https://developers.google.com/search/docs/appearance/ai-overviews
Vous savez ce qui est formidable avec l’intelligence artificielle ? C’est qu’elle va peut-être réussir à faire quelque chose que même les pires virus ou nos députés n’ont jamais réussir à accomplir depuis toutes ces années : Tuer Internet de l’intérieur.
Et oui, alors que Google AI Overviews et Perplexity prétendent nous faciliter la vie en résumant absolument tout, ils viennent de signer (encore une fois) l’arrêt de mort de milliers de sites web qui nourrissaient justement leur IA sans contrepartie.
Alors c’est vrai que c’est pratique de poser une question à Google et d’avoir directement la réponse sans avoir à cliquer sur un seul lien mais il y a un petit problème dans cette équation magique qu’apparemment personne n’a voulu assumer chez les géants de la tech : si plus personne ne visite les sites qui produisent l’information, ces sites meurent. Et s’ils meurent, ben il n’y a plus d’information à résumer. C’est logique !
Et les chiffres qui foutent les jetons sont là, noir sur blanc. Le New York Times a perdu 36% de son trafic en quelques mois à cause de Google AI Overviews. Chegg, une plateforme éducative en ligne, a vu son audience de non-abonnés chuter de 49% en janvier 2025, avec des conséquences directes sur ses revenus. Ainsi, selon une étude de Raptive, les éditeurs de sites pourraient perdre jusqu’à 2 milliards d’euros et les 2/3 de leur trafic à cause de cette technologie. Franchement, même les pires catastrophes naturelles font moins de dégâts sur l’économie.
Car depuis mai 2024, Google AI Overviews a conquis 1,5 milliard d’utilisateurs qui obtiennent leurs réponses directement sur la page de résultats. Le taux de clics moyen a donc dégringolé de près de 30% depuis le déploiement massif de cette fonctionnalité. Il faut quand même savoir que Google aspire littéralement le “top 100 des résultats de recherche” selon ses propres termes pour construire ses résumés, mais bien sûr ne rémunère pas les créateurs de contenu qu’elle pille.
Et c’est exactement le même mécanisme avec Perplexity et ChatGPT. Ces outils prennent le contenu des sites web, le recyclent, le résument et le recrachent à l’utilisateur. En gros, c’est du parasitisme pur et dur. Le truc ironique c’est que ChatGPT génère maintenant 3,5 millions de visites par mois vers les éditeurs (+572% en 6 mois), mais ça reste moins de 0,1% de leur trafic total. Autant dire que dalle.
La résistance commence heureusement à s’organiser. Pas moins de 67% des sites d’actualité les plus fiables bloquent maintenant les crawlers d’IA selon NewsGuard. Le Wall Street Journal et le New York Post ont même porté plainte contre Perplexity pour pillage de contenu. Et en France, plusieurs groupes de presse ont attaqué les plateformes digitales en novembre 2024 pour non-respect de la directive européenne sur les droits voisins. Selon les tribunaux français, Google se doit de négocier une compensation équitable pour l’utilisation des extraits de contenu.
Malgré les blocages, le New York Times, qui a interdit les crawlers de ChatGPT et Perplexity, a quand même reçu 240 600 visites depuis ChatGPT en janvier 2025. Alors comment c’est possible ? Et bien ces IA trouvent toujours un moyen de contourner les restrictions et question fiabilité, on repassera puisqu’une étude d’octobre 2024 montre que 30% des affirmations fournies par Perplexity ne sont pas soutenues par les sources citées. Pire, 51% des réponses IA contiennent des problèmes “significatifs” avec des erreurs, des biais ou des mauvaises interprétations. Et 19% des réponses citant la BBC incluent des erreurs factuelles complètement inventées. Mais bon, au moins c’est rapide !
Alors évidemment, certains essaient de s’adapter pour ne pas crever. L’Answer Engine Optimization (AEO) remplace progressivement le SEO traditionnel et les éditeurs structurent leur contenu pour être référencés dans les boîtes IA, en espérant récupérer quelques miettes de trafic via les liens affichés dans les résumés. Enfin, d’autres misent tout sur les réseaux sociaux, les newsletters et les applications mobiles pour réduire leur dépendance à Google. 26 éditeurs internationaux ont même signé des accords de licence avec OpenAI, Microsoft et Perplexity, dont Le Monde avec OpenAI en mars 2024.
Maintenant, en tant qu’éditeur solo de Korben.info, je suis évidemment impacté par tout ça. Mais contrairement à ce que vous pourriez penser, je ne suis ni rageux ni anti-IA (au contraire, j’adore et je l’utilise) mais je suis quand même dégouté d’avance par tous ces sites que j’adore et qui vont mettre la clé sous la porte.
Me concernant, contrairement aux autres média tech, j’ai un avantage de taille : je suis tout seul, je fais le boulot de 3 ou 4 pigistes lambda à temps plein et j’ai personne à virer. Alors oui, les revenus vont baisser et pour le moment, c’est pas Patreon qui va me sauver parce que objectivement, quasi tout le monde s’en fout que mon site continue d’exister ou disparaisse. Et même si c’était pas le cas, faudrait que je multiplie par 10 les abonnés si je voulais continuer sur le même régime sans trafic, sans pub, sans sponsor et bien sûr continuer à être le Sugar Daddy préféré de l’URSSAF. Et n’oubliez pas que je ne suis pas journaliste et que je ne suis pas officiellement un média de presse, donc j’ai 0 aide, avantage, réductions d’impôts et compagnie, donc même si un truc était négocié entre la presse et les géants de l’IA, je n’en bénéficierai pas, comme d’hab. C’est mon choix, Evelyne !
Et vous me connaissez, je suis résilient, j’ai pas trop de frais de fonctionnement, je peux même re-choper un taf à côté et auto-financer mon site web si j’ai envie et ainsi le faire tenir un looong moment sans thune. Après tout, ce ne sont que quelques pages web, et j’ai juste besoin d’un clavier pour écrire.
Et là vous allez me dire : “Pourquoi continuer ?”. Et bien y’a pas que le pognon dans la vie et si je n’avais plus Korben.info, je pense que je serais vraiment perdu dans ma life. Maintenant c’est sûr qu’écrire et pas être lu c’est nul, mais comme je ne suis ni dans la course au clic, ni dans la course à la page vue, je peux continuer à écrire uniquement pour MON plaisir et uniquement pour la poignée de GENS SUPER COOLS qui me suivent encore (MERCI !!!).
Le truc qui me rend vraiment fataliste dans cette histoire, c’est que nous assistons à un phénomène d’auto-destruction programmée. Google et les autres construisent leurs empires sur le dos de créateurs de contenu qu’ils tuent méthodiquement et quand il n’y aura plus de journalistes pour couvrir l’actualité, plus de blogueurs pour tester les nouveaux produits, plus d’experts pour analyser les tendances tech, ces IA conversationnelles vont alors se retrouver à recycler leurs propres hallucinations, un peu comme un serpent qui se mange la queue, mais en version Silicon Valley.
Donc voilà, encore une fois, je suis dégouté d’avance, car je pense que beaucoup de sites média, notamment en France vont disparaître. Et c’est surtout ça qui me fout les boules car y’a plein de sites que j’aime beaucoup et à qui je souhaite bon courage pour la suite.
Bref, si vous appréciez encore les analyses originales et les points de vue humain, c’est le moment de soutenir directement les créateurs de contenu et médias en ligne que vous lisez car autrement dans quelques années, il ne restera plus que des résumés remplis de fasses infos et de biais, générés par des machines qui auront tué leurs propres sources. Et qu’est ce qu’on va se faire chier…
Source
https://korben.info/google-ai-overviews-massacre-editeurs-web.html
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