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Avec l'essor de l'IA, le retour de la théorie de « l'Internet mort » | Les Echos
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Avec l'essor de l'IA, le retour de la théorie de « l'Internet mort »
LES GRANDS MYTHES DE L'IA (3/5) - Née dans les années 2010, la « dead Internet theory » force le trait sur un Internet davantage rédigé par les robots que les humains. Loin de se faire oublier, elle est plus vivace que jamais en raison de la démocratisation de l'intelligence artificielle.
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« Mindful ». Logiciel spécifique fonctionnant en temps réel, réalisé par l'artiste Jeff Guess, exposé au Jeu de Paume, à Paris, dans le cadre de l'exposition « Le monde selon l'IA », jusqu'au 21 septembre 2025.
« Mindful ». Logiciel spécifique fonctionnant en temps réel, réalisé par l'artiste Jeff Guess, exposé au Jeu de Paume, à Paris, dans le cadre de l'exposition « Le monde selon l'IA », jusqu'au 21 septembre 2025. (Photo Jeff Guess)
Par Florian Dèbes
Publié le 13 août 2025 à 07:51Mis à jour le 13 août 2025 à 11:05
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Internet est mort. Mais si vous lisez cet article sur le web, vous êtes libre de ne pas croire à cette effarante théorie. Née dans les années 2010 sur des forums anglo-saxons, elle accuse le gouvernement américain d'avoir transformé la Toile en un théâtre d'échanges majoritairement factices. Pour modeler l'opinion publique, des internautes qui n'existent pas commenteraient des articles, des vidéos et des images créées grâce à l'intelligence artificielle.
« Il y a dix ans, la théorie était plutôt spéculative, mais avec l'IA générative, elle peut désormais être observée de première main », expliquait l'an dernier le chercheur Yoshija Walter dans la revue « Nature ».
Des clics bien humains
Sur le fond, la théorie de l'Internet mort est bien sûr très exagérée. Tous les jours, publicitaires, journalistes et créateurs de contenus publient vidéos, images, podcast, musiques et articles consommés par les internautes. En 2024, 84 % des Français de 12 ans et plus se sont connectés tous les jours à Internet, selon le baromètre des usages numériques du Crédoc.
Leurs clics bien humains font vivre 300.000 professionnels du marketing digital et 160.000 influenceurs, sans compter les journalistes, les développeurs et les éditeurs de sites web et d'applications mobiles. Certaines stars d'Internet finissent par rencontrer leurs fans : ils existent en chair et en os.
Quand les internautes n'existent pas
A ce stade, un esprit rationnel aurait tendance à écarter cette théorie invérifiée. Mais tout n'est pas faux. Il est même avéré que certains internautes n'existent pas. Avec l'IA, ils sont même de plus en plus nombreux…
Dans la publicité, les professionnels ne comptent plus les affaires de fraude à la mesure d'audience : aux Etats-Unis, dix ans après le début des faits, Facebook et Instagram font par exemple l'objet d'un procès pour avoir gonflé artificiellement la visibilité de leurs encarts.
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De leur côté, les plateformes de streaming comme Spotify ou YouTube font face depuis longtemps à des faux clics qui tentent d'accroître la rémunération de certains créateurs en dopant les vues sur leurs vidéos ou leurs chansons. Capables de générer des textes, des voix et des images proches de la réalité (deepfake), l'IA et ses grands modèles multimodaux facilitent la vie des faussaires de l'Internet.
Les projets de Mark Zuckerberg
Ainsi, Lu Do Magalu, Leya Love ou Aitana Lopez ont tout des influenceuses - le style, la plastique, les partenariats avec les marques et le compte Instagram suivi par des milliers voire des millions de personnes. Mais ces influenceuses virtuelles n'existent qu'en photos et en commentaires générés par l'IA.
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La prochaine étape donnera de l'eau au moulin des complotistes. Le fondateur de Facebook, Mark Zuckerberg, a récemment expliqué qu'il comptait sur l'IA et des chatbots conversationnels personnalisés, mais donc complètement artificiels, pour résoudre les problèmes de solitude.
Sur X, l'ex-Twitter, une partie des messages est d'ores et déjà rédigée par Grok, le chatbot décomplexé et parfois raciste du réseau social d'Elon Musk.
La montée en puissance des bots
Mais au-delà des chatbots, d'autres robots d'Internet se multiplient. « Avec le développement de l'IA, la propagation des bots sur Internet ne va faire que s'amplifier », assure Florian Malecki, le patron des ventes en Europe d'Imperva, une société de cybersécurité rachetée par Thales.
La technologie rend plus facile la programmation de ces petits logiciels au fonctionnement autonome. Selon les derniers rapports d'Imperva, environ la moitié du trafic web enregistré chez ses clients ne provient déjà plus d'internautes mais de bots.
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Certains bots n'ont toutefois rien de dangereux, ils ne font qu'automatiser la collecte ou le traitement de données. Mais la majorité d'entre eux pose problème. Ils volent des mots de passe, saturent des sites web pour les forcer à s'éteindre… et diffusent massivement la propagande de certains gouvernements pour tenter de manipuler les opinions publiques à l'intérieur et en dehors de leurs territoires.
Avertissements
« La théorie de l'Internet mort nous rappelle qu'il faut être sceptique et naviguer sur le web avec un esprit critique », relèvent Jake Renzella et Vlada Rozova, un binôme de chercheurs australiens auteur d'un article sur le sujet.
Cette théorie sonne aussi comme un avertissement pour les chercheurs en IA. « D'où viendra la prochaine génération de données d'entraînement de haute qualité ? », s'interroge Jody Bailey, le directeur des technologies de Stack Overflow, un site communautaire de développeurs.
Alors que les IA apprennent les raisonnements humains en analysant la quasi-totalité du web, l'idée d'une IA qui aura appris principalement sur des textes générés par une autre IA plonge le secteur dans une forme de vertige.
DANS LE PROCHAIN EPISODE
« ChatGPT président ! » : l'algocratie ou quand l'IA prend l pouvoir. Retrouvez tous les épisodes de notre série d'été « Les grands mythes de l'IA »
Florian Dèbes
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