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Musk : un passage éclair au Doge, mais des dégâts considérables pour l’avenir [ElseNews]

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Musk : un passage éclair au Doge, mais des dégâts considérables pour l’avenir

Est-il brouillé avec Donald Trump ? Le président américain l’a-t-il manipulé ? A-t-il échoué à réduire les effectifs de fonctionnaires ? Va-t-il parvenir à redresser Tesla ? Quand il s’agit d’Elon Musk, toutes les questions sont permises, tant sa personnalité fascine. Son départ du Doge, le « Département de l’Efficacité gouvernementale » spécialement créé pour lui, n’a pas échappé à la règle, avec des questions surtout centrées sur sa personne. Mais il en est une dont on a peu parlé : les dégâts durables causés par son action politique.

Aux yeux du multimilliardaire, le bilan est clair : s’il n’a réussi à obtenir qu’une minuscule fraction des économies promises (2 000 milliards de dollars !), c’est parce que « la situation de la bureaucratie fédérale est bien pire que je ne l’avais réalisé, a-t-il expliqué au Washington Post. Je pensais qu’il y avait des problèmes, mais le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est difficile d’essayer d’améliorer les choses à Washington. » Dans le même registre auto-apitoyé, il accuse le GOP (Grand Old Party, surnom du parti républicain) d’avoir voté un budget irresponsable, creusant encore le déficit. A l’un de ses partisans, écrivant sur X que « le Doge a fait un travail incroyable, mais le GOP n’a pas réussi à mettre en œuvre la moindre réduction », Musk répond : « Oui (Soupir) ».
Une méthode violente
Elon Musk est trop modeste. « Il n’y a jamais rien eu de tel dans l’histoire américaine, confiait en avril dernier Donald Kettl, auteur de plusieurs ouvrages sur le gouvernement fédéral, à CNN. Il a fallu beaucoup de temps – des décennies et des décennies – pour assembler le gouvernement fédéral tel qu’il était. Et en moins de 100 jours, il l’a démoli jusqu’à ses fondations dans de nombreux domaines ».
« C’est un héritage de carnage et de corruption qui nous hantera pendant de nombreuses années, renchérit Lisa Gilbert, co-présidente du think tank Public Citizen. L’héritage d’Elon Musk, c’est la perte des moyens de subsistance d’employés gouvernementaux essentiels, l’entrave à l’éducation américaine, la perte de financement pour les scientifiques et la violation de la vie privée des Américains, le tout au service d’intérêts particuliers de milliardaires de la technologie corrompus. Le carnage est encore plus horrible à l’échelle internationale, car la tronçonneuse de Musk entraînera la mort inutile de millions de personnes dans les pays en développement. »
Exagéré ? Peut-être pas. En choisissant systématiquement, la méthode violente plutôt que la recherche de compromis, Musk et son équipe ont déstabilisé en profondeur une bureaucratie fédérale qui joue un rôle-clé dans de nombreux domaines. S’agissant de la recherche, par exemple, il a décapité les National Institute of Health (NIH, instituts nationaux de la santé), exigeant des coupes budgétaires de 35 %, paralysant ou annulant des projets pluriannuels de recherche dont certains étaient dirigés par les Prix Nobel, et bouleversant tout ce fragile écosystème dont il est impossible de surestimer l’importance.
Comme le note le Bulletin of the Atomic Scientists, « c’est en grande partie grâce à cette agence gouvernementale vieille de 138 ans – qui fait partie du ministère américain de la Santé et des services sociaux – que le code génétique humain a été déchiffré, que le sida a été isolé, que l’hépatite C a été découverte et que la recherche fondamentale qui a conduit aux vaccins contre le Covid-19 a été effectuée. Au moins 171 scientifiques ayant reçu le prix Nobel ont mené des recherches au sein des NIH ou ont été soutenus par des fonds des NIH. »
Le fisc décapité
La prévention et la gestion des désastres naturels n’ont pas échappé non plus à la serpe : dès le mois de février, la croisade du Doge s’est traduite par 240 licenciements au sein de l’U.S. Geological Survey, une agence qui surveille et étudie les catastrophes naturelles à grande échelle. Le même mois, le gouvernement a licencié des membres de la National Science Foundation – dont les recherches portent entre autres sur les systèmes météorologiques – et supprimé 800 postes au sein de la National Oceanic and Atmospheric Administration (NOAA, Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique). Même travail de démolition à la Federal Emergency Management Agency (FEMA, Agence fédérale de gestion des situations d’urgence). L’été qui commence, annoncé chargé en ouragans, risque de mettre à nu les conséquences de ce jeu de massacre. A moins que d’autres catastrophes s’en chargent sur le plan sanitaire : le département de la Santé est lui aussi passé dans la lessiveuse Doge.
L’un des effets à long terme les plus quantifiables, en dollars, du Doge, est l’Internal Revenue Service (IRS, le fisc fédéral). L’agence a déjà perdu plus de 10 % de ses employés – dont beaucoup figuraient parmi les plus expérimentés et qualifiés –, l’objectif de l’administration Trump étant d’atteindre une réduction de 30 à 40 % des effectifs. Selon une estimation du Yale Budget Lab, la perte d’environ 18 000 employés de l’IRS entraînerait une diminution des recettes fiscales de 159 milliards de dollars sur 10 ans !
Mais il ne s’agit pas seulement de milliards gaspillés. Le Doge a mortellement abîmé le soft power (pouvoir d’attraction) des États-Unis en faisant « passer à la déchiqueteuse » USAID, l’Agence des États-Unis pour le développement international, rayant de la carte une organisation dont dépendaient des millions de personnes dans le monde pour l’alimentation, l’eau, les abris, la surveillance des maladies et les secours en cas de catastrophe. Il a également décapité des milliers de programmes et projets artistiques dans tout le pays, avec, là encore, des conséquences durables. Et il a engagé la bataille contre la radio et la télévision publiques, dont le Congrès veut maintenant finaliser l’étranglement.
Big Brother informatique
Un autre effet durable du tsunami Doge est la façon dont la task force s’est invitée dans les réseaux informatiques les plus sensibles du gouvernement – y compris le système de paiement centralisé du département du Trésor – au nom de l’éradication du « gaspillage, de la fraude et des abus ». Ces systèmes traitent des milliards de dollars de paiements fédéraux et contiennent des données personnelles sur des centaines de millions de personnes. L’effort de croiser ces données pour améliorer la chasse aux immigrants, par exemple, évoque Big Brother. Une avalanche de plaintes en justice contre le Doge (il y en a plus d’une centaine au total) tente d’empêcher une telle dérive, mais leur issue est incertaine. Et le milliardaire peut compter sur les dizaines de « bébés Musk » qu’il a semés à des postes de responsabilité au sein de l’administration fédérale.
Le dernier type de dégât sera peut-être le plus difficile à réparer : la démoralisation immense des fonctionnaires fédéraux, violemment insultés par Elon Musk et l’homme qui, depuis le début, s’est planqué derrière la personnalité hors-norme de l’homme le plus riche du monde pour parvenir à ses fins : Russell Vought, l’un des artisans clés du Projet 2025 de la Heritage Foundation, qui a largement fourni le programme et les hommes de cette présidence. A la Maison-Blanche, il est aujourd’hui à la tête du très puissant Bureau de la gestion et du budget. Cet idéologue très à droite de la droite américaine, qui se décrit lui-même comme un nationaliste chrétien, avait annoncé la couleur dans un discours prononcé il y a deux ans : « Nous voulons que les bureaucrates soient traumatisés. Lorsqu’ils se réveillent le matin, nous voulons qu’ils n’aient pas envie d’aller travailler. »
Les fonctionnaires les plus qualifiés, qui gagnent en moyenne 29 % de moins que dans le privé, sont d’autant plus susceptibles de déserter le secteur public que la garantie de l’emploi et la neutralité appartiennent désormais au passé. C’est cela aussi le legs de « Musk-Attila ».
https://www.challenges.fr/monde/un-heritage-de-carnage-et-de-corruption-qui-nous-hantera-longtemps-les-degats-durables-de-musk-au-doge_605231

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