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| - | ====== Le Monde – First Wap, la discrète entreprise de cybersurveillance chargée de suivre à la trace journalistes, | ||
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| - | Solène Reveney / « Le Monde » | ||
| - | SOLÈNE REVENEY / « LE MONDE » | ||
| - | First Wap, la discrète entreprise de cybersurveillance chargée de suivre à la trace journalistes, | ||
| - | Par Damien Leloup, Martin Untersinger, | ||
| - | Par Damien Leloup, Martin Untersinger, | ||
| - | Par Damien Leloup, Martin Untersinger, | ||
| - | Article réservé aux abonnés | ||
| - | Enquête Peu connu du grand public, ce vétéran du secteur vend depuis plus de vingt ans une solution de géolocalisation, | ||
| - | Mercredi 4 juin, un ballet de berlines sombres déverse des légions d’hommes en costume devant le chic hôtel Clarion Congress de Prague. Ils sont venus pour l’ISS World, la grand-messe européenne de la surveillance : pendant trois jours, policiers et officiers des services de renseignement du monde entier viennent faire leur marché auprès de vendeurs de logiciels espions en tous genres. | ||
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| - | Sur le petit stand de l’entreprise First Wap, la discussion va bon train. Günther Rudolph, le responsable autrichien des ventes de la société, a loué un espace à deux pas de ceux des poids lourds de la cybersurveillance, | ||
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| - | « Le problème, c’est la licence d’exportation, | ||
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| - | Le projet Surveillance Secrets, mené par Lighthouse Reports et auquel ont participé 14 rédactions, | ||
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| - | Détournement de SMS | ||
| - | First Wap voit le jour en 1999, en Indonésie. Elle est fondée par un Autrichien – Josef Fuchs, mort en 2024 – et un Français – Pascal Lalanne –, résidents de longue date du pays. La société conçoit d’abord une messagerie électronique basée sur des SMS. Le succès de l’application est balayé par l’explosion de la bulle Internet : en 2004, le cofondateur français quitte l’entreprise, | ||
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| - | Leur outil de pistage, appelé FastTrax puis Altamides, émerge au milieu des années 2000. Elle permet de géolocaliser les téléphones portables, puis, plus tard, d’intercepter les appels et SMS. Pour cela, elle profite du fonctionnement des opérateurs téléphoniques : pour acheminer les communications, | ||
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| - | First Wap, profitant du laxisme généralisé de l’industrie des télécoms en matière de sécurité, n’a qu’à silencieusement interroger les opérateurs pour géolocaliser n’importe quel appareil dans le monde. La firme propose aussi le détournement de SMS, utile pour prendre le contrôle d’un compte WhatsApp en captant le message contenant le code pour transférer le compte d’un téléphone à un autre. | ||
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| - | A son lancement, First Wap est pionnière. « Ils étaient les premiers, et pendant quelques années parmi les leaders de ce marché », selon une source au sein de l’industrie de la surveillance israélienne. « Je me souviens de quand j’ai vu l’outil pour la première fois. J’étais stupéfait, absolument stupéfait », se remémore un ancien commercial de l’entreprise. | ||
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| - | Discrétion garantie | ||
| - | Altamides – proposée à un prix pouvant atteindre 20 millions de dollars – diffère des logiciels espions comme ceux vendus par les sociétés israéliennes NSO Group ou Paragon Solutions, en ce qu’il ne pénètre pas le téléphone. Son action étant cantonnée aux réseaux auxquels le téléphone visé est connecté, elle est complètement invisible et indétectable. | ||
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| - | C’est en partie pour cela que la société a passé deux décennies sous les radars. Une discrétion qu’elle utilise d’ailleurs comme argument commercial : « Ils sont tous si connus, ils sont dans les pages des journaux, vous savez. C’est pas bon », souffle ainsi Günther Rudolph au sujet de NSO Group et consorts au journaliste sous couverture. | ||
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| - | Un autre argument que First Wap a fait valoir à ses clients au fil des années est sa capacité à localiser les téléphones même lorsque la cible est en déplacement à l’étranger. Pour cela, l’entreprise utilise des contrats d’interconnexion, | ||
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| - | Sollicitée par les rédactions du projet Surveillance Secrets, Telecom Liechtenstein a annoncé avoir « suspendu ses relations avec First Wap avec effet immédiat et bloqué tous ses services », le temps de « clarifier les allégations » de mésusage de l’accord qui liait les deux sociétés. | ||
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| - | Au fil de ses vingt années d’existence, | ||
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| - | Du reste, les intermédiaires agissant pour le compte de First Wap ont démarché l’Algérie, | ||
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| - | Contourner les sanctions | ||
| - | A Prague, les équipes de First Wap se montrent même arrangeantes pour contourner d’éventuelles sanctions occidentales. « Si vous avez un passeport autrichien, comme moi, je ne suis même pas autorisé à connaître le projet. Parce que sinon je peux aller en prison, explique ainsi Günther Rudolph au journaliste. C’est pourquoi un tel deal, par exemple, on le fait via Jakarta, signé par notre directeur général indien. On ne saura jamais rien de ce projet. » | ||
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| - | Sollicitée, | ||
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| - | First Wap semble cependant peu regardante quant à l’utilisation qui peut être faite de son outil. Lors de son entretien avec le journaliste sous couverture, à l’ISS World à Prague, Günther Rudolph propose ainsi de surveiller des manifestants – interrogée sur ce moment de la discussion, l’entreprise évoque un « malentendu ». Et les données consultées par les rédactions du projet Surveillance Secrets montrent clairement que les cibles vont bien au-delà du cadre légal des écoutes internes ou de la lutte contre la criminalité. | ||
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| - | Des employés de Google ciblés | ||
| - | L’outil de surveillance a par exemple été utilisé en janvier 2014 pour suivre à la trace un cadre commercial d’Airbus Defence and Space, filiale militaire et spatiale du consortium européen. Alors que l’homme est basé à Oman et chargé des marchés de plusieurs pays du Golfe, son téléphone est géolocalisé par Altamides à plusieurs centaines de reprises, quasi quotidiennement pendant une quinzaine de jours. | ||
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| - | Ses déplacements en région parisienne – à Elancourt (Yvelines), au siège de son entreprise, dans la capitale et près de la Défense – puis à Oman sont suivis de près. Par qui ? Rien, dans le contexte géopolitique de l’époque ou dans l’activité connue de son employeur, ne permet d’expliquer cette surveillance. Contacté, ce cadre n’a pas souhaité répondre à nos questions. Airbus n’a pas non plus souhaité s’exprimer. | ||
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| - | De nombreuses cibles ont également été identifiées par les rédactions du projet Surveillance Secrets aux Etats-Unis, un territoire souvent hors limites pour les vendeurs de technologies de surveillance, | ||
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| - | C’est aussi le cas de plusieurs employés de Google, en 2009. Certains d’entre eux travaillaient alors sur des questions liées à la localisation des téléphones mobiles : peut-être ont-ils testé sur leurs propres téléphones la technologie de First Wap. Mais alors pourquoi Anne Wojcicki s’est retrouvée ciblée au même moment ? La fondatrice de la start-up à succès 23andMe était à l’époque la femme de Sergueï Brin, cofondateur et dirigeant de Google. L’entreprise n’a pas souhaité commenter, et Mme Wojcicki a assuré n’avoir pas eu connaissance de cet espionnage. | ||
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| - | Identification difficile | ||
| - | Comme souvent avec les outils de surveillance, | ||
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| - | Adam Ciralsky, journaliste et ancien officier de la CIA, a pour sa part été ciblé par Altamides alors qu’il travaillait sur des sujets liés à l’armement, | ||
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| - | Enfin, il y a souvent des cas où la surveillance reste mystérieuse. Des dizaines de salariés d’une filiale du groupe Red Bull en Autriche et en Allemagne ont ainsi été géolocalisés à de très nombreuses reprises entre 2007 et 2013, sans que le motif ni le commanditaire n’apparaissent clairement. | ||
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| - | L’identification des clients d’Altamides est d’autant plus difficile que l’outil n’est pas resté aux seules mains des gouvernements. Des documents consultés par le consortium attestent que M. Saward a été directement ciblé par KCS, qui travaillait alors pour un client qui cherchait à savoir si le journaliste était rémunéré en secret pour le dénigrer. L’entreprise d’intelligence économique britannique a aussi utilisé Altamides dans plusieurs autres enquêtes que la société basée à Londres réalisait pour des clients privés. | ||
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| - | Stuart Poole-Robb, son dirigeant, affirme ne pas être « impliqué dans la vente ou l’usage de matériels de surveillance inappropriés » et soutient que « les allégations » concernant son entreprise sont « inexactes ». Il assure ainsi n’avoir jamais démarché quiconque pour vendre Altamides, et réfute en particulier toute accusation d’offre à destination du Vatican, malgré les documents le prouvant, consultés par le consortium. | ||
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| - | Cet article a été réalisé dans le cadre du projet Surveillance Secrets, coordonné par Lighthouse Reports. Ont participé à cette enquête : Paper Trail Media, The Center for Investigative Reporting, ZDF, Der Spiegel, Der Standard, Tamedia, Haaretz, Tempo, Krik, Investigace.cz, | ||
| - | Damien Leloup, Martin Untersinger, | ||
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