| Les deux révisions précédentes
Révision précédente
|
|
elsenews:spot-2025:02:mayotte-aide-alim [26/12/2025/H03:58:03] 216.73.216.167 supprimée |
— (Version actuelle) |
| {{tag>a1}} | |
| |
| |
| ---- | |
| ====== Le Monde – A Mayotte, les détournements de l’aide alimentaire exaspèrent la population et mobilisent les autorités ====== https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/02/14/a-mayotte-les-detournements-de-l-aide-alimentaire-exasperent-la-population-et-mobilisent-les-autorites_6545997_823448.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default | |
| |
| <hidden Article Complet (utilisateurs connectés)> | |
| <ifauth @user> | |
| |
| https://www.lemonde.fr/politique/article/2025/02/14/a-mayotte-les-detournements-de-l-aide-alimentaire-exasperent-la-population-et-mobilisent-les-autorites_6545997_823448.html | |
| |
| |
| MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » | |
| A Mayotte, les détournements de l’aide alimentaire exaspèrent la population et mobilisent les autorités | |
| Par Jérôme Talpin (Mamoudzou, envoyé spécial) | |
| Par Jérôme Talpin (Mamoudzou, envoyé spécial) | |
| Par Jérôme Talpin (Mamoudzou, envoyé spécial) | |
| Aujourd’hui à 05h30, modifié à 07h26 | |
| Article réservé aux abonnés | |
| Offrir | |
| ENQUÊTE Deux mois après le passage du cyclone Chido qui a dévasté l’archipel de l’océan Indien, les populations les plus démunies mais aussi les responsables d’associations se demandent avec insistance où vont les tonnes d’eau et de nourriture acheminées par l’Etat et confiées aux communes. Le ministre des outre-mer, Manuel Valls, tout comme le préfet de Mayotte admettent « s’interroger » sur le problème. | |
| Lecture 6 min | |
| AMayotte, la question revient sans cesse. Dans de nombreuses bouches. « Où est passée l’aide alimentaire ? » Où trouver cette aide acheminée par l’Etat grâce au pont aérien entre l’Hexagone, La Réunion et l’archipel ravagé par le cyclone Chido, le 14 décembre 2024 ? Où est l’eau qui doit être distribuée vers les habitants les plus précaires alors que les risques de maladies hydriques demeurent élevés ? Habitants des bidonvilles, enseignants au contact des familles les plus pauvres, responsables associatifs : tous s’interrogent avec insistance sur la destination finale de ces chargements, qui circulent le plus souvent en lourd camion militaire. | |
| |
| Selon le préfet de Mayotte, François-Xavier Bieuville, près de 300 tonnes de denrées (riz, conserves, huile, farine, lait en poudre…) ont été débarquées, en sept semaines, des avions et bateaux affrétés spécialement. Et plus de 100 000 litres d’eau sont acheminés chaque jour par l’Etat, confiés aux communes pour que « la distribution ait lieu dans les endroits où la fragilité est la plus grande ». | |
| |
| Mais, dans l’île, les récits individuels concordent, pleins de soupçons. Les témoignages, sous le sceau de l’anonymat, décrivent des discriminations à l’encontre des sinistrés étrangers sans papiers. Ils mettent aussi en cause les agents communaux accusés de « partager entre eux une partie des denrées », ou les élus privilégiant leurs réseaux par clientélisme. Le ministre des outre-mer, Manuel Valls, comme le préfet de Mayotte admettent « s’interroger » sur le problème. | |
| |
| Lire aussi | |
| « En métropole, vous êtes au courant de ce qu’on vit vraiment à Mayotte ? » | |
| Etudiante en techniques commerciales, Zouria (le prénom a été modifié, comme pour toutes les personnes citées par leur seul prénom, pour garantir leur anonymat), dont les parents sont en situation irrégulière, affiche une colère contenue. Sa rentrée scolaire dans des conditions extrêmement précaires, sans nourriture ni eau, l’a autant marquée que les dégâts causés par Chido. « On nous a dit d’amener une carte d’identité pour avoir de l’aide, s’indigne la jeune femme à propos des services communaux de sa ville, Sada. C’est illégal. Heureusement, ma famille qui habite en France nous a aidés. » | |
| |
| |
| Lors d’une distribution de repas préparés par l’ONG World Central Kitchen, organisée par l’association Kawéni Nouvelle Aire, dans le village de Tsoundzou, situé sur la commune de Mamoudzou, à Mayotte, le 1ᵉʳ février 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » | |
| « Tout va pour les Mahorais » | |
| Même sentiment de révolte chez une élève de terminale, rencontrée au lycée Younoussa-Bamana, à Mamoudzou. « On ne voit rien. Ma famille n’a reçu aucune bouteille d’eau. Je suis obligée de boire l’eau de la rivière, alors que circulent plein de maladies et le choléra. » La lycéenne veut faire passer un message : l’Etat serait plus efficace en distribuant des bons d’achat d’urgence aux plus démunis. Sans papiers elle aussi, originaire d’Anjouan, une île des Comores voisines, une de ses camarades, une élève appliquée qui ambitionne de devenir professeure des écoles, en est persuadée : « Tout va pour les Mahorais, rien pour les étrangers. Tout le monde en parle ici. » | |
| |
| Lire aussi | |
| A Mayotte, les cours reprennent au lycée Younoussa-Bamana, à moitié détruit par le cyclone Chido | |
| Installé dans le bas du bidonville de Kawéni, en périphérie de Mamoudzou, Houmadi, 38 ans, originaire de l’île de Grande Comore, dit « n’avoir rien vu » sinon une distribution de bouteilles d’eau qui remonte au 19 décembre 2024 et à laquelle Le Monde avait assisté. Connu dans le quartier pour « avoir des oreilles partout », l’homme n’est guère étonné. Les habitants des bidonvilles, majoritairement en situation irrégulière, ne sont pas prioritaires, explique-t-il. Houmadi « bricole », avec des petits boulots. Pour l’eau, il se rend à la borne-fontaine, après avoir acheté une carte prépayée, et remplit des bidons de 5 litres. « On se débrouille, on vit grâce à Dieu, philosophe-t-il avec une confiance affichée. Il faut s’adapter en souffrant pour gagner de la connaissance. » | |
| |
| |
| Des stocks de nourriture dans le gymnase du quartier M’Gombani de Mamoudzou, le 31 janvier 2025. MORGAN FACHE/DIVERGENCE POUR « LE MONDE » | |
| Mais Houmadi témoigne de la colère de ses voisins. « Des maraudes d’équipes médicales sont venues distribuer des pansements et des médicaments [contre les maladies hydriques], mais des gens leur ont dit qu’ils n’en voulaient pas. » Ils ont montré leur ventre pour signifier qu’ils avaient faim, et ont lancé : « Le gros bobo, il est là. » | |
| |
| En Petite-Terre, Fatima confie son « dégoût ». Cadre et fonctionnaire, épargnée par le cyclone, la jeune trentenaire s’était portée volontaire pour aider les équipes municipales de Pamandzi à distribuer de l’aide. « Choquée » par ce qu’elle a « vu et entendu », elle a renoncé à son engagement bénévole avant d’alerter par courrier la préfecture. Dans une file d’attente pour recevoir des aides, elle a vu « des étrangers bousculés, insultés avec des mots méchants ». | |
| |
| « Sans doute du trafic » | |
| Selon elle, les agents communaux conditionnaient la distribution à une adresse, ce qui exclut toute une catégorie de la population. « Cela ne respecte pas le principe de distribution sans discrimination », s’indigne Fatima. Toutes les palettes de bouteilles d’eau « livrées par les militaires » n’ont ainsi pas été distribuées, se souvient-elle. Quant aux personnes inscrites sur les listes de bénéficiaires, certaines « ne sont jamais contactées. Elles se font balader sous prétexte qu’il n’y a pas de réseau téléphonique ». | |
| |
| |
| Des palettes d’eau potable arrivées grâce au pont aérien mis en place dans les jours suivant le cyclone Chido, dans le quartier de de M'Gombani, Mamoudzou, le 31 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » | |
| Irrité par les critiques d’élus mahorais sur le manque de moyens envoyés dans l’île, Manuel Valls a plusieurs fois posé publiquement la question du « dernier kilomètre » des aides. Lors de sa visite à Mayotte, les 30 et 31 janvier, l’ancien premier ministre a précisé le cadre. « Sur l’urgence vitale et l’aide alimentaire, il ne peut y avoir de discrimination. C’est une question humaine », a-t-il indiqué au Monde. « Il y a une très grande tension, a-t-il ajouté. Les sujets de l’immigration irrégulière et des bidonvilles viennent en permanence. Mais personne ne doit mourir de faim ici. » Deux habitants l’avaient alors interpellé sur l’absence récurrente de packs d’eau dans les supermarchés, revendus sur des circuits parallèles. « Il y a sans doute du trafic. Certains achètent en gros et font monter les prix », a répondu le ministre. | |
| |
| Lire aussi | |
| A Mayotte, Manuel Valls revêt les habits d’un « premier ministre des outre-mer » | |
| Une enquête de la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes a été ouverte depuis. Le préfet de Mayotte reconnaît recevoir « beaucoup d’interrogations, y compris de gens pas soupçonnables de vouloir polémiquer, sur la livraison d’eau et de denrées alimentaires ». Les problèmes ont été signalés à la préfecture, confirme un fonctionnaire pour qui « il y a des choses surprenantes, voire contestables ». Un cas a fait du bruit dans les services, celui d’un maire ayant demandé que l’aide alimentaire soit acheminée à son domicile. Ce qui lui a été logiquement refusé. | |
| |
| NEWSLETTER | |
| « Politique » | |
| Chaque semaine, « Le Monde » analyse pour vous les enjeux de l’actualité politique | |
| S’inscrire | |
| Un courrier avait été adressé à tous les maires, explique le préfet, « leur rappelant leur responsabilité publique et pénale, notamment dans le cas de distribution ciblée et discriminatoire ». Fin janvier, 1 tonne de riz a été distribuée dans chaque commune, jusqu’à 3 tonnes à Mamoudzou et 2 tonnes à Koungou. « J’ai demandé aux maires un plan détaillé des distributions avec les dates et les lieux, mais je n’ai rien reçu », déplore-t-il. | |
| |
| |
| Des sacs de riz, stockés dans le gymnase du quartier M’Gombani de Mamoudzou, le 31 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » | |
| « On ne regarde pas à qui on donne » | |
| Maire de Mamoudzou, la capitale régionale avec plus de 80 000 habitants, Ambdilwahedou Soumaïla (Les Républicains, LR) défend avec conviction le travail de ses services. « Je ne veux pas m’attarder sur des critiques qui ne sont pas fondées », explique l’élu au Monde. Selon lui, à l’inverse, « ceux qui se plaignent le plus sont les Mahorais, qui disent que les aides vont avant tout aux étrangers. Chacun a son ressenti. » « [A Mamoudzou], nous nous organisons pour que tout le monde puisse être bénéficiaire, on ne regarde pas à qui on donne, assure M. Soumaïla. Les aides sont orientées en fonction des demandes, même si, évidemment, 100 % des habitants n’ont peut-être pas reçu quelque chose. » | |
| |
| Lire aussi | |
| Cyclone Chido : deux mois après, le Parlement adopte la loi d’urgence pour reconstruire Mayotte | |
| Le « vrai problème », estime Said Ibrahima Maanrifa, maire (LR) de M’Tsangamouji, reste plutôt l’insuffisance du soutien national. « L’Etat parle de tonnes de produits en donnant l’impression que c’est beaucoup, mais cela masque des carences, accuse celui qui est aussi président de la communauté des communes du Centre-Ouest de Mayotte. Une tonne d’eau cela fait environ 100 packs. Je fais comment pour contenter tout le monde dans ma commune de 8 000 habitants ? Il n’y en a pas assez. Les premiers arrivés aux distributions sont les premiers servis. » M. Maanrifa déplore que les élus locaux soient « exclus de la gestion des distributions ». Ce que conteste fermement le préfet. « Les maires ont été étroitement et quotidiennement associés, notamment par des groupes WhatsApp », défend M. Bieuville. | |
| |
| Dans les quartiers, des associations locales ou des organisations non gouvernementales comme Acted, en Petite-Terre, ou World Central Kitchen (WCK), en Grande-Terre, se sont aussi déployées dès les premiers jours qui ont suivi le cyclone Chido. Installée dans le gymnase de M’Gombani à Mamoudzou, reconverti en entrepôt, WCK confectionne plus de 14 000 repas par jour dans sa cuisine centrale. Le 31 janvier, le camp de base s’active pour réceptionner 20 conteneurs de denrées, arrivés du Kenya par bateau. Tous les jours, l’ONG américaine commande également plus de 47 000 repas à des restaurateurs locaux, confiant la distribution à des associations mahoraises. « Notre principe, c’est l’inconditionnalité dans la distribution », affirme Delphine Bedu, qui dirige l’antenne de WCK à Mayotte. | |
| |
| |
| Des membres de l’ONG World Central Kitchen préparent les repas dans le gymnase du quartier M’Gombani de Mamoudzou, le 31 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » | |
| « Heureusement qu’ils sont là, sinon la situation serait compliquée », souffle un bénévole mahorais venu livrer des dizaines de barquettes de macaronis en sauce dans le bidonville de Kwalé, au sud de Mamoudzou. Deux mois après la dévastation causée par Chido, l’urgence alimentaire demeure une réalité dans l’archipel. Alors que le ramadan doit démarrer fin février ou début mars, l’Etat a décidé de modifier son schéma de distribution. En lien avec le grand cadi de Mayotte, plus haute autorité religieuse dans un archipel à 95 % musulman, près de 200 tonnes de denrées vont être réparties dans les mosquées et les associations caritatives qui les entourent. La distribution se fera lors du « futari », la rupture du jeûne, « afin que le plus grand nombre de personnes puissent y participer dans des conditions dignes », souligne le préfet Bieuville. Une mesure qui, précise-t-il, ne constitue pas un « désaveu » de l’action des mairies. | |
| |
| Lire aussi | |
| A Mayotte, le passage du cyclone Chido a « fait reculer de quinze ans » l’agriculture et met en péril la sécurité alimentaire | |
| Jérôme Talpin (Mamoudzou, envoyé spécial) | |
| NOS LECTEURS ONT LU ENSUITE | |
| Sébastien Delogu, député LFI, condamné à 5 000 euros d’amende pour des violences lors du blocus d’un lycée à Marseille | |
| |
| Aujourd’hui à 10h59 | |
| Conversations enregistrées par Siri : Apple visée par un signalement et une plainte en France | |
| |
| Aujourd’hui à 06h00 | |
| Procès Sarkozy-Kadhafi : Eric Woerth et les enveloppes de cash | |
| |
| Aujourd’hui à 05h00 | |
| L’écrivain Kamel Daoud, Prix Goncourt 2024, assigné en justice en France par Saâda Arbane qui dénonce le vol de son histoire | |
| |
| Aujourd’hui à 10h43 | |
| En direct : l’Ukraine accuse la Russie d’avoir frappé « l’enceinte » de la centrale nucléaire de Tchernobyl avec un drone explosif | |
| |
| Aujourd’hui à 10h28 | |
| L’activisme de François Bayrou pour relancer la liaison aérienne Orly-Pau | |
| |
| Aujourd’hui à 06h00 | |
| CONTRIBUTIONS | |
| Bienvenue dans l’espace des contributions | |
| Pour améliorer la qualité des échanges sous nos articles, ainsi que votre expérience de contribution, nous vous invitons à consulter nos règles d’utilisation. | |
| Voir les contributions | |
| </ifauth> | |
| </hidden> | |
| |