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Le Cash Investigation sur l'IA n'a pas compris ce qu'était l'IA [ElseNews]

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Le Cash Investigation sur l'IA n'a pas compris ce qu'était l'IA

France 2 a diffusé le 10 avril un nouvel épisode de Cash Investigation intitulé « L’Intelligence artificielle a-t-elle déjà pris le contrôle sur notre quotidien ? ». Un reportage qui se laisse regarder, mais qui peine à distinguer le numérique, les algorithmes et l’IA.
« Ce soir, vous allez découvrir notre grande enquête sur l’intelligence artificielle ». Le 10 avril 2025, Cash Investigation effectuait son retour sur France 2 avec une émission dédiée à l’IA, les deux lettres les plus tendances du moment. Un programme suivi par près d’1,5 million de téléspectateurs, qui visait à informer les Français sur cette grande révolution numérique.
« L’intelligence artificielle est en train de bouleverser le quotidien des Français », peut-on lire dans le synopsis du reportage, disponible en replay sur le site france.tv. Cash Investigation met notamment en avant des recrutements par IA, des services de lutte contre la fraude fiscale ou l’emploi de salariés à Madagascar dans des fermes à clics.
Numerama, qui suit attentivement la révolution de l’intelligence artificielle depuis l’apparition des premiers grands modèles génératifs fin 2023, a regardé le reportage. Et nous avons constaté que les journalistes de France 2, comme de nombreuses autres personnes, ont une définition très floue de l’intelligence artificielle.
« L’IA » partout : Cash Investigation voit de l’intelligence artificielle là où il n’y en a pas
La plupart des sujets évoqués dans le reportage sont essentiels et méconnus du grand public : il est crucial que la télévision les aborde et il ne semble pas anormal qu’un média généraliste les vulgarise. Mais la vulgarisation s’arrête où l’erreur commence.
Le problème est que, dans la très grande majorité des cas, Cash Investigation appelle « IA » ce qui n’en est pas. La numérisation des services publics, l’automatisation de certains procédés ou l’existence d’une main d’œuvre étrangère dédiée à des emplois ingrats n’a pas grand-chose à voir avec la révolution actuelle de l’intelligence artificielle, une nouvelle technologie qui pourrait complètement transformer les interactions homme/machine. Le reportage porte très mal son nom et joue volontairement sur la peur de l’IA pour mentionner des sujets très éloignés de ce qu’il se passe actuellement, sans informer les personnes qui ne connaissent pas l’IA.
Un avatar qui parle avec une voix de synthèse n’est pas une IA
Dans certains cas, Cash Investigation semble s’être fait piéger par des astuces marketing. Les journalistes ont trouvé une startup lyonnaise, Sweeeft.ai, qui prétend avoir créé une IA capable de faire passer des entretiens d’embauche.
Problème, Cash Investigation ne semble pas s’être interrogé sur ce que présentait vraiment l’entreprise. Il explique que « l’IA recruteuse » dispose d’un visage, d’une voix et qu’elle peut analyser des émotions, grâce à une webcam. Le reportage semble oublier deux questions fondamentales quand on parle de nouvelles technologies : est-ce possible ? Et comment ?
L’avatar 3D de Sweeeft n’est pas une IA. Source : Cash Investigation
Ce que Cash Investigation présente comme « une IA » est très certainement une voix de synthèse juxtaposée à un (très mauvais) avatar 3D. Le talent de Sweeeft.ai n’est pas d’avoir transformé les relations RH, mais de réussir à vendre sa solution à des entreprises qui n’y connaissent sans doute pas grand-chose en IA, sans avoir lui-même inventé sa propre technologie d’intelligence artificielle. Toute la partie sur la lecture d’émotion est très sûrement un leurre : il semble impossible (et illégal) que Sweeeft.ai soit vraiment en mesure de déchiffrer un visage en temps réel. Les courbes d’émotion dénoncées par Cash Investigation se basent sans doute sur les mots prononcés, pas le ton.
Il ne faut pas confondre IA et algorithme
Dans le reste du reportage, Cash Investigation a abordé de nombreux sujets qui n’avaient rien à voir avec « l’intelligence artificielle ». L’émission fait le choix de relier tout ce qui touche au numérique et qui utilise des algorithmes au sigle IA. Le reportage aurait pu évoquer la guerre des modèles, les méthodes controversées d’entraînement (avec de nombreux plagiats), le vol du travail des artistes, l’imitation de voix, la transformation de nombreux métiers ou la création de faux documents, mais il a préféré évoquer les sujets suivants (ou n’importe quel angle positif, ce qui est trop souvent oublié) :

Cash Investigation parle des logiciels d’évaluation du personnel de BNP Paribas, qui ont déjà été dénoncés dans de précédents reportages. BNP Paribas classe son personnel et lui attribue des notes depuis plusieurs années, mais utilise depuis un an « une IA » pour retranscrire la voix en texte, afin d’analyser le contenu des appels. Le scandale est ici sans doute plus le fichage des employés que l’utilisation d’un logiciel de voice-to-text qui, en réalité, n’a pas attendu ChatGPT pour apparaître. Le seul avantage des IA récentes est de pouvoir automatiser l’analyse du texte. BNP Paribas se sert aussi de cet argument pour revendiquer son côté précurseur, alors qu’il n’a rien inventé de susceptible de « prendre le contrôle de notre quotidien ».
Pour lutter contre la fraude fiscale, le fisc a mis en place des logiciels chargés d’analyser de nombreuses données. Cash Investigation parle d’une « nouvelle arme pour cibler les fraudeurs, l’intelligence artificielle ». Le reportage explique que les personnes qui font l’objet d’un contrôle ont été sélectionnées par une IA et rajoute : « Cela fait maintenant plus de 10 ans qu’il utilise cette technologie pour lutter contre la fraude fiscale ». Une affirmation qui veut tout dire : il s’agit de technologies numériques et d’algorithmes d’analyse des données, mais absolument pas d’une intelligence artificielle telle qu’elle a été vendue par le reportage. La révolution actuelle n’était pas en cours il y a 10 ans. L’histoire des piscines du fisc a 2 ans déjà.
Un logiciel qui évalue les appels d’un service client n’a pas de quoi faire trembler OpenAI ou Google.
Source : France 2

À Madagascar, Cash Investigation va à la rencontre d’entreprises qui emploient des annotateurs pour entraîner des logiciels, notamment dans la reconnaissance d’images. Il s’agit bel et bien « d’intelligence artificielle », mais dans un sens plutôt vaste. Les nouvelles méthodes d’entraînement des IA génératives sont beaucoup plus sophistiquées et tout porte à croire que les employés filmés n’entraînent pas vraiment des IA, mais font du travail de modération et de contrôle d’images envoyées par des grands groupes. Cash Investigation passe énormément de temps à dénoncer les salaires de ces employés, mais n’aborde pas le lien entre ces fermes à clics et l’intelligence artificielle. Il semble y avoir une confusion sur les méthodes d’entraînement des IA.
Dans une séquence plus « IA », Cash Investigation intègre un service public pour essayer Albert, le chatbot développé par la France pour les employés de mairie. Il y révèle que le service est très mauvais et qu’il ne répond correctement qu’à 10 % des questions correctement. Dommage de ne pas dire qu’un autre service basé sur un LLM, comme ChatGPT ou Le Chat de Mistral, répondrait à 99 % des questions correctement. Le Cash Investigation sur l’IA donne l’impression que l’IA est mauvaise ou conçue pour nous fliquer, mais ne montre aucun usage où elle est efficace.
Albert, le chatbot du service public. Source : France 2
« Désormais, vous le savez, derrière chacune des réponses de l’intelligence artificielle, une femme ou un homme passe de longues heures devant son ordinateur pour faciliter nos quotidiens » est la dernière phrase du reportage. Elle laisse entendre que l’IA est seulement artificielle et qu’elle ne sait rien faire d’elle-même. Une déclaration aussi étonnante que fausse : l’IA dont on parle tant depuis trois ans est capable de s’auto-entraîner. Il est assez fou que le reportage s’achève sur une telle déclaration. Un million de Français se sont couchés en pensant que l’IA dont tout le monde parle depuis 2 ans est en réalité des humains à Madagascar qui créent des images de « Starter pack » ou des photos en style Ghibli à la main.
Bref, nous n’avons pas réellement eu l’impression de regarder une enquête sur le sujet que nous couvrons activement sur Numerama (le débat en fin d’émission abordait plus ces sujets, alors qu’ils étaient absents de l’enquête). Cash Investigation a mis en avant plusieurs problématiques importantes sur la numérisation de la société, notamment au niveau des emplois, mais n’a jamais discuté de la révolution de l’intelligence artificielle. Un choix qui va contribuer à renforcer les incompréhensions sur ce qu’est vraiment l’IA, alors que l’Europe peine déjà à accélérer sur ces sujets.




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