Jean-Michel Aphatie © Richard BRUNEL
Voici donc, installé à Matignon, le cinquième Premier ministre en un peu plus de trois ans. On se pince en écrivant cela. La Constitution de la Ve République a été pensée comme une mécanique de précision susceptible de garantir à la France une stabilité ministérielle qui lui avait tant manqué dans les Républiques précédentes. Emmanuel Macron a tout déréglé, consciencieusement, à force d’erreurs, de maladresses et d’un manque stupéfiant de jugement. Bien sûr, il ne l’a pas fait exprès. Et je sais, c’est très méchant de l’écrire ainsi.
Le pire, on peut le craindre
Que va-t-il se passer désormais ? Le pire, on peut le craindre. Le Premier ministre doit amadouer cette partie de la gauche qui ne veut pas faire la Révolution.
Pour cela, il a deux cartes. Soit il fait payer les riches. Passion nationale. Soit il revient sur la réforme des retraites. Demande générale.
Dans les deux cas, ce qu’il gagnerait ici, il le perdrait ailleurs. Ils auraient belle figure, les Retailleau, Wauquiez, Attal ou Philippe, s’ils acceptaient le contraire de ce qu’ils professent depuis des années. Le risque est donc grand que le nouveau chef du gouvernement ne dure pas longtemps. D’où la question suivante : faut-il se préparer, déjà, à la nomination d’un sixième Premier ministre dans ce quinquennat que l’on croirait maudit ? Oui, il vaut mieux. À moins qu’une dissolution, ou une démission, ne vienne rompre le sortilège et que les urnes donnent à quelqu’un – n’importe qui au point où nous en sommes – les moyens de gouverner.
On ne sait pas comment meurent les démocraties. Nous avons perdu le souvenir de leur chute, au siècle dernier, en Europe.
Nous pensons, depuis, que ces drames ne se renouvelleront pas, que la sagesse des hommes, dont nous savons pourtant qu’ils ne le sont pas, nous préserveront du drame. Pourtant, les nuages s’amoncellent. Un conflit à nos portes, un autre dans l’Orient proche, l’angoisse fabriquée par des vagues migratoires elles-mêmes constituées par la misère, la peur et les incertitudes face aux violences, un désastre budgétaire qui pourrait déboucher sur une crise financière, tout se mélange pour susciter un immense frisson. Tout à coup, ceux parmi nous qui dirigent paraissent petits, faibles, écrasés par la montagne. Alors, nous perdons confiance. De quoi sera fait demain ? L’incertitude saisit les cœurs et brouille les esprits.
Regardons les Etats-Unis
À ceux qui pensent que j’exagère : regardons le monde, et spécifiquement les États-Unis. Pendant plus de deux siècles, cette terre lointaine a été la boussole de nos libertés.
Aujourd’hui, elle apparaît comme le champ d’expérimentation des extrémismes et s’enfonce dans une violence susceptible de détruire ses institutions.
Évidemment, chaque pays suit son chemin, vit son histoire qui ne ressemble à aucune autre. Mais hélas, les points de chute se ressemblent et le péril n’est peut-être pas aussi éloigné qu’on le croit.
Jean-Michel Aphatie
Journaliste politique reconnu, Jean-Michel Aphatie, passé par la presse écrite et la radio, tient une chronique, chaque jour, dans Quotidien sur TMC.
A la une
https://www.lamontagne.fr/paris-75000/actualites/la-chronique-politique-de-jean-michel-aphatie-le-peril-nest-peut-etre-pas-aussi-eloigne-quon-le-croit_14708989/
you see this when javscript or css is not working correct