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| ====== Le Monde – Ces jeunes qui assument de ne pas avoir d’ambition professionnelle : « Je suis devenue allergique au mot “challenge” » ====== https://www.lemonde.fr/campus/article/2025/02/18/ces-jeunes-qui-assument-de-ne-pas-avoir-d-ambition-professionnelle-je-suis-devenue-allergique-au-mot-challenge_6551727_4401467.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default | |
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| PALM ILLUSTRATIONS | |
| Ces jeunes qui assument de ne pas avoir d’ambition professionnelle : « Je suis devenue allergique au mot “challenge” » | |
| Par Alice Raybaud | |
| Par Alice Raybaud | |
| Par Alice Raybaud | |
| Aujourd’hui à 04h00, modifié à 18h00 | |
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| ENQUÊTE Une partie de la jeunesse diplômée revendique de s’émanciper de la course à la réussite professionnelle. Cette absence d’ambition détonne souvent dans des univers où la norme est de se dépasser. | |
| Lecture 6 min | |
| Quand Pauline s’est vu proposer de monter en grade, dans le théâtre toulousain où elle travaille comme chargée de communication, elle n’a pas hésité longtemps avant de décliner. Ce n’était pas tant qu’elle ne se plaisait pas dans cette structure. Ni même qu’elle ne se sentait pas capable d’assumer un emploi avec plus d’envergure et de responsabilités. Aucun syndrome de l’imposteur à l’horizon. La jeune femme de 31 ans (qui n’a pas souhaité donner son nom de famille) n’aspirait simplement pas à plus que ce que lui offrait son poste actuel. Désormais, faire carrière ne fait plus partie de ses plans de vie. | |
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| Petite, pourtant, la Picarde était une « bête à concours », championne des tournois d’orthographe à l’école, prodige des compétitions de saut en hauteur à l’extérieur. « Avec le recul, je me demande si j’y prenais un quelconque plaisir. Je ne pense pas », se rend-elle compte. Après le collège, elle doit quitter sa région pour trouver le meilleur lycée possible, puis la bonne classe prépa, dans le 16e arrondissement de Paris. En excellente passe pour réussir le concours de l’Ecole normale supérieure, elle est encouragée par ses professeurs de prépa à faire une troisième année. Mais, soudain, elle écoute sa voix intérieure et refuse. | |
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| « On m’a reproché de ne pas avoir d’ambition : c’était vrai », assume aujourd’hui Pauline, qui désire, avant tout, « construire une relation sereine au travail », et ne pas le ramener à la maison. Quand cette diplômée d’un master d’études théâtrales envisage désormais de rétrograder à un poste d’accueil à la billetterie, afin de se dégager du temps en journée, ses collègues la regardent avec des yeux ronds. Ce temps libéré représente pourtant un espace précieux à ses yeux : Pauline prend plaisir à écrire de la fiction « pour [elle]-même » et s’implique dans une association de quartier. | |
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| Refus d’ascension | |
| Ne plus se plier à l’injonction de sans cesse se « challenger », arrêter de courir après les promotions et revendiquer une absence d’ambition : ces désirs surgissent chez une jeune génération qui questionne de plus en plus la place accordée au travail dans leur vie. Selon une étude menée par le cabinet de recrutement Robert Walters au Royaume-Uni en septembre 2024, plus de la moitié (52 %) des jeunes actifs de moins de 30 ans déclarent ne pas aspirer à exercer un rôle de manageur. A leurs yeux, les postes de chef seraient trop stressants, et « peu gratifiants ». | |
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| Baptisé « unbossing » (« déhiérarchisation »), ce phénomène incarne le rejet d’un modèle professionnel dont l’objectif premier consistait à gravir les échelons de la hiérarchie de l’entreprise. Une manière aussi, pour certains, de « refuser de parvenir », comme le théorise l’essayiste Corinne Morel Darleux, dans Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce (Libertalia, 2019), dont le récit s’ouvre sur le parcours du navigateur Bernard Moitessier (1925-1994), qui, en 1968, décide de ne pas gagner la course en mer pour laquelle il est bien placé. | |
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| Lire aussi | |
| Des étudiants des Mines, de Sciences Po Paris ou de HEC questionnent la place des banques « polluantes » et « climaticides » dans leurs écoles | |
| Chez les jeunes d’aujourd’hui, le refus d’ascension prend parfois des figures tout aussi spectaculaires, avec des désertions médiatiques comme celle de Jérémy Désir-Weber, en 2019. Ce tradeur démissionna avec fracas de la banque HSBC, actrice à ses yeux du « désastre écologique ». Sa prise de position publique précédait tout juste le mouvement d’étudiants de grandes écoles qui, sous l’impulsion d’une prise de conscience écolo, ont refusé publiquement de mettre leur énergie au service des carrières dorées auxquelles ils étaient promis. | |
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| Toutefois, à bien d’autres moments, ces rejets d’ambition prennent une forme moins bruyante, par la volonté de faire son travail correctement mais sans zèle. Loin de se désintéresser de leur emploi, les jeunes interrogés pour notre enquête assument de prendre des postes subalternes, de ne pas vouloir « se tuer » à la tâche pour correspondre aux canons de réussite, et préférer se réaliser ailleurs. Après tout, « quel est le problème avec le fait de vivre bien tranquillou ? », interroge la trentenaire Marie Misset, journaliste, dans un épisode du podcast de Louie Media « Emotions », intitulé « Faut-il vraiment sortir de sa zone de confort ? ». | |
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| Lire notre décryptage (2023) : | |
| Face à l’urgence écologique, comment le discours des étudiants « bifurqueurs » d’AgroParisTech a essaimé | |
| Dans l’entourage de Yacine, 24 ans, diplômé d’une école d’architecture, cette remarque revient souvent : « C’est dommage d’avoir fait six ans d’études pour “ça” ! » Son diplôme obtenu, le Francilien ne se voyait pas enchaîner les années de « sacrifice » et de « charrettes » – ces nuits de travail rituelles – pour espérer être « récompensé par un poste dans une belle agence ». Pas attiré par le monde des « starchitectes », l’autoentrepreneur anime des ateliers de sensibilisation pour enfants, conscient de paraître « décalé ». « L’injonction à poursuivre “toujours plus” vise surtout à faire de nous une bonne pièce dans la machine », estime Yacine, qui veut se donner « le droit d’être défaillant ». | |
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| Déclic environnemental | |
| Une aspiration dans laquelle Mélanie, 30 ans, se reconnaît aussi aujourd’hui, après avoir fait le grand écart. A la sortie d’une école de commerce, elle entre à la régie publicitaire de TF1 et met toute son énergie dans son ascension professionnelle. « J’accordais une grande importance à l’accomplissement social que j’en retirais », se souvient-elle. Depuis qu’elle est enfant, son père, patron d’une entreprise familiale qui a « trimé toute sa vie », nourrit pour elle « de grandes ambitions ». A TF1, puis à M6, « j’étais fière de travailler dans une institution que tout le monde connaît », raconte-t-elle. | |
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| Lire aussi : | |
| Le rapport au travail des jeunes actifs affecté par l’horizon incertain de la retraite | |
| Mélanie mène en parallèle une vie mondaine, souvent invitée dans des soirées sur des « rooftops parisiens branchés », où elle siffle du champagne en compagnie de stars du petit écran. En 2018, elle vit un déclic environnemental « assez brutal ». « Cela devenait une évidence : je ne pouvais plus passer mes journées à vendre des espaces publicitaires pour des marques de parfum ou de baskets ! » Elle quitte M6 six mois plus tard. | |
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| Le Monde Jeux | |
| Chaque jour de nouvelles grilles de mots croisés, Sudoku et mots trouvés. | |
| Jouer | |
| Depuis, elle n’a cessé de lever le pied. Salariée, dans le sud de la France, pour un éditeur de logiciels spécialisé dans l’environnement, elle a demandé à passer à 80 % et voudrait réduire encore son temps de travail. Chargée d’une petite équipe, elle a exprimé son refus de manager davantage de personnes ou de prendre des projets plus importants, renonçant à de possibles évolutions de carrière. Comme les autres jeunes interrogés, elle a déplacé « la question de la reconnaissance sociale ». « Le fait d’être reconnue passe maintenant par autre chose : mes liens avec mes proches, ou la fierté que je retrouve à donner du temps à des associations ou à lire des essais qui me nourrissent. » | |
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| PALM ILLUSTRATIONS | |
| Docteure en histoire de 29 ans, Perrine, elle, a appris à se féliciter quand elle parvient à « être paresseuse ». Rompre avec la course à la réussite a été une manière de sauver sa peau. Alors que les signes d’épuisement professionnel surviennent de plus en plus tôt chez les jeunes, la Grenobloise fait partie de ceux qui ont été essorés par leurs premières années de vie active. Après un burn-out au sein d’un univers de la recherche précaire et compétitif, elle a laissé derrière elle ses ambitions de carrière académique, et s’autorise une « grève de la performance ». | |
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| « Je suis devenue allergique au mot “challenge” », s’exclame celle qui s’inscrit dans une génération convaincue que s’épuiser à la tâche ne donnera pas forcément lieu à une assurance de stabilité. Chez les jeunes, la sensation d’un « pacte rompu », comme le qualifie la sociologue de l’emploi Anne-Marie Guillemard, modifie la perception de leur avenir professionnel. « Je m’étais dit que plus je taffais, plus je me construisais un capital pour le futur. Mais j’avais beau avoir le plus haut niveau d’études et de belles publications, cela ne m’apportait ni sécurité ni bonheur », explique Perrine. | |
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| Du temps pour s’épanouir | |
| Ne pas cultiver de grandes ambitions permet de retrouver du temps pour s’épanouir ailleurs. « Je ne me reconnais pas dans la trajectoire du cadre qui, pour grimper les échelons, se défonce toute la semaine au travail, puis crame son empreinte carbone le temps d’un week-end pour vite décompresser », raconte Lina (le prénom a été modifié), 28 ans, qui est analyste dans la finance durable et assume de ne pas faire « plus que ce qui est attendu [d’elle] ». Elle aspire à repenser sa manière de voyager pour arrêter l’avion : « Il faut alors s’organiser et cela demande du temps, un temps que j’ai envie de me dégager sans culpabiliser parce que cela m’empêcherait d’être repérée dans ma boîte. » | |
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| Après des études de droit et des expériences dans des cabinets prestigieux, Elise a tout lâché, avec la même envie de ralentir. A 34 ans, l’ancienne Parisienne vit aujourd’hui à Montréal, où elle est chargée de projet dans l’économie circulaire. Et hors de question de « monter en responsabilités » et d’empiéter sur son temps libre. La jeune mère d’un enfant touche dès lors moins que ce à quoi elle pourrait prétendre. « On part peu en week-end. On a renoncé à devenir propriétaires. Mais cela nous va très bien », affirme-t-elle. | |
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| Elise ajoute se savoir « privilégiée » d’avoir pu faire ces choix, aidée temporairement par ses parents quand elle a quitté le droit. Si elle aspire aussi à s’extraire de la course à la réussite, Pauline, ingénieure de 27 ans issue d’un milieu modeste, en sait quelque chose : « Pour beaucoup d’entre nous, rechercher des promotions, c’est une question de survie financière. Surtout dans nos générations où l’accès au logement est si coûteux », souligne-t-elle. | |
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| Elise se demande aussi combien de temps cela durera. « Est-ce que je vais pouvoir rester chargée de projet passé 40 ans ? » Elle redoute déjà son retour prochain en France et le moment où elle devra se relancer sur le marché du travail… tout en continuant à réclamer « moins ». | |
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| Alice Raybaud | |
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| Le 16 février 2025 à 07h00 | |
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