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-====== Le Monde.fr: Comment fonctionne une hausse des droits de douane ? L’exemple d’un grille-pain, fabriqué en Chine et vendu aux Etats-Unis
-   ====== https://www.lemonde.fr/economie/visuel/2025/03/29/comprendre-les-droits-de-douane-et-qui-les-paie_6587444_3234.html
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-Le Monde - retour à la une
-PUBLIÉ LE 29 MARS 2025
-ÉCONOMIE
-Comprendre les droits de douane et qui les paie
-PAR JULIEN BOUISSOU, BENJAMIN MARTINEZ ET AUDREY LAGADEC
-Donald Trump mise sur les droits de douane pour réduire le déficit commercial américain, augmenter les recettes fiscales, réindustrialiser le pays, créer des emplois, mais aussi faire pression sur certains pays pour qu’ils luttent contre les migrations illégales ou mettent fin au trafic de Fentanyl. Aucun pays ni aucun produit ne sont épargnés.
-Après avoir relevé les taxes d’importation de l’acier, de l’aluminium et des automobiles de 25 %, celles en provenance de Chine de 20 %, Donald Trump s’apprête à imposer des droits de douane réciproques, mercredi 2 avril, baptisé pour l’occasion le « liberation day » ou « jour de libération ». Cela signifie que pour chaque marchandise importée, il va aligner les droits de douane sur ceux du pays d’origine, tout en prenant en compte ses barrières non douanières, telles que les réglementations ou les taxes intérieures comme la TVA en Europe.
-Au-delà des menaces, qui va vraiment en supporter le coût ? Ce sont surtout les consommateurs et les entreprises aux Etats-Unis qui en feront les frais. Pour comprendre comment va se répercuter la hausse des droits de douane dans la chaîne de valeur d’un produit, nous avons pris l’exemple d’un grille-pain, depuis sa production en Chine jusqu’à sa vente aux Etats-Unis.
-La vente au consommateur
-CHINEShanghaiLos
-AngelesLos
-AngelesLos
-Angeles
-Coût du produit : 30 €
-+ marge du revendeur
-Dépenses et marge
-du revendeur
-Avec la mondialisation, la production de grille-pain sur le sol américain a quasiment disparu. Les appareils vendus aux Etats-Unis sont désormais fabriqués à l’étranger. Sur les 144 millions de dollars de grille-pain importés sur le sol américain en 2024, plus de 99 % provenaient de la Chine, où les coûts de production sont plus faibles.
-Ce constat est valable pour l’ensemble de l’électroménager domestique : quatre appareils sur cinq vendus aux Etats-Unis sont produits en Chine.
-Le coût de production d’un grille-pain fabriqué dans une usine chinoise peut varier en fonction des matériaux utilisés, de la taille ou encore de la puissance de l’appareil. Pour notre exemple, prenons un grille-pain vendu sur le site de commerce en ligne chinois Alibaba à 20 €. Ce total englobe le paiement de la main-d’œuvre, les frais de production et la marge du fabricant.
-Comme plus de 80 % des marchandises en transit dans le monde, le grille-pain est expédié par voie maritime, d’un port chinois vers un port américain. Pour établir le coût du transport et les frais logistiques, nous avons réalisé un devis auprès d’Alibaba pour la commande de 1 000 grille-pain, de deux kilos chacun, affrétés par l’armateur Maersk de Shanghaï à Los Angeles. Cela ajoute 4 € au prix de l’appareil.
-Une fois le produit arrivé aux Etats-Unis, la société importatrice américaine doit s’acquitter de tarifs douaniers auprès de l’Etat fédéral. La très grande majorité des produits qui entrent dans le pays sont soumis à différents niveaux de droits de douane, et ce bien avant l’arrivée au pouvoir de Donald Trump.
-Il existe une multitude de classifications pour les appareils électroménagers, en fonction de leur provenance, de leurs matériaux ou du modèle. Pour un grille-pain à ouverture automatique importé de Chine, un tarif initialement fixé à 5,3 % porte son prix à 25 €. A cela, il faut ajouter les 20 % de droits de douane supplémentaires instaurés par Trump sur toutes les importations chinoises depuis le 4 mars. L’appareil passe donc à 30 €.
-En bout de chaîne, le grille-pain est vendu au consommateur américain, directement par l’entreprise importatrice ou par un détaillant. Au prix final s’ajoutent donc les frais de logistique et de transport depuis le port, ainsi que les coûts additionnels et la marge du commerçant.
-QUI PAIE L’AUGMENTATION DES TARIFS DOUANIERS ?
-Il est extrêmement difficile d’évaluer quel sera le coût exact de la guerre commerciale lancée par Trump. En revanche, s’il y a bien un sujet qui fait consensus parmi les économistes, c’est que l’augmentation des droits de douane va en grande partie être supportée par l’économie américaine, en alimentant l’inflation. Plusieurs acteurs peuvent être affectés.
-Coûts avec les tarifs Trump pour :
-tous les acteurs
-Consommateur américain
-Vendeur américain
-Producteur chinois
-A court terme, tout le monde est perdant… sauf l’Etat américain qui collecte des recettes fiscales supplémentaires. L’augmentation des droits de douane fait gonfler l’inflation aux Etats-Unis et renchérit les coûts de production pour les entreprises américaines qui importent des composants.
-La hausse des droits de douane va-t-elle inciter les fabricants chinois de grille-pain à produire aux Etats-Unis ? C’est l’un des paris de Donald Trump. Pour investir, les entreprises ont besoin de visibilité. Or, elles pourraient perdre de l’argent si le président américain annonce soudainement qu’il renonce à imposer des droits de douane, comme ce fut le cas ces dernières semaines. Un grille-pain made in USA devrait être vendu dix fois plus cher que les prix du marché pour être rentable, selon les estimations d’Ed Gresser, ancien représentant adjoint au commerce des Etats-Unis et directeur du commerce et des marchés mondiaux du think tank Progressive Policy Institute. Dans ce cas, il est probable que de nombreux consommateurs cessent d’acheter des grille-pain.
-Autre problème : si les entreprises relocalisent leurs usines aux Etats-Unis, leurs coûts de production vont augmenter, car elles devront payer des droits de douane sur chaque composant ou chaque pièce détachée achetée à l’étranger. Or, durant le XXe siècle, les chaînes de valeur se sont mondialisées. Dans l’industrie automobile par exemple, des milliers de pièces détachées franchissent plusieurs fois la frontière entre le Canada, les Etats-Unis et le Mexique, à l’instar du piston.
-Exemple de chaîne de production d’un piston de voiture
-CANADAMEXIQUEETATS-UNIS
-L’aluminium brut, matériau nécessaire à la fabrication du piston, est expédié du Michigan vers l’Ontario.
-Le piston est moulé et pré-usiné avant d’être renvoyé dans le Michigan.
-Il est ensuite transporté vers le Mexique pour être terminé.
-Une fois fini, le piston est assemblé avec des tiges et des segments dans le Wisconsin avant de revenir dans le Michigan pour être placé dans le moteur.
-Le moteur est expédié en Ontario une dernière fois pour l’assemblage final de la voiture.
-Le véhicule est enfin renvoyé aux Etats-Unis pour y être vendu.
-La nouvelle politique de Donald Trump n’est pas seulement protectionniste. Avec la mise en place, inédite, des droits de douane réciproques, elle met fin à un système commercial né après la seconde guerre mondiale, fondé sur le principe de non-discrimination. Chaque pays devait en effet appliquer les mêmes droits de douane à tous ses partenaires, sauf ceux avec qui un accord a été signé, pour ne pas faire de différence entre les puissantes nations et les faibles, les riches et les pauvres. Ce principe a permis le formidable essor du commerce mondial au cours des soixante dernières années. La hausse des droits de douane américains peut conduire à une montée du protectionnisme sur la planète, c’est-à-dire à une fragmentation du commerce mondial, ou au contraire inciter les autres pays à développer leurs échanges entre eux pour compenser la perte de leurs débouchés aux Etats-Unis.
-Sources : L’Observatoire de la complexité économique ; Harmonized Tariff Schedule, Commission du commerce international des Etats-Unis ; Alibaba ; AliExpress ; Maersk ; The Fiscal, Economic, and Distributional Effects of Illustrative « Reciprocal » U.S. Tariffs, The Budget Lab at Yale, 2025 ; National Retail Federation ; In a hypothetical Trump/Vance economy, a toaster would cost about $300, Ed Gresser, Progressive Policy Institute, 2024 ; Eduardo Solis Consulting ; Mexican Auto Industry Association ; Canadian Vehicle Manufacturers’Association ; Transportation Border Working Group data ; Track One Car Part’s Journey Through the U.S., Canada and Mexico – Before Tariffs, Vipal Monga, Santiago Pérez, Roque Ruiz, Emma Brown, The Wall Street Journal ; The New York Times
-Texte : Julien Bouissou et Benjamin Martinez
-Illustrations : Audrey Lagadec
-Développement : Eric Dedier
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