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-====== Le Monde – Anne-Sophie Moreau, philosophe : « La fascination pour le moisi marque la fin de la société d’abondance » ====== https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2025/02/15/anne-sophie-moreau-philosophe-la-fascination-pour-le-moisi-marque-la-fin-de-la-societe-d-abondance_6547428_4497916.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default 
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-L'époque 
-Anne-Sophie Moreau, philosophe : « La fascination pour le moisi marque la fin de la société d’abondance » 
-Alors que la vie microbienne a toujours suscité un puissant rejet, au nom d’une société capitaliste aseptisée, la crise écologique et la peur collective du déclin pourraient nous réconcilier avec les processus de dégénérescence et de fermentation, explique la philosophe. 
-Propos recueillis par Victoire Radenne 
-Propos recueillis par Victoire Radenne 
-Propos recueillis par Victoire Radenne 
-Article réservé aux abonnés 
-La philosophe Anne-Sophie Moreau, à Paris, en 2024. 
-La philosophe Anne-Sophie Moreau, à Paris, en 2024. EMMANUELLE MARCHADOUR 
-Dans son ouvrage Fermentations. Kéfir, compost et bactéries : pourquoi le moisi nous fascine, la philosophe et journaliste Anne-Sophie Moreau livre une enquête sur la passion contemporaine pour les bactéries, les levures et autres fermentations, ce procédé ancestral de conservation des aliments, qui génère de nouvelles propriétés nutritionnelles. 
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-Au-delà de la lubie bobo pour le kombucha, elle explore comment des domaines tels que l’alimentation, la cosmétique, la médecine ou le design valorisent aujourd’hui les vertus du « pourri ». De la volonté d’entrer en symbiose avec le vivant et de remodeler notre rapport à la nature jusqu’aux implications politiques de cette « éthique du fermenté », elle tente de répondre à cette vaste question, peu étudiée jusqu’alors : pourquoi le moisi, qui a toujours fait l’objet d’un puissant rejet, nous fascine désormais ? 
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-Votre intérêt pour le sujet de la fermentation a commencé au lendemain d’une nuit d’excès à Berlin. Racontez-nous… 
-Alors que je cherchais quelque chose pour apaiser mes intestins malmenés, mon choix s’est porté sur une bouteille de kombucha, qui était vendue comme « une boisson vivante », appellation qui m’a intriguée. Au même moment, je discutais par message avec un ami qui travaille pour la Mairie de Paris, qui m’expliquait que la ville allait généraliser la pratique du compost à tous les foyers de la ville. Je me suis alors demandé : pourquoi essayons-nous de revivifier à la fois nos entrailles et celles d’une ville aussi minérale que Paris ? En poussant mes recherches, j’ai découvert une véritable société de la fermentation. 
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-Ce nouvel intérêt se diffuse dans de nombreux milieux… 
-Au-delà de la fascination pour les processus de fermentation, qui va du bobo parisien, qui soigne son microbiote intestinal avec des graines de kéfir, aux néo-ruraux décroissants, qui fabriquent du pain au levain dans un objectif d’autonomie alimentaire, l’engouement pour les micro-organismes – bactéries, levures, champignons – inonde des domaines très variés. 
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-Dans la tech, on tente de fabriquer de la viande cultivée à partir de bactéries ou de concevoir des meubles biosourcés à base de mycélium, la partie souterraine des champignons. Même nos pratiques funéraires évoluent : certains envisagent l’autocompostage après la mort, pour se rendre à la Terre, dans une perspective d’humilité. Enfin, en médecine, la recherche explore les liens entre le microbiote et des pathologies comme la dépression ou certains cancers. Il y a aussi une dimension politique, notamment chez certaines féministes, qui voient dans la fermentation un acte de résistance. En 2022, le gouvernement français a même lancé Ferments du futur [dans le cadre du plan d’investissement France 2030], un programme de recherche et d’innovation ayant pour objectif d’avoir plus de souveraineté alimentaire, financé à hauteur de 48,3 millions d’euros. 
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-Tout au long de votre livre, vous développez la thèse selon laquelle « le goût renouvelé pour le fermenté relève d’une quête de régénération à la fois intérieure et sociétale ». Que voulez-vous dire ? 
-Au fil de mes recherches, je me suis demandé pourquoi des pays développés comme le Canada, la France, le Japon et la Suisse, qui accueille chaque année un Festival des fermentations s’intéressent-ils de manière active et consciente aux processus de fermentation, alors même qu’a priori nous n’avons plus besoin de les maîtriser pour conserver nos aliments, les congélateurs ayant démontré leur efficacité depuis longtemps ? 
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-Je crois qu’une partie de la réponse se trouve dans le fait que nous sommes des sociétés vieillissantes qui avons peur de notre propre déclin, qu’il soit réel ou symbolique. Je pense notamment à la peur de se faire remplacer par des intelligences artificielles. Peut-être que cet intérêt pour la fermentation traduit une tentative de maîtriser la dégénérescence face à l’angoisse de la mort, et une manière de redonner de la valeur à ce qui pourrit. 
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-La fascination vis-à-vis des procédés de fermentation se situe surtout en Occident, et elle est plutôt connotée socialement. Que cela raconte-t-il ? 
-On s’intéresse surtout aux procédés de fermentation dans des sociétés d’abondance, dans lesquelles, a priori, on ne meurt plus de faim ou, en tout cas, plus vraiment. J’ai le sentiment de faire partie des dernières générations à avoir grandi avec l’idée qu’il y aurait toujours de quoi manger dans les supermarchés et des jouets en plastique à Noël. 
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-Pendant longtemps, on se disait que nous allions être pourvus de biens et de denrées à l’infini, par la force d’un système de distribution agroalimentaire bien huilé. Fermenter des légumes dans des bocaux reflète un changement d’état d’esprit, une crainte des pénuries dans un monde qui est considéré comme de plus en plus hostile, menacé à la fois par la crise climatique et par la perspective de la guerre. La fascination pour le moisi marque la conscience de la fin de la société d’abondance. 
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-Vous soulignez d’ailleurs que la fermentation régénère la pensée écologiste et renouvelle notre rapport au vivant. Pouvez-vous développer ? 
-L’idéal de la société capitaliste a toujours été de s’élever au-dessus de la nature, en construisant des tours de béton et d’acier, en cherchant à la dominer et à l’exploiter, comme l’exprimait Descartes avec l’idée de devenir « maîtres et possesseurs de la nature ». Avec le retour de la fermentation, de Zurich à San Diego, un nouveau rapport semble émerger : plutôt que de dominer la nature, on la conserve, on l’observe. Jusqu’à prendre du plaisir à contempler un processus organique dans un bocal, dans une posture passive. 
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-Cette fascination est en rupture avec des siècles d’hygiénisme, où toute forme de moisi faisait l’objet d’un puissant rejet. 
-Quand j’étais adolescente, la publicité nous invitait à nous décaper la peau avec des produits qui contenaient de l’alcool ou des produits abrasifs. Cette obsession hygiéniste date de la révolution pasteurienne, un moment où l’on a découvert que si les médecins se lavaient les mains avant de faire accoucher les femmes, cela permettait de réduire considérablement les morts en couche. 
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-Aujourd’hui, on réintroduit des probiotiques dans notre alimentation – le Noma, un restaurant danois pionnier en matière de fermentation, a été élu meilleur restaurant de la planète plusieurs années de suite – mais aussi dans les cosmétiques, où des crèmes contenant des « bonnes bactéries » sont vendues très cher. Finalement, on est passé d’une injonction à se récurer la peau à une invitation à la faire macérer comme un bon vieux roquefort. 
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-La fascination envers les micro-organismes n’est pas uniquement le fait d’utopies décroissantes. La NASA [l’agence fédérale spatiale américaine] étudie, par exemple, la myco-architecture pour construire des bâtiments sur Mars. Qu’en pensez-vous ? 
-Il y a un chapitre du livre dans lequel je m’interroge sur les différentes utopies fermentatives. Il y a deux grandes visions qui se confrontent, ce qui est assez raccord avec l’atmosphère politique actuelle. Dans les milieux décroissants et « fermenteurs », il y a une véritable défense de l’échange non marchand. Un ferment ou une graine de kéfir s’échange, ne se vend pas. 
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-De l’autre côté, on a le film américain Seul sur Mars [Ridley Scott, 2015], où l’acteur Matt Damon essaie de fertiliser un champ de patates sur la Planète rouge avec ses excréments. C’est aussi une utopie très fermentative, mais consistant plutôt à détacher l’humanité de la Terre et à recréer des bulles de vie ailleurs. 
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-La question est de savoir : quelle utopie fermentative va l’emporter ? Les obsessions spatiales d’Elon Musk, de la NASA et du cinéma hollywoodien, ou une culture de la dégénérescence, diamétralement opposée à la notion de croissance ? 
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-Victoire Radenne 
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