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| Le Monde – Les mathématiques, ce n’est pas la même chose en classe ou au marché https://www.lemonde.fr/sciences/article/2025/02/06/les-mathematiques-ce-n-est-pas-la-meme-chose-en-classe-ou-au-marche_6534620_1650684.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default | |
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| SCIENCES | |
| Les mathématiques, ce n’est pas la même chose en classe ou au marché | |
| Une équipe internationale a montré que de jeunes vendeurs de légumes échouent à transférer en situation scolaire leur maîtrise de l’arithmétique. Et réciproquement pour les élèves des écoles placés en situation concrète. | |
| Par Nathaniel Herzberg | |
| Par Nathaniel Herzberg | |
| Par Nathaniel Herzberg | |
| Aujourd’hui à 17h00, modifié à 17h46 | |
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| Des garçons vendent des paquets de papier de soie à un homme dans une rue d’Amritsar, en Inde, le 28 juillet 2023. NARINDER NANU/AFP | |
| « A quoi ça sert, les maths ? » Des générations d’élèves peinant devant des problèmes ardus ont posé cette question. Avec des réponses multiples, allant du développement de la curiosité à la construction de la logique, de la gymnastique cérébrale à la maîtrise de situations de la vie courante. Ce dernier argument paraît aller de soi, en commençant par les besoins constants que nous éprouvons de savoir compter. L’étude qu’a publié, mercredi 5 février, dans la revue Nature une équipe de chercheurs prestigieux invite toutefois à pondérer l’argument. En comparant les performances de jeunes vendeurs de légumes et d’écoliers indiens, ils ont montré l’incapacité des uns comme des autres à transférer leurs compétences arithmétiques pourtant réelles d’un univers à l’autre, du pratique à l’abstrait, et inversement. | |
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| Conduite par les prix Nobel d’économie Esther Duflo et Abhijit Banerjee ainsi que par la psychologue Elizabeth Spelke (Harvard), spécialiste mondiale du développement des facultés cognitives chez les enfants, la recherche a commencé sur un terrain inhabituel : un marché de Calcutta, en Inde. Des enfants de 11 ou 12 ans y travaillent comme vendeurs de légumes. Un enquêteur s’approche et sans se présenter réclame deux produits : 400 grammes de tomates et 300 grammes d’aubergines, par exemple. Puis il tend un billet dépassant largement la somme réclamée. « Pour faire le total puis rendre la monnaie, l’enfant doit réaliser des calculs assez complexes, explique Esther Duflo. Et il y parvient sans aucun problème et très rapidement. » Sur les 200 enfants, testés à trois reprises, dont la moitié n’étaient pas scolarisés, 95 % ne commettent aucune erreur. | |
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| Des chiffres à la place des légumes | |
| Les chercheurs se dévoilent alors et proposent aux enfants et à leurs parents de réaliser cette fois des tests plus formels, plus abstraits aussi. Pas de légumes, rien que de chiffres. « Les problèmes sont beaucoup plus simples en vérité que ce qu’ils font chaque jour mais ils réussissent très mal », observe Esther Duflo. 54 % seulement pour une soustraction de deux nombres à deux chiffres, 32 % pour une division d’un nombre à trois chiffres par un nombre à un chiffre. La même étude conduite sur 400 enfants de Delhi a vu ce dernier résultat tomber à 15 %. Par comparaison, 56 % des enfants scolarisés du même âge réussissent une telle division simple. | |
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| Les écoliers ne sortent pas pour autant intacts de cette étude. Les chercheurs ont opéré l’expérience inverse : placer ces enfants dans les situations concrètes vécues par les vendeurs de légumes. Ou plutôt face aux questions concrètes posées au marché. Le résultat est tout aussi spectaculaire : sans limite de temps et avec un crayon et du papier, ils réussissent à 50 % ce que leurs camarades du marché réalisaient à 95 %. Mais sans matériel et en temps limité, seuls 10 % d’entre eux passent le test avec succès. | |
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| Comment expliquer une telle différence ? Les chercheurs ont tenté d’écarter les biais. A commencer par l’usage du « par cœur », autrement dit la connaissance habituelle par les vendeurs du prix de plusieurs kilos ou de plusieurs livres d’un légume. Les acheteurs ont donc pris soin de toujours réclamer des quantités inhabituelles (400 grammes de tomates et 300 grammes d’aubergines dans notre exemple). Autre travers possible, l’incitation : puisque les enfants du marché sont payés, de petites récompenses ont été offertes aux écoliers. Sans changer les résultats, là encore. Le stress, enfin. Les vendeurs n’échoueraient-ils pas par rejet ou crainte de l’école ? La moitié d’entre eux s’est donc vue présenter les épreuves scolaires comme une application de leurs formidables compétences, l’autre comme une vérification de leur capacité théorique. La mesure de leur stress s’est révélée très différente. Mais les premiers n’ont pas mieux réussi que les seconds. | |
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| « Double échec de l’école » | |
| Pour les auteurs, la conclusion est sévère. « L’école échoue doublement, insiste Esther Duflo. Elle n’est pas capable de prendre en compte les compétences des enfants du marché et elle ne permet pas aux autres élèves d’intégrer suffisamment les connaissances scolaires pour les utiliser en situation concrète. » Un jugement qui vise d’abord l’école indienne, précise-t-elle. Mais cet écart entre apprentissage théorique et maîtrise pratique se retrouve dans les analyses accompagnant les résultats français dans l’enquête internationale Pisa. | |
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| Professeur de sciences de l’éducation à l’université Paris-Cité et didacticien des mathématiques, Eric Roditi salue l’ampleur de cette recherche. « On avait déjà observé les compétences en mathématiques de vendeurs de rue au Brésil ou au Sénégal, mais c’était sur de tout petits nombres, quelques unités, jamais à cette échelle », dit-il. « Cette façon d’écarter les facteurs confondants est également remarquable », poursuit-il. Il invite toutefois à prendre quelques précautions dans l’interprétation de certains résultats. D’abord parce que les compétences mobilisées par des vendeurs de rue ne sont pas toujours celles que l’on croit : « Rendre la monnaie ne passe jamais par une soustraction mais par une série d’additions : 37 et 3 qui font 40, et 10 qui font 50, et 50 qui font 100… », donne-t-il comme exemple. Par ailleurs, les objectifs de l’école « ne sont pas de donner des savoirs immédiatement applicables mais d’acquérir des concepts et des techniques sur lesquels ils s’appuieront par la suite ». Enfin, ajoute-t-il, en France, « nos élèves de catégories populaires n’ont pas d’activité professionnelle dans laquelle ils utilisent les mathématiques ». | |
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| Pourtant, ces élèves, souvent les plus en échec, affichent « des représentations des maths discordantes de ce qui est fait à l’école », insiste-t-il. Aussi l’économiste et le didacticien tirent de cette étude la même conviction : il est temps de multiplier les approches. « Il faut faire le pont entre les connaissances pratiques et abstraites », dit Esther Duflo. « Pour intégrer les enfants du peuple, il faut intégrer la culture du peuple », ajoute Eric Roditi. Et la Prix Nobel, spécialiste de l’étude expérimentale des inégalités, de conclure : « En vérité, c’est important autant pour les enfants du marché que pour tous les autres. » | |
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| Nathaniel Herzberg | |
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