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| - | ====== Le Monde – Le Tchad tourne le dos à la France et se cherche de nouveaux partenaires ====== https:// | ||
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| - | <hidden Article Complet (utilisateurs connectés)> | ||
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| - | Au foyer des anciens combattants tchadiens, à N’Djamena, | ||
| - | VERONIQUE DE VIGUERIE/ | ||
| - | Le Tchad tourne le dos à la France et se cherche de nouveaux partenaires | ||
| - | Par Benjamin Roger (N’Djamena, | ||
| - | Par Benjamin Roger (N’Djamena, | ||
| - | Par Benjamin Roger (N’Djamena, | ||
| - | Article réservé aux abonnés | ||
| - | Décryptage N’Djamena, | ||
| - | Les sièges des invités ont été alignés, les réglages de la sono ajustés. Sur la grande tente dressée pour l’occasion sont retouchés de derniers morceaux d’étoffes bleu, jaune et rouge : les couleurs du drapeau tchadien. Dans la tribune présidentielle, | ||
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| - | Vendredi 31 janvier, en début de matinée, l’heure est aux ultimes préparatifs sur le tarmac de la base aérienne Adji-Kosseï, | ||
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| - | Sur les coups de 10 heures du matin déboule une cohorte de pick-up, sur lesquels sont juchés des militaires, suivis par de rutilants 4 × 4 blindés. L’un d’eux s’arrête au bout du tapis rouge. Le chef de l’Etat, boubou et calot blanc sur la tête, en descend et passe lentement les troupes en revue au son de la fanfare. Son père, Idriss Déby Itno – auquel il a succédé lorsque celui-ci est mort, le 20 avril 2021 –, était l’un des plus solides alliés de Paris sur le continent africain. Lui est celui qui, après plus d’un siècle de présence de soldats français dans son pays, leur a fait replier leur paquetage. | ||
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| - | A la tribune, Mahamat Idriss Déby évoque un « jour exceptionnel dans la marche » du Tchad, désormais « entièrement souverain et résolu à assumer son destin ». L’assemblée, | ||
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| - | De gauche à droite, l’ancien ministre des affaires étrangères Abderaman Koulamallah, | ||
| - | De gauche à droite, l’ancien ministre des affaires étrangères Abderaman Koulamallah, | ||
| - | Du haut de ses 40 ans, Mahamat Idriss Déby se pose en héraut du souverainisme africain. Pas aussi radical que les militaires putschistes sahéliens au pouvoir au Burkina Faso, au Mali et au Niger, mais suffisamment tranchant pour apparaître, | ||
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| - | Après s’être offert un bain de foule, il s’attarde un instant, puis repart en majesté, reprenant la gestuelle paternelle avec sa canne de maréchal brandie en l’air. « Il était aux anges. Il aurait voulu que ce moment se prolonge », déclare un de ses proches. | ||
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| - | Un nouveau revers | ||
| - | La veille, une première cérémonie, | ||
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| - | Pour Paris, c’est un nouveau revers. Après avoir été contrainte de quitter le Mali en 2022, puis le Burkina Faso et le Niger en 2023, l’armée française est renvoyée de sa base permanente au Tchad. De même a-t-elle dû, depuis, quitter la Côte d’Ivoire – le 20 février – et s’apprête à faire de même au Sénégal d’ici à la fin septembre. Le coup est d’autant plus rude que le Tchad, éminemment stratégique de par sa situation géographique au cœur du continent, était considéré par les militaires français comme l’une de leurs places fortes en Afrique depuis que les troupes coloniales ont fondé Fort-Lamy, l’ancienne N’Djamena, | ||
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| - | « Une relation spéciale nous unit », reconnaissait un officier français au moment de quitter le Tchad, rappelant que, de l’épopée saharienne de la colonne Leclerc durant la seconde guerre mondiale à l’opération « Serval », au Mali, en 2013, les soldats des deux pays avaient régulièrement combattu côte à côte. | ||
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| - | Au fil des décennies, Paris a aussi défendu les différents pouvoirs qui se sont succédé à la tête du Tchad, quitte à engager plusieurs opérations extérieures (« Tacaud », entre 1978 et 1980, « Manta », entre 1983 et 1984, « Epervier », entre 1986 et 2014…) pour les protéger contre des rébellions venues de la Libye ou du Soudan voisins. | ||
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| - | Militaires tchadiens et français ont beau rappeler d’une même voix que le départ des seconds s’est fait « en bon ordre et en bonne coordination », il n’en demeure pas moins qu’il a été précipité par une décision unilatérale de Mahamat Idriss Déby, qui a surpris autant en France qu’au Tchad. Le 28 novembre 2024, le jet de Jean-Noël Barrot, le ministre de l’Europe et des affaires étrangères français, vient à peine de redécoller de N’Djamena que les autorités tchadiennes publient un communiqué annonçant une rupture de leurs accords de défense avec Paris. | ||
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| - | De l’Elysée au ministère des armées, en passant par le Quai d’Orsay, la surprise est totale, et la manière jugée peu élégante. Durant leur entretien au palais présidentiel, | ||
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| - | La visite impromptue de Jean-Noël Barrot ne change rien. Mahamat Idriss Déby maintient son plan initial : l’annonce de la rupture des accords de défense en cette journée symbolique du 28 novembre. Selon un de ses proches collaborateurs, | ||
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| - | Depuis la divulgation par Mediapart, début juillet 2024, de l’ouverture d’une enquête par le Parquet national financier (PNF) sur de possibles « biens mal acquis » par le président tchadien et sa famille, portant sur l’achat de plus de 900 000 euros de costumes de luxe et un patrimoine immobilier français d’environ 30 millions d’euros, quelque chose s’est cassé dans la relation entre Paris et N’Djamena. Le 15 août, Mahamat Idriss Déby avait snobé les commémorations du 80e anniversaire du débarquement de Provence, durant lequel 120 000 soldats issus des colonies africaines, dont de nombreux Tchadiens, se sont battus pour libérer la France. | ||
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| - | « La présence française ne nous était plus bénéfique » | ||
| - | Déjà écornée par l’enquête du PNF, la relation bilatérale se grippe définitivement le 27 octobre. Ce jour-là, des djihadistes de Boko Haram attaquent la base militaire de Barkaram, une île garnison du lac Tchad, aux frontières du Cameroun, du Nigeria et du Niger. Au moins une quarantaine de soldats tchadiens sont tués. Le président Déby prend alors personnellement la tête de la contre-offensive, | ||
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| - | Par crainte d’envenimer les relations déjà exécrables avec Niamey, l’état-major français refuse aussi une demande tchadienne de frappes aériennes en territoire nigérien, à quelques kilomètres de la frontière. Mahamat Idriss Déby en tire une conclusion : il ne peut plus compter sur la France en cas de difficultés. Le divorce est acté. | ||
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| - | « La présence de l’armée française sur notre territoire ne nous était plus bénéfique. Son départ constitue, en revanche, un gain politique important et renforce notre souveraineté. En la faisant partir, le président montre qu’il est dans l’air du temps et répond aux aspirations de notre jeunesse », explique Abderaman Koulamallah, | ||
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| - | Pour les militaires et diplomates français, le choc est violent. Depuis la nomination, en février 2024, de Jean-Marie Bockel comme « envoyé personnel » d’Emmanuel Macron pour « refonder » les relations entre la France et les pays africains où elle dispose de bases permanentes – le Tchad donc, mais aussi le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Gabon et Djibouti –, le message qu’ils distillaient était simple : « Nous nous plierons aux souhaits de nos partenaires africains. » Entre N’Djamena et Paris, des discussions avaient été engagées sur l’avenir du dispositif militaire français. Selon des sources officielles françaises au cœur des tractations, | ||
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| - | Au sein de l’état-major tchadien, ce choix du chef de l’Etat ne fait pas l’unanimité, | ||
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| - | Le 6 janvier, lors de la conférence des ambassadeurs, | ||
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| - | Dans les cercles dirigeants de N’Djamena, | ||
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| - | Une coopération trop militaire et pas assez économique | ||
| - | Dans un tel climat, difficile de prédire comment va évoluer la relation franco-tchadienne. Bien que les soldats français aient quitté leur base Adji-Kosseï, | ||
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| - | Dans son discours du 31 janvier, Mahamat Idriss Déby a tenu à le rappeler : le Tchad a demandé le départ des troupes françaises installées sur son sol, mais il n’entend pas rompre ses relations avec la France pour autant, à condition d’un « dialogue franc », dans le « respect mutuel » de la souveraineté de chacun. De fait, le cas tchadien n’est pas comparable à ceux du Mali, du Burkina Faso ou du Niger, avec lesquels la séparation a été bien plus violente entre 2021 et 2023. « Les Français doivent tout de même faire attention, prévient le gradé tchadien précité. Soit ils sont intelligents et on s’entend pour établir une relation équilibrée, | ||
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| - | Dans l’entourage du président Déby, reproche est souvent fait d’une coopération française trop militaire et pas assez économique. Ceux qui la coordonnent le démentent et déplorent un problème de perception : selon eux, les projets de développement menés par Paris, dans le domaine de l’éducation ou de la formation, par exemple, sont bien moins visibles des Tchadiens que les routes et les différentes infrastructures bâties par les Chinois, tel l’emblématique palais du 15-Janvier ou l’Assemblée nationale, à N’Djamena. | ||
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| - | Depuis 2023, TotalEnergies et la Société générale ont, par ailleurs, fermé leurs filiales locales, renforçant l’idée d’un abandon des capitaux français. « Certes, les Français ont fait des écoles. Mais ils pourraient faire bien plus dans d’autres domaines, comme l’agriculture, | ||
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| - | Pékin se pose en allié prometteur | ||
| - | Présente au Tchad depuis plus de trente ans, la Chine est aujourd’hui son premier fournisseur et son deuxième client, en achetant principalement du pétrole. Face à une France en perte de vitesse, Pékin se pose en allié prometteur et respectueux de la souveraineté du Tchad. | ||
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| - | Lors de sa dernière tournée africaine, début janvier, le ministre des affaires étrangères chinois, Wang Yi, s’est rendu à N’Djamena, | ||
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| - | Abderaman Koulamallah (à droite), alors ministre des affaires étrangères du Tchad, rencontre le ministre des affaires étrangères chinois, Wang Yi, à N’Djamena, | ||
| - | Abderaman Koulamallah (à droite), alors ministre des affaires étrangères du Tchad, rencontre le ministre des affaires étrangères chinois, Wang Yi, à N’Djamena, | ||
| - | Autre soutien de taille pour le pouvoir de Mahamat Idriss Déby : les Emirats arabes unis, qui lui ont apporté une précieuse aide financière depuis qu’il a pris la relève de son père. En juin 2023, il était reparti d’un premier voyage à Abou Dhabi, où il s’était entretenu avec le cheikh Mohammed Ben Zayed Al Nahyane, avec un prêt de 1,5 milliard de dollars (1,4 milliard d’euros) et la livraison de véhicules militaires. En octobre 2024, second voyage, même destination et mêmes acteurs. Cette fois, le président tchadien revient avec un nouveau prêt de 500 millions de dollars. « L’argent émirati a été la première source de financement – et de loin – du régime de Mahamat Idriss Déby, à un moment où celui-ci en avait besoin pour asseoir son autorité et sa crédibilité, | ||
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| - | Cette aide financière émiratie a-t-elle été conditionnée à un appui tchadien aux FSR du général « Hemetti » au Soudan, dont Abou Dhabi est le principal partenaire ? Malgré les démentis formels des sources officielles tchadiennes, | ||
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| - | Selon des sources concordantes, | ||
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| - | A N’Djamena, | ||
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| - | Hongrie, Turquie et Russie | ||
| - | Pour se prémunir contre de potentielles menaces sécuritaires, | ||
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| - | Depuis la mi-2023, le Tchad a acquis plusieurs drones armés, ainsi que des blindés, auprès d’Ankara. Selon une source gouvernementale, | ||
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| - | En dépit de cet activisme turc, ce sont plutôt les ambitions présumées de la Russie au Tchad qui focalisent l’attention française. Depuis 2018, Moscou n’a cessé, à travers le groupe paramilitaire Wagner, d’étendre son influence dans l’ancien pré carré africain de la France, à mesure que celle-ci en était congédiée. Certains redoutent donc une énième répétition de ce scénario à N’Djamena. | ||
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| - | Ces derniers mois, les Russes sont en pleine reconfiguration de leur dispositif militaire en Afrique. Contraints de se réorganiser depuis la chute, le 8 décembre 2024, de leur allié Bachar Al-Assad en Syrie, pays qui leur servait de hub logistique pour se projeter sur le continent, ils entendent aussi acter le remplacement de Wagner par l’Africa Corps, le dispositif paramilitaire mis sur pied par le ministère de la défense russe pour piloter ses activités en Afrique. | ||
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| - | Déjà bien introduits en Libye (où ils développent de nouvelles bases dans les territoires contrôlés par leur allié, le maréchal Khalifa Haftar), au Soudan (où ils espèrent construire une base navale à Port-Soudan, | ||
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| - | Dans cet environnement prorusse, Mahamat Idriss Déby s’est à son tour rapproché de Moscou. En janvier 2024, il a rencontré Vladimir Poutine au Kremlin, avant de recevoir, en juin, à N’Djamena, | ||
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| - | Le président russe, Vladimir Poutine, rencontre le président du Tchad, Mahamat Idriss Déby, au Kremlin, à Moscou, le 24 janvier 2024. | ||
| - | Le président russe, Vladimir Poutine, rencontre le président du Tchad, Mahamat Idriss Déby, au Kremlin, à Moscou, le 24 janvier 2024. MIKHAIL METZEL / AFP | ||
| - | En plein retrait français, une délégation de généraux tchadiens s’est rendue, à la mi-décembre 2024, à Moscou. Comme en Centrafrique, | ||
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| - | Quant aux officiers tchadiens, ils rappellent à l’unisson que leur pays n’est pas la Centrafrique ou le Mali, et que des renforts russes ne leur sont pas nécessaires. « Nous avons une armée forte et structurée, | ||
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| - | Retrouvez l’intégralité de nos dossiers géopolitiques ici. | ||
| - | Benjamin Roger (N’Djamena, | ||
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