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« Taxer à 2 % mon patrimoine serait acceptable [ElseNews]

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« Taxer à 2 % mon patrimoine serait acceptable

Avec 21 000 commerces partenaires et un volume d’affaires de 2,3 milliards d’euros en 2024, Alma s’est imposée comme l’une des pépites françaises de la finance. Spécialiste du paiement fractionné – qui permet aux consommateurs de payer en plusieurs fois un achat –, la fintech fondée en 2018 par Louis Chatriot et Guillaume Desloges a levé 143 millions d’euros, en dette et via des investisseurs tels qu’Eurazeo ou Bpifrance. Le duo n’est plus majoritaire au capital.

L’entreprise, qui emploie 375 salariés, n’est pas encore rentable. Malgré un produit net bancaire de 50,9 millions d’euros, en hausse de 96 % sur un an, Alma a enregistré une perte d’environ 14 millions d’euros en 2024. Des chiffres classiques pour une start-up ambitieuse, encore en phase de conquête, et qui doit faire face à une concurrence rude (Floa, Klarna…). Alma est ainsi l’archétype de la French Tech en croissance : forte traction commerciale, financement massif, modèle économique encore déficitaire. Et des fondateurs qui pourraient à terme figurer parmi les contribuables visés par la taxe Zucman. L’économiste propose un impôt plancher de 2 % pour les patrimoines de plus de 100 millions d’euros.
Alors qu’une large partie de l’écosystème tech se montre hostile à cette proposition fiscale, le PDG d’Alma se dit pour. Payer l’impôt en cédant des parts à l’Etat ? « Une idée intéressante », assure-t-il. Quitter le pays si une telle taxe est instaurée ? « Absolument pas. » Ce diplômé de Polytechnique et de Stanford plaide pour une élite entrepreneuriale solidaire des efforts demandés à l’ensemble des Français.
Challenges – Êtes-vous directement visé par la taxe Zucman ?
Louis Chatriot – Mon patrimoine n’est pas encore assujetti à une potentielle taxe Zucman. Reste que ce sujet me concerne au plus haut point, en tant que dirigeant-actionnaire. La croissance de notre entreprise est très importante, elle prend donc de la valeur. Et en tant que citoyen, je suis convaincu qu’il faut amplifier le partage des efforts.

Êtes-vous prêt à accepter cette taxe ?
Soyons clairs : je n’ai aucun lien avec M. Zucman, je ne connais pas cet économiste. Reste que je suis plutôt favorable à cet impôt. La France va devoir prendre des décisions budgétaires fortes pour ne pas aller dans le mur. Les Français risquent d’avoir moins. Pour faire accepter ces mesures difficiles, il est important que les leaders et les plus fortunés montrent l’exemple en mettant la main à la poche pour soutenir l’effort collectif. Cette mesure est aussi symbolique – et le symbole est très important pour faire fonctionner le collectif France.
Toutefois, taxer les riches n’est pas une solution magique. Elle n’exonère pas l’Etat de mieux flécher et de mieux dépenser les deniers publics.
En taxant le patrimoine professionnel, donc l’outil de travail, et plus seulement les revenus, cette taxe n’est-elle pas dangereuse ?
Les opposants arguent qu’il est « aberrant » de taxer le stock (le patrimoine en actions) et qu’il faudrait uniquement taxer les flux (l’argent disponible). Mais si l’on considère que les inégalités de patrimoine augmentent – ce qui est, pour moi, un problème profondément politique –, il est logique de taxer le stock, c’est-à-dire des bénéfices qui dorment dans les holdings ou même des actions. Et cela même si une entreprise ne réalise pas encore de bénéfices. Taxer le patrimoine ne doit pas être un tabou, s’il est fait de manière raisonnée et équilibrée.
Il ne faut pas créer de la bureaucratie.
L’idée de payer cette taxe en actions ne vous choque donc pas ?
Pour les uns, c’est l’URSS, pour les autres, il s’agit de défendre l’esprit pro business. Il faut trouver le bon dosage. Au risque de surprendre, je trouve cette idée intéressante. C’est avant tout un sujet de pacte d’associés et de répartition des droits capitalistiques. Il est tout à fait possible de dissocier droits économiques et droits de gouvernance, c’est-à-dire les droits de vote. L’État pourrait bénéficier de ces actions sans peser sur les décisions. Et si la valorisation de l’entreprise baisse, c’est lui qui assume le manque à gagner fiscal. Enfin, rien n’empêche de fixer un droit préférentiel pour l’entrepreneur afin qu’il rachète ses actions à la puissance publique.
Techniquement, ce dispositif est-il viable ou totalement irréaliste ?
C’est l’élément crucial. Il ne faut pas créer de la bureaucratie. Si le dispositif nécessite six mois de travail par an, des dizaines de rendez-vous avec les actionnaires et l’État, ça ne fonctionnera pas. Je ne me lève pas le matin pour discuter avec le fisc, mais pour faire grandir une entreprise innovante portée par des salariés formidables.
Envisageriez-vous de quitter la France si cette taxe entrait en vigueur ?
Absolument pas. Taxer à hauteur de 2 % mon patrimoine serait acceptable. La concentration des richesses est très importante, cet effort est soutenable pour les entrepreneurs au regard de la gravité de la situation d’endettement que traverse notre pays. Encore une fois il s’agit d’un effort collectif nécessaire.
Votre prise de parole tranche avec une partie de la tech française, vent debout contre ce projet…
J’entends cette levée de boucliers, mais elle me semble un peu maladroite. Il y a dix, quinze ou vingt ans, nous n’étions que des start-up. À l’époque, nous étions les challengers. Aujourd’hui, nous sommes devenus des champions. Et quand on est en tête de cordée, on doit montrer l’exemple, pour donner envie aux autres de nous suivre. Or, j’ai eu le sentiment d’un écosystème qui cherche à défendre ses privilèges, même si une grande partie de la French Tech est favorable à ce principe de redistribution.
Il faut relire la pyramide de Maslow : d’abord manger, boire, dormir. Ensuite seulement, on peut se projeter. Le fait que notre écosystème puisse aujourd’hui revendiquer son leadership montre que nous avons franchi les premières marches : faire naître les entreprises, les faire survivre, les rendre crédibles à l’échelle régionale, nationale et continentale. Nous sommes désormais matures. Mais attention à la rançon de la gloire. Il ne faut pas refuser le principe même de solidarité.
Gabriel Zucman met en garde contre le risque de sécession des élites de la tech française, comme cela a pu se passer aux États-Unis. Partagez-vous cette mise en garde ?
Il faut regarder attentivement ce qui se passe aux États-Unis. Une poignée de génies de la tech ont profondément réussi. De ce succès, ils estiment être en capacité de mieux gérer un pays que l’État. Je me méfie de l’argument qui consiste à faire de la réussite entrepreneuriale une caisse de résonance dans laquelle mes idées passeraient avant – ou seraient meilleures – que celles des autres. Le mot sécession est encore fort aujourd’hui, mais l’hypothèse prend de l’ampleur. De ce point de vue là, j’espère que nous ne ressemblerons pas à la tech américaine.
https://www.challenges.fr/economie/taxer-a-2-mon-patrimoine-serait-acceptable-la-voix-dissonante-du-pdg-de-la-fintech-alma-sur-la-taxe-zucman_625483

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