que par son modèle de management par délégation de responsabilités, c'était le nom qu'il lui avait donné Reinhardt Hohn, anticipait ce mouvement-là puisqu'il promettait aux cadres qu'il réunissait en séminaire dans son école que grâce à ce type de management-là, les cadres ne seraient plus jamais responsables de rien.”
Au-delà de ce personnage, c'est l'idéologie nazie toute entière qui s'inscrit parfaitement dans le sillage du capitalisme, comme l'explique Johan Chapoutot dans cette bande dessinée.
“La période nazie, avec son insistance morbide, violente sur les notions de performance, d'extraction, d'extraction de la valeur, de consommation, de dévastation, les nazis donnent au fond la réalité la plus crue et la plus brutale tout simplement parce qu'ils participent pleinement de ce monde-là mais ils radicalisent en accélérant et en brutalisant des tendances lourdes de ce monde-là qui leur préexistent aussi. C'est le monde de la colonisation et du capitalisme de la seconde moitié 19e siècle. Ils accélèrent des phénomènes et ils grossissent des phénomènes qui nous permettent de mieux repérer des tendances pathologiques d'une modernité dont on participe nous-mêmes.”
https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/le-journal-de-l-eco/libres-d-obeir-comment-le-management-actuel-trouve-en-partie-ses-racines-dans-les-theories-nazies-6825263

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