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Car si la France a beaucoup d'indicateurs au rouge, du niveau des élèves jusqu'au déficit public en passant par le poids de l'industrie, le taux d'emploi ou la robotisation, elle a aussi des indicateurs au vert. En particulier celui qui détermine l'intervention du Fonds monétaire international : la balance courante. [ElseNews]

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Le mythe du FMI à Paris
https://www.lesechos.fr/idees-debats/editos-analyses/le-mythe-du-fmi-a-paris-2183266

Attention attention mesdames et messieurs, le grand méchant loup sera bientôt à Paris ! Le FMI va bientôt mettre la France sous tutelle ! Voilà un message qui revient souvent, jusque dans la bouche du ministre de l'Economie. Il a évidemment la vertu de faire peur en pointant la situation réellement dramatique des comptes publics français. Mais il a le défaut d'être imaginaire.

Car si la France a beaucoup d'indicateurs au rouge, du niveau des élèves jusqu'au déficit public en passant par le poids de l'industrie, le taux d'emploi ou la robotisation, elle a aussi des indicateurs au vert. En particulier celui qui détermine l'intervention du Fonds monétaire international : la balance courante.

Jamais de déficit de plus de 1 %
Ce n'est d'ailleurs sans doute pas un hasard si le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, tient à présenter les résultats de la balance des paiements du pays - les échanges de biens, services et capitaux - au lieu de laisser cette mission à son directeur des statistiques. En juillet, il a ainsi indiqué que la balance courante a dégagé l'an dernier un excédent de 3 milliards d'euros, soit 0,1 % du PIB. Autrement dit, elle est à l'équilibre.

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Ce voisinage de l'équilibre n'est pas nouveau. Depuis plusieurs décennies, la balance courante de la France n'a jamais enregistré un déficit courant de plus de 1 %, sauf en temps de crise temporaire (après la relance de 1981, lors de l'épidémie de Covid en 2020, sous l'effet de la flambée des prix de l'énergie en 2022).

Inertie et paresse
Cette bonne nouvelle passe trop souvent sous silence. D'abord parce que c'est une bonne nouvelle. Ensuite, parce que l'attention se concentre obsessionnellement sur la balance commerciale, qui reflète les seuls échanges de marchandises. A tel point qu'au début des années 1990, un ministre des finances, Pierre Bérégovoy, avait demandé à ses services d'inventer un problème technique de désaisonnalisation des données pour reporter la publication d'un chiffre particulièrement mauvais alors qu'il devait être interviewé le soir même dans un journal télévisé.

Si la balance commerciale prend si bien la lumière, c'est d'abord par inertie et paresse. Les premières mesures sur les transactions de marchandises ont été faites il y a… trois siècles. Elles ont longtemps constitué le seul indicateur fiable des échanges avec le reste du monde.

Epargne privée contre désépargne publique
Ensuite, les journalistes aiment bien faire des gros titres avec le solde commercial de la France car il est constamment médiocre. En déficit depuis un quart de siècle, un déficit qui a même dépassé les 160 milliards d'euros en 2022.

Mais si la France achète plus de biens au reste du monde qu'elle n'en vend, elle vend au contraire davantage de services qu'elle n'en achète. Du conseil aux entreprises, des logiciels, des nuits d'hôtel, des billets d'avion. L'an dernier, l'excédent des services a pratiquement compensé le déficit des biens. D'où l'équilibre.

Or cet équilibre est essentiel. Il signifie que la France n'a pas à demander de l'argent aux autres pays. Contrairement à son Etat, le pays ne vit pas « au-dessus de ses moyens », comme on l'entend trop souvent. A l'échelon national, l'épargne privée des particuliers et des entreprises compense la désépargne publique.

Effroyable rigueur
Les pays qui ont dû se résoudre à faire appel au FMI étaient dans une situation très différente. Leur déficit courant dépassait toujours largement 1 % de leur PIB. Le cas le plus évident est bien sûr celui de la Grèce, qui avait un déficit courant supérieur à 10 % de son PIB depuis le milieu des années 2000. Quand les investisseurs ont brutalement cessé de lui prêter de l'argent en 2010, le pays n'a eu d'autre choix que de casser sa demande intérieure pour rétablir ses comptes extérieurs, d'où une effroyable rigueur.

C'est aussi le cas du Royaume-Uni, le seul grand pays industriel qui a dû appeler au secours en 1976, quand le choc pétrolier avait fait déborder son déficit courant à près de 4 % de son PIB. C'est le cas du Mexique avec un déficit de plus de 5 % en 1980-1981, que les Américains ont brutalement cessé de financer quand les taux d'intérêt ont brutalement remonté aux Etats-Unis pour casser une vague d'inflation. Ou de l'Argentine en 1998.

Difficultés de balance des paiements
Idem lors de la grande crise asiatique de 1997. La Thaïlande, qui avait ouvert le bal, avait un solde courant de -8 % de son PIB en 1996, L'Indonésie avait approché les -3 %, la Corée du Sud les -4 %. L'intervention du FMI avait été tellement malencontreuse que tous les pays de la région se sont efforcés ensuite de se protéger en accumulant d'énormes excédents, Chine en tête…

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Même s'il n'avait pas brillé en Asie, le FMI a pour mission d'aider les pays quand ils traversent ce genre de crise. L'article I de ses statuts stipule qu'il doit d'abord « encourager la coopération monétaire internationale » mais aussi mettre des ressources « à la disposition des Etats membres qui font face à des difficultés de balance des paiements ». Et non de ceux qui ne savent pas endiguer leur déficit public.

Ceux qui agitent régulièrement la menace du FMI à Paris ignorent sans doute tout ça. Ou ils le savent comme Eric Lombard, mais ils cherchent désespérément un moyen de faire comprendre le drame d'une dérive budgétaire qui risque d'étouffer l'économie à petit feu. Ce qui est sûr, c'est que le gouffre des comptes publics de la France n'est pas un problème international de finance, mais un problème intérieur de répartition. Il appellera donc une solution politique nationale. Qui passera par le Parlement, ou des élections, ou une crise.

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