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-====== Le Monde – L’autre vie de l’abbé Pierre, entre sexe, emprise et trahisons ====== 
- https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/12/20/l-autre-vie-de-l-abbe-pierre-entre-sexe-emprise-et-trahisons_6658765_3224.html 
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-https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/12/20/l-autre-vie-de-l-abbe-pierre-entre-sexe-emprise-et-trahisons_6658765_3224.html 
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-FRANK PERRY/AFP 
-L’autre vie de l’abbé Pierre, entre sexe, emprise et trahisons 
-Par Marie-Béatrice Baudet et Sarah Belouezzane 
-Par Marie-Béatrice Baudet et Sarah Belouezzane 
-Par Marie-Béatrice Baudet et Sarah Belouezzane 
-Aujourd’hui à 05h00, modifié à 17h16 
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-ENQUÊTE « Les secrets de l’abbé Pierre » (2/2). Le porte-parole des sans-logis utilisait une partie des dons adressés à Emmaüs pour placer des femmes en détresse sous son influence et en faire ses objets sexuels. Des personnes mineures au moment des faits font aussi partie des victimes du prêtre. 
-Lecture 14 min 
-Entouré de ses proches, l’abbé Pierre aimait prononcer cette supplique : « Mon Dieu, gardez-nous d’être jamais voleurs d’aumônes. » Attribués à saint François d’Assise, le fondateur des capucins, ces mots devaient certainement lui rappeler ses huit années passées au sein de l’ordre religieux, qu’il quitta en 1939 pour devenir vicaire dans le diocèse de Grenoble. Aussi iconoclaste soit-elle, une question se pose désormais : cette imploration si chère à son âme, l’a-t-il bien respectée ? Malheureusement, qui peut encore le croire aujourd’hui ? 
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-Depuis les révélations, en juillet 2024, sur les agressions sexuelles dont l’ecclésiastique s’est rendu coupable, la France sidérée a découvert la face sombre de son héros national : un menteur, un manipulateur et un prédateur. Scandale derrière le scandale, l’ecclésiastique si soucieux de son allure de miséreux était aussi un homme d’argent, comme l’a souligné le premier volet de l’enquête du Monde. « Si je comprends bien, résume un frère capucin horrifié par l’ampleur de ce désastre, l’abbé a renié les trois vœux qu’il avait prononcés chez nous – chasteté, obéissance et pauvreté – pour les transformer en sexe, pouvoir et argent. C’est vraiment terrifiant. » 
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-Revenons sur la teneur de ses gains. L’abbé Pierre, né Henri Grouès en 1912, disposait de revenus personnels basés sur ses copieux droits d’auteur (qu’il ne mutualisait pas), auxquels s’ajoutaient, l’âge aidant, ses retraites d’ex-député et d’ancien prêtre diocésain. Pour le reste, il naviguait en eaux troubles, ayant la fâcheuse habitude de confondre ses finances avec celles de son œuvre sociale, largement tributaire de la générosité de donateurs privés et du fruit du travail acharné des chiffonniers d’Emmaüs. Que faisait-il de tout cet argent ? Du bien, c’est incontestable, mais du mal aussi, énormément de mal. 
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-Les données personnelles de l’abbé Pierre, rassemblées aux Archives nationales du monde du travail à Roubaix (Nord), témoignent de cette ambivalence. Il suffit, pour cela, de consulter le dossier intitulé « L’homme au secours des particuliers ». 
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-Sa vie durant, cet infatigable guerrier mobilisé contre la misère a prêté main-forte à des milliers de malheureux et de sans-logis. Des petits mots griffonnés à la hâte sur du papier de fortune traduisent cette empathie. Un compagnon réclame un peu de cash pour s’acheter un vélo ? Des billets de train ? Des cigarettes ? Une petite avance ? Le prêtre paraphe chaque demande, et elles sont nombreuses… Le 21 octobre 1980, un homme lui écrit une longue lettre : « Mon père, je suis de retour d’un voyage en Algérie où j’ai perdu toute ma famille dans un accident de voiture. Actuellement, je me trouve dans une situation catastrophique. (…) Je sollicite de votre part une AIDE qui vous sera remboursée dès que possible… » En haut du papier, trois lignes écrites par l’ecclésiastique : « 21 oct : 170 francs », « 22 oct : 250 », « 23 oct. : 550 ». Ici un prêt sans intérêts alloué, là une reconnaissance de dette à moitié illisible ainsi que de nombreux courriers de remerciement pour le soutien apporté. 
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-L’ancien capucin soutenait aussi d’autres associations de bienfaisance, versant notamment son obole à Handicap International, au Groupe d’information et de soutien des immigrés, aux Œuvres hospitalières françaises de l’ordre de Malte, aux Restos du cœur ou à l’Association d’entraide aux handicapés physiques. 
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-Soixante-huit victimes 
-Oui, du bien, il en faisait. Mais il était aussi un homme obsédé par le sexe, incapable de contrôler ses pulsions destructrices, comme l’ont décrit ses 68 victimes déjà identifiées. Combien d’autres ? Combien de femmes en détresse a-t-il placées sous son emprise financière ? 
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-A ce sujet, des éléments découverts dans cet épais dossier « L’homme au secours des particuliers » ainsi que des talons de chèques examinés par ailleurs sont autant de signaux d’alerte. Quelles relations le prêtre entretenait-il ainsi avec Mlle V., habitant dans le 13e arrondissement de Paris, pour accepter, en 1979, d’acquitter ses arriérés de loyer et de payer des travaux de plomberie dans son appartement, travaux dont la facture lui était directement adressée ? Il y a aussi cette mystérieuse C., domiciliée à Paris, dont il paie également le loyer d’un montant de 500 francs et à qui il attribue 1 000 francs supplémentaires puis 1 500 autres, le 30 septembre 1979, sans préciser de quels règlements il s’agit. Sans oublier ces deux femmes uniquement désignées par leurs prénoms, H. et P., à qui il verse des subsides. Des êtres dans le besoin, assurément, mais que leur demande-t-il en échange ? 
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-L’abbé Pierre, lors d’un appel à la générosité lancé aux Parisiens, le 12 décembre 1984. MICHEL CLEMENT/AFP 
-Or, on a découvert la stratégie de l’abbé Pierre, qui enfermait ses proies grâce à l’argent, raconte, glacée, l’ex-présidente de la Conférence des religieux et religieuses de France, Véronique Margron : « Nous sommes dans quelque chose qui ressemble à de l’abus de faiblesse, en plus de ces abominables agressions », s’indigne la dominicaine, connue pour mener un combat intransigeant contre les violences sexuelles dans l’Eglise catholique. 
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-C’est ainsi que la mère de Blandine, qui a souhaité préserver son anonymat, s’est retrouvée prise au piège. Son histoire est celle d’une mère de famille aux abois, divorcée, jetée à la rue sans ressources, persuadée que cet homme d’Eglise dont on lui a vanté la grande générosité allait l’aider. Mais c’est un pervers qui la guettait, monnayant des faveurs sexuelles contre son soutien. Une autre femme également prise dans les filets de l’ecclésiastique a raconté dès 2008, dans Le Saint et la pécheresse (L’Archipel), le sinistre comportement de l’homme en soutane. Personne n’a daigné alors croire Sanda Slag – un nom d’emprunt –, dont le récit fut soigneusement ignoré. 
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-Aux yeux de cette femme, au début, il était un « Robin des bois coiffé d’un béret et vêtu d’une soutane », « un preux chevalier venu d’un conte de [son] enfance ». Mais c’était avant de découvrir la véritable nature du prêtre. Cette demi-mondaine, ex-mannequin, décédée en 2010, rencontre Henri Grouès au milieu des années 1980 à l’abbaye Saint-Wandrille, en Seine-Maritime, où il avait alors pris ses quartiers. Sanda Slag raconte comment, dès leur deuxième entrevue, le prêtre l’a prise dans ses bras « d’un mouvement brusque », avant de se jeter à ses pieds et de lui « sucer goulûment le gros orteil ». 
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-Quand elle le décrit, Sanda Slag, devenue financièrement dépendante du religieux, évoque « cette lueur lubrique qui salissait parfois son regard », et « cette expression de culpabilité douloureuse qui déformait son visage » lorsqu’il essayait de l’embrasser sur la bouche. Elle relate aussi comment il fit un strip-tease devant sa fille, un soir, dans un appartement qu’elle ne connaissait pas et dont l’abbé Pierre lui avait indiqué l’adresse. 
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-Sanda Slag rapporte avec moult détails comment l’abbé l’a emmenée dîner, un soir, sur la péniche amarrée à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine) d’un certain « Monsieur Gérard » – elle comprend très vite qu’il s’agit d’un proxénète. Le Monde s’est procuré une photographie de l’abbé Pierre en col romain, souriant aux côtés de ses deux amis, Sanda Slag et Monsieur Gérard. 
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-Témoignage d’une prostituée suisse 
-Henri Grouès n’en est pas à son coup d’essai avec les prostituées. Le 15 mai 1990, sur le plateau de l’émission de télévision « Ciel mon mardi ! », devant un Christophe Dechavanne médusé, une artiste et prostituée suisse, Grisélidis Réal, raconte avoir croisé l’abbé Pierre dans la maison close où elle officie : « La patronne nous avait dit : “Venez regarder par le trou de serrure de la salle de bains, il y a quelqu’un qui attend son tour.” C’était quelqu’un d’extraordinaire, qui a fait beaucoup de bien à l’humanité. Jamais je n’en ai parlé, mais aujourd’hui, je ne peux plus me taire. C’était un abbé, c’était l’abbé Pierre, et je l’ai vu. » Selon une enquête de la Radio Télévision suisse (RTS), lors de ses séjours à Genève, l’ecclésiastique, également féru de Minitel rose, était connu pour séjourner dans un hôtel situé à deux pas du quartier chaud des Pâquis. 
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-En réalité, le religieux naviguait dans un monde interlope, visiblement à l’aise avec les mauvais garçons ; il en côtoie, dès les années 1950, quelques spécimens au sein des communautés Emmaüs. Comme nous le découvrons au Centre national des archives de l’Eglise de France, à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine), ces déviances étaient connues. Dans un courrier daté du 10 octobre 1956 et adressé au secrétaire général du Secours catholique, Jean Rodhain (1900-1977), chargé par l’archevêché de Paris de « surveiller » le clerc au tempérament impétueux, un bénévole indigné décrit ce qu’il a vu et entendu durant deux années passées au 32, rue des Bourdonnais, dans le 1er arrondissement de Paris, où était alors abritée l’association. « L’entourage de l’abbé Pierre est composé de gens avides d’argent et de moralité douteuse. (…) Le nom “charité” est banni du vocabulaire du prêtre et de ses collaborateurs, auxquels il faut de l’argent par tous les moyens. » 
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-A cette époque, un homme devient l’âme damnée de l’abbé. Il s’appelle Paul Desort (1908-1998). Cet arnaqueur de haut vol pluma plus tard, dans les années 1980, des centaines d’habitants de Chartres : se faisant passer pour un banquier, il leur promettait des rendements exceptionnels. Enseignant et spécialiste de la « micro-histoire », Gérard Leray est l’auteur de Monsieur Paul. L’escroc qui aimait les pauvres (Ella Ed., 2016). Son ouvrage explore les liens entre l’abbé Pierre et l’aigrefin, auquel le religieux resta fidèle toute sa vie. « Ils étaient jumeaux, profitant l’un comme l’autre de l’énorme machine à cash qu’était Emmaüs. En principe, c’était pour de bonnes causes, mais pas toujours… », nous explique-t-il. 
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-Assouvir ses pulsions 
-Non, pas toujours, en effet… Pour assouvir ses pulsions, le prêtre avait besoin de solides revenus, qui lui permettaient notamment de garder sous son emprise financière les femmes dont il faisait, pour la plupart, ses objets sexuels. Le Monde a pu consulter une collection de chèques signés par l’abbé Pierre au bénéfice de E. G. (les initiales du nom civil de Sanda Slag), qu’il a entretenue à grands frais pendant plusieurs années. Ces sommes étaient prélevées sur deux comptes bancaires, dont l’un nous intéresse particulièrement : le CCP 4537 20 E-Paris, à savoir le compte personnel du prêtre, où furent notamment encaissés en urgence les soutiens financiers des donateurs ayant répondu en masse à son appel pour les sans-abri de l’hiver 1954. Ces derniers imaginaient-ils alors comment une partie de leurs oboles seraient utilisées ? 
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-ANTOINE MOREAU-DUSAULT 
-La relation intime entre l’abbé Pierre et Sanda Slag était connue des instances du mouvement social. Nous nous en apercevons en découvrant, dans ce même fonds d’archives privé, une lettre à l’en-tête d’Emmaüs International adressée à E. G. et signée de l’un de ses responsables. Daté du 24 juillet 1996, quelques semaines après la fin des liens de l’abbé avec l’ancien mannequin, le courrier solde financièrement cet épisode malsain. « Veuillez trouver ci-joint un chèque de 10 000 FF [2 378 euros] pour votre déménagement. Cette aide que nous vous accordons, faisant suite à celle de 10 000 FF déjà accordée, est pour nous exceptionnelle. Il est évident que nous ne pouvons plus accorder d’autres aides, étant donné que tant de gens se bousculent et qui, comme vous, sont aux abois. » Déjà abasourdi par les liens financiers incestueux existant entre l’abbé Pierre et son œuvre sociale, le délégué général d’Emmaüs International, Adrien Chaboche, auprès de qui nous évoquons tous ces documents, reconnaît « une trahison des donateurs et une trahison d’Emmaüs » qu’il dénonce avec force aujourd’hui. 
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-Ce sentiment d’un terrible gâchis anime aussi l’historien Philippe Dupont. Le militant social dirigeait le lieu de mémoire dédié au fondateur d’Emmaüs dans le petit village d’Esteville (Seine-Maritime), où le prêtre qu’il admirait a vécu de longues années. Le musée créé en hommage au religieux a été fermé à la fin de l’année 2024, après l’onde de choc des révélations. Depuis, Philippe Dupont explore sans relâche toutes les facettes de « l’affaire » grâce à Espérance Vérité Amitié, une association d’éducation populaire sur les abus spirituels, psychologiques et sexuels qu’il a créée. 
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-Obsédé par l’homosexualité féminine 
-Lui aussi a creusé les circuits financiers opaques dont bénéficiait l’ecclésiastique, lui aussi a compris que les remarques sur l’abbé Pierre entendues à Esteville sur sa propension à toucher les seins des femmes – « un truc de vieillard un peu sénile » – cachaient des agressions beaucoup plus graves. Après le décès du prêtre en 2007, il a dû faire l’inventaire de sa chambre et de son bureau, mettant au jour une autre obsession du prédateur sexuel : l’homosexualité féminine. « J’ai trouvé des livres de sociologues et de philosophes sur le sujet ainsi que des publications dont il était manifestement un fidèle lecteur », nous dit-il. Curieux inventaire, en effet : le mensuel Lesbia Magazine, la revue trimestrielle Masques, revue des homosexualités (dont les parutions ont cessé respectivement en 2012 et 1986), et la deuxième édition (1991) de L’Annuaire, qui répertoriait « les lieux, les groupes et les activités lesbiennes, féministes et homosexuelles ». 
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-Dans la lettre qu’elle a envoyée, quelques mois avant son décès, à la Commission indépendante sur les abus sexuels dans l’Eglise pour dénoncer les agressions dont elle a été victime de la part d’Henri Grouès, la mère de Blandine confirme ce penchant. « L’abbé m’a proposé d’avoir des relations avec une jeune femme qu’il connaissait car il était excité par le spectacle des lesbiennes qui avaient des ébats sexuels devant lui. » 
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-Les adultes n’étaient pas les seuls à attirer l’abbé Pierre, des mineurs ont aussi été ses proies. Dans ses rapports successifs, le cabinet de conseil Egaé, mandaté par Emmaüs pour faire la lumière sur les violences commises par son fondateur, recense 12 victimes âgées de moins de 18 ans au moment des faits. Les témoignages recueillis montrent que certaines d’entre elles étaient présentées par des proches, eux-mêmes agresseurs sexuels, ce qui peut laisser présager l’existence d’un réseau pédocriminel. 
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-« Violences sexuelles sur des mineurs » 
-« Dans notre compte rendu de juillet, nous expliquons qu’il y a plusieurs indices montrant que l’abbé Pierre était en contact avec des gens qui commettaient eux-mêmes des violences sexuelles sur des mineurs et qui avaient accès à des enfants, révèle Caroline De Haas, directrice associée du cabinet Egaé. La commission d’étude sur les violences commises par l’abbé Pierre doit examiner le sujet. » Présidée par la sociologue spécialiste des religions Céline Béraud, cette commission a prévu de rendre un rapport détaillé au printemps 2027. 
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-Prenons connaissance de ces témoignages particulièrement poignants. « X », comme le cabinet la désigne dans son rapport, a subi « des propos à connotation sexuelle, des contacts sur son torse, des baisers forcés alors qu’elle avait 8 à 9 ans » de la part du religieux en 1974 et en 1975. Elle lui est amenée par son beau-père, lequel abuse déjà d’elle. Aux enquêteurs d’Egaé, X explique « que l’abbé Pierre lui a demandé la couleur de sa culotte, a touché sa poitrine, lui a fait des baisers avec la langue ». « Il a mis ses mains entre mes cuisses et a appuyé sa main droite contre mon sexe très fortement », raconte-t-elle. 
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-Une autre victime, « M », âgée de 10 ans au moment des faits, dans les années 1990, a envoyé un e-mail dans lequel elle explique avoir été conduite à l’abbé Pierre par son père, lui-même auteur de violences sexuelles. 
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-Le texte d’Egaé identifie, en outre, deux petites filles, des sœurs, qui ont eu à subir les assauts de l’abbé. Dans leur enfance, explique le cabinet, elles disent avoir été victimes de « violences sexuelles répétées par d’autres adultes, dans le cadre d’activités criminelles organisées à la fois par leurs parents et par un couple qui était responsable d’une association locale Emmaüs ». Leur agression aurait eu lieu dans une maison achetée par ce couple au milieu des années 1970. 
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-Si les témoignages de personnes mineures au moment de leur agression en France ont pu trouver leur chemin jusqu’au cabinet Egaé, il reste un angle mort dont les chercheurs ont du mal à saisir l’étendue : que s’est-il passé dans les pays étrangers visités par Henri Grouès ? Solidement déployée à l’international, l’organisation Emmaüs a permis à l’abbé Pierre de voyager. Beaucoup ! Venezuela, Bolivie, Chili, Etats-Unis, Suisse, mais aussi des pays d’Afrique ou encore d’Asie… le prêtre a sillonné la planète. 
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-Proies potentielles à l’étranger 
-A Roubaix, aux Archives nationales du monde du travail, Le Monde a pu consulter les passeports de l’idole déchue des Français, noircis des tampons de dizaines de pays dans lesquels il s’est rendu. Mais comment identifier aujourd’hui des proies potentielles dans certains de ces pays où la parole sur les violences sexuelles est très difficile à recueillir ? Une Marocaine de 18 ans fait partie des victimes du prêtre, a recensé le cabinet Egaé. Des clichés instantanés réalisés par l’abbé Pierre avec un Polaroid – il ne se déplaçait jamais sans ce précieux appareil – font pourtant craindre le pire. Ils montrent notamment l’ecclésiastique entouré de jeunes adolescents des deux sexes en Afrique ou en Asie. Or, plusieurs victimes ont raconté au cabinet Egaé qu’elles avaient été prises en photo par le prêtre après leur agression. 
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-A toutes ces violations des vœux religieux – pauvreté, chasteté, obéissance –, l’abbé Pierre a-t-il ajouté une autre dissimulation ? Aurait-il engendré un enfant, comme l’affirme depuis plus de vingt ans Jean-Christophe Ménétrier ? Cet ancien éducateur spécialisé est persuadé d’être le fils caché du prêtre, dont il a reçu l’aide financière quand il se trouvait en difficulté. L’abbé aurait eu une aventure avec sa mère, hébergée avec son mari et deux de ses enfants au sein de la première communauté Emmaüs, à Neuilly-Plaisance (Seine-Saint-Denis). 
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-En 2007, il publie, sous le pseudonyme de Jean-Christophe d’Escaut, L’Abbé Père (Ed. Alphée), qui rassemble de nombreux et troublants indices sur l’intérêt que lui prodigue le prêtre dès son enfance, puis au cours de sa vie d’adulte – il aurait par exemple choisi son prénom en hommage au roman de Romain Rolland. Comme celui de Sanda Slag, dont il se rapprochera par la suite, son récit est ridiculisé dès sa publication. Il n’empêche, la rumeur d’un fils caché se répand tellement que, pour y mettre un terme, un test ADN est organisé le 2 juin 2004, dans des conditions « douteuses », selon Jean-Christophe Ménétrier. Le résultat est négatif. Quelques mois plus tard, estimant alors son combat perdu, il écrit une lettre, datée du 31 décembre 2004 et adressée à l’abbé Pierre, aux dirigeants et responsables d’Emmaüs, à tous les compagnons, dans laquelle il s’engage « à ne plus jamais évoquer auprès de qui que ce soit – ni par la parole, ni par les écrits – cette histoire de “lien familial” ». Il va néanmoins persister. 
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-Nous avons rencontré cet homme dans la petite ville côtière où il habite, en Bretagne. « Il y a vingt ans, ceux qui m’ont reproché de faire cette démarche pour devenir le fils d’un héros devraient se demander pourquoi je la poursuis aujourd’hui alors que, désormais, je ne peux être que le fils d’un monstre. La réponse est simple : je veux connaître la vérité sur mes origines », plaide-t-il. Emmaüs International ayant été désigné comme le légataire universel de l’ecclésiastique, sa succession est achevée, annihilant, semble-t-il, tout espoir d’héritage. 
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-Test ADN de filiation 
-Accompagné par son avocat, Pierre-Alexis Blevin, le septuagénaire a décidé d’intensifier sa quête depuis les révélations de juillet 2024, qui prouvent que « Monsieur Henri Grouès, dit “l’abbé Pierre”, a eu plusieurs relations intimes au cours de sa vie », argumente son défenseur. Priorité est donnée à la remise en question du test ADN déjà réalisé. A l’automne, Me Blevin a écrit à des membres de la famille de l’abbé Pierre pour leur demander de participer à un test de filiation. Sans succès pour le moment. Ne s’avouant pas vaincu, l’avocat a saisi, le 1er décembre, la Commission d’accès aux documents administratifs, afin de prendre connaissance du dossier consacré au prélèvement génétique effectué en 2004 et de vérifier qu’il a été exécuté selon les règles en vigueur. Ce chapitre mémoriel n’est donc pas encore tout à fait clos. 
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-Jusqu’où l’ensemble des révélations à venir terniront-elles l’image de l’ecclésiastique si longtemps porté au firmament ? Et affecteront-elles davantage Emmaüs, dont les dons ont diminué de 30 % en 2024 ? De plus, l’organisation devra, en grande partie, financer les réparations auxquelles les victimes peuvent prétendre. 
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-Même s’il reste quelques irréductibles fidèles au fondateur, le mouvement, réuni en assemblée générale extraordinaire le 21 janvier 2025, a voté à 91 % le retrait de la mention « Fondateur abbé Pierre » du logo d’Emmaüs France. « Cette décision ouvre la voie de l’avenir autour des actions quotidiennes des 38 000 actrices et acteurs de notre communauté », a expliqué le conseil d’administration. 
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-Quelques mois auparavant, Emmaüs s’était attaqué à l’ultime provocation du prédateur sexuel. Sur sa tombe, dans le cimetière du petit village d’Esteville, le prêtre avait demandé que soit gravée l’épitaphe « Il a essayé d’aimer. » Au tout début du mois de septembre 2024, l’association a fait dévisser la grande plaque de marbre où ces mots étaient inscrits. 
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-Lire le premier volet des « secrets de l’abbé Pierre » 
-L’abbé Pierre, l’apôtre des pauvres qui « confondait l’argent d’Emmaüs avec le sien » 
-Marie-Béatrice Baudet et Sarah Belouezzane 
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