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-====== Le Monde – « En métropole, vous êtes au courant de ce qu’on vit vraiment à Mayotte ? » ====== https://www.lemonde.fr/outre-mer/article/2025/01/30/en-metropole-vous-etes-au-courant-de-ce-qu-on-vit-vraiment-a-mayotte_6522968_1840826.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default 
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-https://www.lemonde.fr/outre-mer/article/2025/01/30/en-metropole-vous-etes-au-courant-de-ce-qu-on-vit-vraiment-a-mayotte_6522968_1840826.html 
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-MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-« En métropole, vous êtes au courant de ce qu’on vit vraiment à Mayotte ? » 
-Par Florence Aubenas (Mamoudzou, envoyée spéciale) 
-Par Florence Aubenas (Mamoudzou, envoyée spéciale) 
-Par Florence Aubenas (Mamoudzou, envoyée spéciale) 
-Aujourd’hui à 06h00, modifié à 10h46 
-Article réservé aux abonnés 
-Offrir 
-REPORTAGE Florence Aubenas, grand reporter au « Monde », a suivi la tournée quotidienne d’une infirmière libérale dans l’île de l’océan Indien. Une manière de prendre la mesure des fractures qui déchirent la société, sur fond de peur et de violence. 
-Lecture 7 min 
-Ça démarre par une cavalcade à l’aube dans un bidonville de Mayotte. Nadhuimati, 55 ans, se faufile en petite robe bon genre entre les écoulements fangeux et les feux mal éteints. Elle est infirmière libérale à domicile, et son premier patient, un monsieur d’un certain âge, la guette avec impatience près d’une bougie dans sa baraque en tôle. Pas question de plaisanter sur les horaires. Il est mendiant de profession, un des meilleurs de l’île, et tient à arriver le premier devant l’Intermarché de Mamoudzou, la capitale régionale, pour s’assurer une place de choix où faire la manche. Il est 5 h 30 du matin, la course quotidienne de Nadhuimati a commencé, vingt-six patients, sept jours sur sept. 
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-Après le cyclone Chido, le 14 décembre 2024, l’infirmière avait erré des jours dans les décombres pour retrouver ses malades, un à un. Tous ont survécu et, autour de Mamoudzou, les favelas ont repoussé en quinze jours, tôles, planches, torchis à perte de vue, gamines aux tresses rousses de boue, va-et-vient incessant d’hommes et de femmes sur le flanc des collines portant des fardeaux sur leur dos. 
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-Nadhuimati pendant sa tournée quotidienne, à Mamoudzou (Mayotte), le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-Lire aussi 
-A Mayotte, la chasse éperdue à la tôle ondulée 
-La patiente suivante partage une cahute avec sa fille, 25 ans, un bébé dans les bras. Quelques débris servent de meubles, la pluie goutte dans une bassine. « Avant Chido, on avait presque tout ici, la télé, deux congélateurs, le micro-onde, le Wi-Fi », explique la fille, greffière au tribunal de Mamoudzou. Il y a des années, un relogement avait été promis lors d’un plan de résorption des bidonvilles. Depuis, aucune nouvelle. « La vie a repris, pareille, en pire », commente la patiente, la quarantaine. A Mayotte, le cyclone a soufflé aussi sur les braises, ravivant les vieilles plaies, les violences, les peurs. 
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-Lire le décryptage (2023) 
-Mayotte, le département français des exceptions légales 
-Le jour de Chido, la patiente et sa fille s’étaient mises à l’abri chez la grand-mère, domiciliée dans « un quartier en dur », béton et brique. Des frères et sœurs, leurs enfants, quelques aïeux les avaient rejoints à leur tour. Puis tous étaient restés ensemble, le temps de reconstruire les cases. Tous, sauf la patiente et sa fille. Chassées dès le lendemain par le reste de la famille, elles avaient échoué avec le bébé dans un camion abandonné. Pourquoi elles ? « La jalousie », souffle la patiente. 
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-Nadhuimati visite une patiente diabétique, à Mamoudzou (Mayotte), le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-Elle se souvient de leur traversée, une nuit, sur l’océan Indien depuis une autre île des Comores, la famille trempée sur le kwassa-kwassa, ces embarcations de fortune qui convoient les clandestins. Au bout du voyage, l’eldorado, ou en tout cas une certaine idée de l’eldorado : Mayotte, le département le plus pauvre de France. Là-bas, les passagers arriveraient bien à décrocher un sésame, un récépissé, au moins un peu de sursis légal. Tous y croyaient. Mais dans la famille de la patiente, aucun n’avait réussi à obtenir un permis de séjour, sauf elle pour des raisons médicales. « La jalousie », reprend sa fille en écho. 
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-En avoir ou pas 
-De manière obsédante, la question des papiers divise les familles, les quartiers, la vie politique, l’île tout entière : en avoir ou pas. A chaque nouveau malade, c’est la première demande de l’infirmière : « Tu es en situation régulière ? » Son métier exige de prodiguer des soins sans condition de revenus ou de statut, mais le montant des prises en charge diffère. Nadhuimati a ses propres statistiques : sur ces vingt-six patients, sept sont mahorais, douze étrangers en situation régulière, sept sans aucun droit. Certains lui doivent jusqu’à 5 000 euros. 
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-Lire aussi 
-Mayotte : le projet de loi d’urgence voté à l’Assemblée, le bilan humain du cyclone toujours ignoré 
-Souvent, les malades lui sont indiqués par des voisins inquiets : cette jeune mère au pied rongé par le diabète jusqu’à la cheville, qui se traîne à quatre pattes ; ce vieil homme seul dans ses draps imprimés « I love you », qui retombe d’un seul bloc quand elle essaie de l’asseoir. Sa femme l’a quitté pour un fonctionnaire blanc en poste sur l’île, ses enfants ont déménagé en métropole. Il se retrouve incapable de récupérer ses droits à la retraite et à la Sécurité sociale : l’homme est illettré, comme tous les patients de Nadhuimati, sauf deux ou trois peut-être. Pour tous, sans distinction, elle s’occupe de l’administratif et négocie avec les pharmacies. 
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-Nadhuimati lors d’une consultation à domicile, à Mamoudzou (Mayotte), le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-Même les résidents réguliers sont en train de basculer du côté de l’illégalité, faute de pouvoir renouveler leurs titres de séjour. Depuis octobre 2024, des collectifs citoyens locaux, qui revendiquent de défendre les intérêts sécuritaires et sociaux des Mahorais, bloquent l’accès au bureau des étrangers à la préfecture « au nom de la lutte contre l’immigration clandestine ». « Il ne faut pas les traiter comme des humains, sinon ils vont prendre la grosse tête », s’énerve une militante du collectif. Dès le lendemain du cyclone, les kwassa-kwassa ont repris leur navette en provenance de l’archipel des Comores. 
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-Lire aussi (2023) 
-A Mayotte, un camp de migrants africains cristallise toutes les colères de l’île 
-Direction Mamoudzou Centre. L’infirmière se faufile dans un labyrinthe de courettes, de maisons intriquées les unes dans les autres où s’entrecroisent les vies et les conversations. A travers un entrebâillement se devinent des femmes allongées dans la pénombre, où tremblent les images d’un film indien à la télévision. On reconnaît Nadhuimati. On l’annonce. On la fête. Elle entre chez un trentenaire, troubles psychiatriques. Au lycée, en 2012, un de ses camarades avait été poignardé devant lui, le premier mort de la guerre des gangs dans un établissement scolaire. Il ne s’en est jamais remis. 
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-« Pourquoi tu sauves un délinquant ? » 
-Au coin d’une ruelle, l’infirmière regarde à droite, à gauche. La routine. C’est ici qu’elle s’est fait braquer son portable la première fois, un gosse avec un couteau qui avait crié : « Ton téléphone ou ta tête ! » Quelques semaines plus tard, un frigo avait été lancé sur le capot de sa voiture, des jeunes qui disaient être des « oubliés ». L’infirmière n’en était pas revenue, un choc. On était en 2016. Déjà tendue, l’époque venait de vriller. Autant que les malades, ce sont les « dakous » (le nom local des jeunes voyous) qui balisent désormais ses tournées. Est-ce que la route sera praticable aujourd’hui ? Est-ce qu’elle arrivera jusqu’à ses patients ? « En métropole, vous êtes au courant de ce qu’on vit vraiment ici ? », demande l’infirmière. 
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-Dans la voiture de Nadhuimati, lors de sa tournée dans le sud de Mamoudzou, le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-Sa voiture longe la rivière où elle aimait nager enfant. Pas une famille n’aurait osé alors venir y laver son linge, par crainte des contraventions. Elle s’est transformée en une ravine encombrée de détritus où serpente une eau épaisse. Un petit pont sert de frontière vers un autre bidonville. Sur le volant, les mains de Nadhuimati se sont mises à trembler. Des dakous du quartier y dressent souvent leur barrage, trois ou quatre jeunes en travers du chemin, machettes, couteaux, chiens et toujours un gosse avec eux. Sous l’œil des grands, c’est lui qu’on envoie dépouiller les automobilistes. Combien de fois lui a-t-il tout raflé, jusqu’au lecteur de carte Vitale ? Quand il a fini, l’enfant lui jette comme un défi : « Je suis comme toi, moi aussi j’ai les papiers. » 
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-Lire aussi 
-L’exemple de Mayotte, ou comment les inégalités sociales amplifient les effets du changement climatique 
-Elle pourrait parler longtemps de cette défiance qui ne la quitte plus, comme tous ceux confrontés sans cesse à la face la plus obscure de l’île. Quelques cailloux et un bout de bois sur une route ? Ne pas descendre du véhicule pour les dégager, ça pourrait être un piège. Ces buissons qui remuent dans un tournant ? Un gang de dakous doit s’y cacher, peut-être celui dont les membres ont pour tenue de guerre un masque chirurgical et une combinaison blanche d’hôpital. Surtout, ne jamais les regarder en face. Pour avoir enfreint la règle, l’infirmière avait vu sa maison incendiée. Les secours n’avaient accepté de se déplacer que sous escorte policière. 
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-Lire aussi le reportage 
-Mayotte : « Avec l’hôpital de campagne, on a enfin la “Rolls-Royce des soins” » 
-Maintenant, aux barrages des dakous, Nadhuimati fonce droit devant. Une phrase tourne dans sa tête : « C’est eux ou moi. S’ils ne m’esquivent pas, j’appelle la police et mon avocat. » L’autre jour, pourtant, elle s’était arrêtée au chevet d’un blessé laissé sur le trottoir après une rixe entre bandes. Les adultes du voisinage l’avaient prise à partie, brutalement : « Pourquoi tu sauves un délinquant ? » De son côté, la bande rivale a promis de lui régler son compte. 
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-Nadhuimati pendant sa tournée quotidienne, à Mamoudzou (Mayotte), le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-A la station-service, un employé lui lâche en guise d’au revoir : « Ça va partir en guerre civile », la phrase que tout le monde répète depuis des années. Des zones entières de certains bidonvilles, à Kawéni ou à Majicavo, autour de la capitale, sont devenues terres inconnues ; plus personne ne s’y risque, ni les soignants, ni les forces de l’ordre, ni les agents administratifs. « On en est arrivé là », résume l’infirmière. 
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-Couvre-feu informel 
-Une de ses malades préférées l’attend, une débrouillarde, en train de préparer des achards au citron qu’elle vendra au marché. Née sur l’île d’Anjouan, aux Comores, la cuisinière est arrivée depuis longtemps, « avant le président Hollande, avant le président Sarkozy. C’était pendant le président Chirac », dit-elle dans un français cabossé. A l’époque, les papiers se faisaient en quatre jours. 
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-A Mayotte, vivier du sprint français, la communauté sportive se mobilise après le passage du cyclone Chido 
-Tout autour, le quartier bruisse des rumeurs du cyclone, un chef de bande serait mort pendant la tempête. Après avoir sauvé une femme et son enfant, il avait entrepris de traverser la rivière pour récupérer son butin, des bonbonnes de gaz pillées dans les bicoques désertées. On l’a retrouvé noyé. 
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-Nadhuimati pendant sa tournée quotidienne, à Mamoudzou (Mayotte), le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-Parmi les dakous, il arrive à l’infirmière d’en connaître certains, l’île est si petite, des gosses qui étaient au collège avec son fils. Ils lui lancent au visage : « On est devenu comme ça à cause de toi ! » Pendant les années 2000, elle s’était ouvertement battue pour l’instauration de classes de niveau, persuadée que son fils ne progresserait pas au milieu d’élèves maîtrisant mal la lecture et l’écriture. Ils l’avaient traitée de « raciste ». 
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-Toute son enfance, le gamin l’a suivie partout, embarqué dans ses tournées dès 5 heures du matin avant qu’elle le dépose à l’école. Divorcée, l’infirmière l’a élevé seule, multipliant les vacations dans des labos privés pour joindre les deux bouts. Les souvenirs affleurent, ceux d’une famille respectée à Mayotte : le père employé à La Poste, au prestigieux service des télégrammes, une tante qui savait remplir seule sa feuille d’impôt et tenir une conversation sans interprète. Le premier instituteur originaire de l’île était son grand-père, son oncle le premier préfet. Le fils de Nadhuimati s’apprête à continuer la lignée : il termine ses études de médecine en métropole, qui feront de lui le premier ophtalmologue mahorais. 
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-« Racisme » et « souveraineté » à Mayotte : après le cyclone Chido, les plaies à vif entre les Comores et la France 
-La tournée de l’infirmière se termine au coucher du soleil, devenu une sorte de couvre-feu informel. Les rues se vident d’un coup, les magasins ont avancé leur heure de fermeture, mariages et cérémonies se célèbrent maintenant l’après-midi. La nuit s’est faite trop dangereuse. 
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-En son temps, Nadhuimati aussi avait fait le voyage vers l’Hexagone pour des études d’anglais dans les années 1990, avant de découvrir sa vocation enfouie : infirmière. Elle avait choisi de revenir exercer sur son île. A son départ, en 2015, son fils se disait impatient de retrouver Mayotte. Maintenant, comme beaucoup de jeunes, il en parle moins. Elle doit le supplier de rentrer au moins pour les vacances. Elle-même s’accroche. « Si tout le monde quitte l’île, qui va rester ? » 
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-Nadhuimati auprès d’un patient diabétique et handicapé par la poliomyélite, à Mamoudzou (Mayotte), le 25 janvier 2025. MORGAN FACHE / DIVERGENCE POUR « LE MONDE » 
-Florence Aubenas (Mamoudzou, envoyée spéciale) 
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