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- LE MONDE AFRIQUE
-Quand Elon Musk accuse l’Afrique du Sud, son pays natal, de « persécuter les Blancs »
-Donald Trump a menacé de suspendre l’aide que les Etats-Unis octroient au pays en raison d’une législation autorisant la saisie de terres, une réforme également dénoncée par le plus riche et célèbre des Sud-Africains.
-Par Mathilde Boussion (Johannesburg, correspondance)
-Par Mathilde Boussion (Johannesburg, correspondance)
-Par Mathilde Boussion (Johannesburg, correspondance)
-Aujourd’hui à 06h00, modifié à 15h42
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-Elon Musk, lors de la cérémonie d’investiture de Donald Trump, dans la rotonde du Capitole, à Washington, le 20 janvier 2025. CHIP SOMODEVILLA / VIA REUTERS
-Faut-il y voir l’influence d’Elon Musk sur la diplomatie de Donald Trump ? Dimanche 2 février, dans une charge sur son réseau Truth Social, le président américain a accusé l’Afrique du Sud, pays de naissance du patron de Tesla, de « confisquer des terres » et de « traiter certaines catégories de population TRÈS MAL », menaçant de suspendre l’aide américaine à destination de ce pays dans l’attente d’une « enquête complète sur la situation ».
-Comme pour révéler qu’il est l’inspirateur de ces quelques mots, le plus riche et célèbre des Sud-Africains a interpellé quelques heures plus tard sur X, son propre réseau social, le président sud-africain, Cyril Ramaphosa : « Pourquoi vos lois sur la propriété sont-elles ouvertement racistes ? » Avant de surenchérir, mardi, en relayant des messages, toujours sur X, jugeant notamment que « les Sud-Africains blancs sont persécutés en raison de leur race dans leur propre pays ».
-L’Afrique du Sud entretient des relations délicates avec les Etats-Unis, avec le Parti républicain en particulier, depuis ses prises de position sur l’Ukraine marquées par une forme de neutralité et sa plainte contre Israël auprès de la Cour internationale de justice. Le pays s’efforce cependant de préserver ses relations avec Washington, dont il est le premier partenaire commercial en Afrique. En septembre 2024, M. Ramaphosa avait rencontré Elon Musk pour l’inciter à investir dans son pays d’origine. Après la charge de son homologue américain, il a tenté d’apaiser le débat, promettant que « le gouvernement sud-africain n’a confisqué aucune terre » et que la signature, fin janvier, d’une loi sur l’expropriation « garantit l’accès du public à la terre d’une manière équitable et juste, conformément à la Constitution ».
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-Trente ans après la fin de l’apartheid, la question du partage des terres et des richesses reste sensible dans le pays le plus inégalitaire au monde, selon le Laboratoire sur les inégalités mondiales, et où 72 % des terres agricoles sont encore aux mains de propriétaires blancs, une communauté qui représente 7 % de la population.
-Si Elon Musk relaye certaines des peurs blanches sud-africaines, il sait aussi ce que fut le pire de l’apartheid vécu par ses compatriotes noirs. Né en 1971, il est adolescent lorsque en 1985, le Parti national, architecte de l’apartheid, décrète l’état d’urgence. Les townships s’enflamment. La répression se durcit. Alors que des campagnes internationales prônent le boycott, le régime raciste agite la « menace rouge ». Cinq ans plus tard, Nelson Mandela sortira de prison. Il sera élu président de l’Afrique du Sud en 1994.
-Musk grandit dans une bulle préservée des violences raciales
-« En tant qu’enfant ayant grandi en Afrique du Sud, Elon Musk a connu la douleur et a appris comment y survivre » : voilà comme commence sa biographie autorisée, signée Walter Isaacson. Du racisme institutionnalisé et des « douleurs » qui caractérisent alors son pays, l’ouvrage publié en 2023 ne dit rien ou presque. Sur 688 pages, le mot « apartheid » apparaît cinq fois. « Ségrégation » jamais.
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-Comme l’immense majorité des garçons blancs nés en Afrique du Sud à cette période, Elon Musk grandit dans une bulle préservée des violences raciales. Grâce aux succès dans les affaires de son père ingénieur, il vit dans une maison cossue de la capitale, Pretoria, un bastion afrikaner, une communauté héritière des premiers colons néerlandais et français. Issu, par son père, d’une lignée anglaise, Elon Musk fréquente le prestigieux lycée Boys High School, réputé plus progressiste que les établissements de langue afrikaans.
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-Absorbé par les livres, la construction de fusées et les jeux vidéo, l’enfant est décrit comme « socialement bizarre », mal à l’aise avec le moule masculiniste imposé par le parti au pouvoir qui prépare les écoliers à rejoindre les rangs de l’armée. Plutôt gringalet, le jeune homme n’est pas très sportif, guère attiré par le rugby, le sport roi pour le régime. Dans son premier lycée, il raconte avoir été violemment harcelé. Il y livre aussi un autre récit : son voyage, à 12 ans, dans une Veldskool, un camp de survie en pleine nature, où les enfants auraient été encouragés à se battre pour de faibles rations d’eau et de nourriture. « Une fois de temps en temps, un enfant mourait », écrit son biographe, Walter Isaacson.
-La description laisse perplexe l’historien Stephen Symons, qui a consacré sa thèse à l’étude de la militarisation de l’enfance dans l’apartheid des années 1980. « Il y avait sans aucun doute du harcèlement dans les Veldskools, mais pousser les enfants à se battre, j’ai du mal à y croire. Et je n’ai jamais entendu parler d’enfants qui seraient morts », relate-t-il. D’autres détails interpellent l’historien, comme ce corps baignant dans une mare de sang, un couteau planté dans la tête, qu’Elon et son frère auraient dû enjamber en descendant d’un train. « Le seul endroit où aurait pu se passer une scène comme celle-ci, c’est dans un township. Partout ailleurs, la police aurait été sur les lieux en quelques minutes », dit-il.
-A 17 ans, en 1989, Elon Musk s’envole pour le Canada, que son grand-père quitta en 1950 pour rejoindre l’Afrique du Sud, pays qu’il jugeait plus conforme à ses valeurs morales. Il attendra onze ans avant de revenir, restant longtemps discret sur sa jeunesse sud-africaine.
-Musk, « un suprémaciste pour lui-même »
-Manifestation devant le département du Trésor, à Washington, le 4 février 2025. JOSE LUIS MAGANA / AP
-Aussi son engagement brutal sur les réseaux sociaux contre son pays de naissance surprend. En août 2023, il interpelle le président Ramaphosa au sujet d’un chant interprété par un leader de l’opposition radicale de gauche, Julius Malema, appelant à « tuer les Boers ». « Ils appellent ouvertement à un génocide de la population blanche en Afrique du Sud. Cyril Ramaphosa, pourquoi vous ne faites rien ? », réagit-il alors.
-Fin 2024, Elon Musk était également abonné à un compte sud-africain agitant la menace d’un « génocide blanc », après des meurtres de fermiers. Dans son virage ultraconservateur, il a renoué avec David Sacks et Peter Thiel, ses anciens associés de la « mafia PayPal ». Le premier, né au Cap en 1972, est chargé des cryptomonnaies dans la nouvelle administration Trump. Le second, qui a passé une partie de son enfance en Afrique du Sud, a mis sa fortune au service de ses idées libertariennes.
-L’une de ses ex-femmes et son frère assurent qu’Elon Musk a hérité de son enfance un trauma de la violence, marqué également par l’emprise psychologique d’un père qui le rabaisse et le sermonne pendant des heures. Aux yeux de Walter Isaacson, elle a fait de lui « une de ces personnes qui se sentent en vie quand la tempête approche » et « se nourrit des crises ».
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-Comment la droite tech américaine a pris le pouvoir
-Pour Philip Low, PDG de Neurovigil, société de neurotechnologie dans laquelle le patron de Tesla a investi au milieu des années 2010 avant que le premier suspecte le second d’avoir tenté de déstabiliser sa compagnie pour en prendre le contrôle, « Elon Musk recherche le pouvoir. Il n’est pas un suprémaciste blanc mais il est un suprémaciste pour lui-même, il veut se mettre au-dessus de tout le monde. La manière dont il agite la question sud-africaine s’inscrit dans la lignée de son raid sur les données du Trésor américain. Il veut montrer que son influence sur Trump déborde à l’étranger ».
-L’attaque d’Elon Musk intervient également au moment où celui-ci tente de déployer son réseau Internet satellitaire Starlink en Afrique du Sud, mais se heurte à une réglementation qui impose aux entreprises cherchant à obtenir une licence dans le secteur des télécommunications que leur capital soit détenu à 30 % au moins par des individus issus de groupes historiquement désavantagés.
-Dans ce contexte, l’Afrique du Sud s’inquiète désormais de la possibilité de voir l’administration Trump l’exclure des accords de l’African Growth and Opportunity Act – une loi américaine sur la croissance et les possibilités économiques en Afrique –, qui facilitent ses relations commerciales avec les Etats-Unis.
-Retrouvez tous les épisodes de la série « Elon Musk, un héros américain » ici.
-Mathilde Boussion (Johannesburg, correspondance)
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-Donald Trump provoque la sidération en envisageant un contrôle américain de la bande de Gaza
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