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-====== Le Monde – En Russie et en Ukraine, le recrutement à marche forcée de combattants ====== https://www.lemonde.fr/international/article/2024/12/08/en-russie-et-en-ukraine-le-recrutement-a-marche-forcee-de-combattants_6436302_3210.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default 
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-<ifauth @user> 
-Une publicité incitant à rejoindre les rangs de l’armée russe, à Moscou, le 22 septembre 2024. 
-ALYONA MALKOWSKAYA POUR «LE MONDE» 
-En Russie et en Ukraine, le recrutement à marche forcée de combattants 
-Par Chloé Hoorman, Thomas d’Istria (Kiev, correspondant), Marie Jégo, Elise Vincent et Faustine Vincent 
-Par Chloé Hoorman, Thomas d’Istria (Kiev, correspondant), Marie Jégo, Elise Vincent et Faustine Vincent 
-Par Chloé Hoorman, Thomas d’Istria (Kiev, correspondant), Marie Jégo, Elise Vincent et Faustine Vincent 
-Article réservé aux abonnés 
-Décryptage En raison des nombreuses pertes sur le champ de bataille, Kiev et Moscou sont confrontés à une pénurie de soldats. Malgré diverses mesures incitatives et le recours grandissant à des combattants étrangers, la pression sur les deux belligérants devient critique. 
-Alors que le conflit ukrainien est entré dans une nouvelle phase depuis le 5 novembre, date de l’élection de Donald Trump à la tête des Etats-Unis, la soutenabilité de l’effort de guerre de Moscou contre Kiev fait l’objet de toutes les attentions. Si le Kremlin a complètement réorienté son économie au service de son industrie de défense, afin d’assurer son endurance militaire, particulièrement en matière de munitions, il est une ressource dont la Russie – comme l’Ukraine – peine toujours à assurer la continuité, c’est celle des combattants. Une pression contribuant aux surenchères du président russe, Vladimir Poutine, s’inquiètent les observateurs. 
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-« Depuis le début de la guerre en Ukraine, le temps est du côté de la Russie. Moscou a une population plus nombreuse que Kiev, une économie plus importante. Dans une guerre d’attrition, cela compte », résume Joris Van Bladel, spécialiste des affaires militaires russes et associé senior à l’Institut Egmont, en Belgique. « Mais la Russie n’a pas non plus des ressources illimitées. Donc, on assiste aussi actuellement à une concurrence dans la gestion du temps », souligne M. Van Bladel, auteur d’un livre à paraître en février 2025, intitulé Land van het Grote Sterven. Hoe Rusland de Westerse Logica Tart (« le pays des grands sacrifices. Comment la Russie défie la logique occidentale », Prometheus, non traduit). 
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-Côté russe comme côté ukrainien, le nombre de morts et de blessés est un sujet extrêmement sensible, et aucun chiffre précis n’a jamais été diffusé. Mais, d’après une étude publiée en novembre par l’Institut français des relations internationales (IFRI), ces pertes, dites « irréversibles », c’est-à-dire les morts, les disparus et les blessés graves, ne cessent d’augmenter. Entre mars 2022 et octobre 2023, les pertes russes seraient ainsi passées de 231 par jour à plus de 600, soit plus du double. Et, depuis novembre 2023, elles approcheraient le millier par jour, d’après Yuri Fedorov, auteur de l’étude de l’IFRI bâtie à partir de recoupement de données en source ouverte. Mercredi 4 décembre, Anna Tsiviliova, vice-ministre russe de la défense, a annoncé que le ministère avait effectué 48 000 tests d’ADN, afin d’identifier des soldats disparus. 
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-L’Institut pour l’étude de la guerre, un centre de réflexion américain qui suit le conflit au jour le jour, a fait état, mardi 3 décembre, de plus de 1 700 pertes par jour, avec un total de plus de 600 000 morts et blessés depuis le début de la guerre. Sur ces estimations globales, à la date du 22 novembre, seul le chiffre de 79 819 militaires russes morts a toutefois pu être formellement recoupé par le site d’opposition russe Mediazona, qui, en collaboration avec la BBC, tient à jour une liste nominative vérifiée des soldats morts au front. Un chiffre qui, selon ceux qui le publient, correspond à environ la moitié du nombre réel. 
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-Inquiétude d’une « réaction négative de la population » 
-Soucieux d’arriver en position de force à la table des négociations que Kiev et ses alliés commencent à évoquer, Vladimir Poutine met en tout cas toutes ses forces dans la bataille. Et, au rythme actuel, il a besoin d’environ 30 000 hommes par mois pour nourrir la poursuite de son offensive. Un chiffre toutefois quasi impossible à atteindre, car il se révèle inférieur au nombre de pertes subies mensuellement dans les rangs russes et qu’il ravive le spectre de la mobilisation générale pourtant soigneusement évitée depuis le début de la guerre. « Pour l’instant, il y a toujours un flux de volontaires, mais l’exercice est fragile », reprend M. Van Bladel. 
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-Les citoyens russes signent « très activement » des contrats avec le ministère de la défense, ils sont « très nombreux » à le faire – des « centaines par jour », a ainsi affirmé le porte-parole du président russe, Dmitri Peskov, le 23 novembre, à l’agence RIA Novosti. « Il n’y a pas lieu de parler de mobilisation maintenant », a-t-il ajouté. Pour mémoire, la mobilisation partielle de 300 000 hommes, ordonnée par Vladimir Poutine, en septembre 2022, avait provoqué un malaise au sein de la société russe et l’exode hors de Russie de près de un million d’hommes, parmi les plus éduqués. Un scénario que la direction russe ne souhaite pas voir se répéter. 
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-« Le commandement militaire, en particulier le chef de l’état-major général, insiste sur le fait que la mobilisation de 300 000 personnes est nécessaire, voire indispensable, analyse M. Fedorov. Toutefois, l’aile politique de la haute bureaucratie russe s’y oppose et s’inquiète d’une réaction négative de la population. Poutine lui-même espère que la guerre pourra être menée sans une nouvelle vague de mobilisation, par le recrutement de nouveaux soldats sous contrat. » 
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-Des soldes et des primes mirobolantes 
-Pour maintenir le niveau de recrutement, Moscou joue, de ce fait, depuis le début du conflit, sur l’appât du gain, proposant des soldes et des primes mirobolantes aux hommes qui signent un contrat avec l’armée. Obligées de fournir des quotas de contractuels, les autorités régionales se livrent à une concurrence acharnée sur le montant des primes offertes. Ainsi, début octobre, dix régions russes ont augmenté la prime forfaitaire versée dès la signature du contrat. Celle-ci est désormais plus importante dans certaines provinces qu’à Moscou. A Nijni Novgorod, à l’est de Moscou, à Khanty-Mansiïsk, en Sibérie occidentale, et à Belgorod, à la frontière avec l’Ukraine, elle atteint désormais près de 3 millions de roubles (27 260 euros) contre 2,3 millions de roubles à Moscou. Ajoutées à la solde militaire, ces primes peuvent rapporter aux contractuels plus de 5 millions de roubles en un an, une somme faramineuse en comparaison du salaire moyen annuel, estimé à 996 000 roubles. 
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-Le fait que ces incitations financières soient constamment revues à la hausse confirme le fait que le Kremlin est désespérément en quête de sang neuf pour « compenser les pertes » subies en Ukraine, comme l’a reconnu, sur sa chaîne Instagram, le 27 novembre, le gouverneur de la région d’Oulianovsk, Alexeï Rousskikh. Bien qu’ils soient sommés par le pouvoir central de remplir leurs quotas, les gouverneurs et les préfets peinent à y parvenir. En moyenne, un tiers des quotas de recrutement ne sont pas remplis dans les régions, affirmait, en août, l’agence Bloomberg. Pour ratisser plus large encore, les autorités russes ont donc annoncé qu’à partir de mars 2025 les dispenses d’enrôlement attribuées aux entreprises pour leurs salariés seraient réduites, dorénavant réservées uniquement aux organismes sécuritaires de l’Etat et à l’industrie de défense. 
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-Des militaires russes dans la région de Krasnodar, en Russie, le 2 décembre 2024. 
-Des militaires russes dans la région de Krasnodar, en Russie, le 2 décembre 2024. SERGEY PIVOVAROV / REUTERS 
-A l’évidence, ce système est une épée de Damoclès au-dessus de la tête de M. Poutine et coûte cher au budget de l’Etat. Les dysfonctionnements de l’économie, accrus par les sanctions internationales, engendrent des pénuries de main-d’œuvre, l’inflation est élevée, et les risques de récession sont sérieux, a rappelé, le 24 novembre, une étude de l’Institut allemand pour les affaires internationales et de sécurité, évoquant un « tournant » pour l’économie russe. En outre, Moscou arrive au bout de ses stocks militaires hérités de l’ère soviétique. Malgré tout, les Russes peuvent encore soutenir jusqu’à « dix-huit mois d’opération », estime M. Fedorov, soit un peu plus d’un an pour imposer à l’Ukraine et à ses alliés ses exigences en matière de règlement du conflit. 
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-« Pénurie extrême d’obus » 
-L’arrivée de près de 12 000 soldats nord-coréens en territoire russe, dans l’enclave de Koursk, partiellement occupée par les Ukrainiens depuis le mois d’août, est ainsi venue marquer une nouvelle étape dans la détermination du Kremlin à maintenir sa ressource en combattants. M. Fedorov rappelle pour sa part que, « pour stopper l’avancée ukrainienne à Koursk, Moscou a été contraint d’évacuer plus de 30 000 soldats du front, principalement dans l’oblast de Zaporijia, ce qui trahit un manque de réserves stratégiques ». 
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-Les contingents nord-coréens ont déjà subi des pertes, en particulier lors d’une frappe de Storm Shadow, de fabrication britannique, le 20 novembre, sur un centre de commandement russe, près de Koursk, a déclaré, sous le couvert de l’anonymat, fin novembre, un responsable américain à Radio Free Asia, un média financé par les Etats-Unis. Au rythme actuel des décès sur le champ de bataille, ces 12 000 soldats, peu aguerris aux techniques de combat en Ukraine, où les drones sont omniprésents, ne représentent que deux semaines et demie de pertes pour les Russes. 
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-« C’est malgré tout un signal pour les Ukrainiens », dit une source proche du dossier. D’après le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, fin novembre, la Corée du Nord pourrait passer à la vitesse supérieure dans les prochains mois et fournir jusqu’à 100 000 combattants à Moscou, si la guerre se poursuivait. Un scénario qui chamboulerait, cette fois, le rapport de force. 
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-D’autant que, selon Kiev, le soutien militaire de Pyongyang bouscule aussi les équilibres en matière d’armement. « Les Nord-Coréens ont fourni aux Russes à peu près la même quantité de munitions d’artillerie que celle que tous les pays de l’OTAN nous ont donnée en près de trois ans. C’est un problème », a assuré, le 22 novembre, Andri Biletsky, le commandant de la troisième brigade d’assaut, l’une des principales unités de combat d’Ukraine, dans une interview au média Ukrainska Pravda. Sans ces munitions, les Russes « seraient actuellement dans une situation de pénurie extrême d’obus. Les missiles balistiques qui volent vers Kiev, Odessa ou Mykolaïv sont nord-coréens », a-t-il ajouté. 
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-Au mois de mai, un rapport de l’Agence du renseignement de la défense, aux Etats-Unis, affirmait que la Corée du Nord avait fourni au moins 3 millions d’obus d’artillerie et des dizaines de missiles balistiques pour soutenir la guerre contre l’Ukraine. Une partie de ses équipements seraient toutefois de piètre qualité, et les Russes s’en plaignent. 
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-Des mercenaires leurrés 
-M. Poutine n’a pas attendu les Nord-Coréens pour internationaliser le recrutement militaire et ainsi soulager la pression sur sa propre population. Depuis le début de la guerre, Moscou a eu recours à des recrues des anciennes républiques soviétiques. Des opérations coups de poing sont régulièrement organisées dans les foyers de migrants venus d’Asie centrale, sur les marchés, dans toute la Fédération de Russie. Arrêtés sans ménagement, Tadjiks, Kirghiz, Ouzbeks sont emmenés vers des centres d’enrôlement où ils sont soumis à de fortes pressions pour signer un contrat avec l’armée. 
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-Le recrutement dépasse les frontières de la Russie. Des Népalais, des Indiens, des Cubains, des Afghans, des ressortissants africains, ont aussi été enrôlés, le plus souvent sans savoir qu’ils allaient être envoyés au front. Plusieurs milliers de volontaires issus de ces pays ont ainsi rejoint les rangs des forces russes. Depuis peu, selon le Financial Times du 23 novembre, le Kremlin a aussi réussi à recruter un certain nombre de houthistes, les rebelles yéménites soutenus par l’Iran, qui entravent la navigation en mer Rouge, en tirant des missiles ou des drones sur les cargos en transit. 
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-Ces mercenaires souvent issus de milieux désargentés sont régulièrement leurrés par des promesses d’emploi à l’arrière du front, un accès simplifié à la citoyenneté russe ou l’assurance de contrats courts. En pratique, ce système aboutit souvent à des enrôlements de force. « On leur promet 10 000 dollars [9 520 euros] au départ, puis 2 500 dollars par mois. Mais, quand ils arrivent, ils sont accueillis par l’armée russe et sont payés 260 dollars par mois », a affirmé à l’Agence France-Presse, le 27 novembre, une responsable de l’ONG suisse Inpact, évoquant le chiffre de quelques centaines de houthistes recrutés. Le Népal et l’Inde ont, pour leur part, appelé leurs ressortissants à la vigilance quant à ces méthodes, qui permettent en partie à Moscou de maintenir une forme d’hétérogénéité au sein de ses troupes, considérées ainsi comme plus facilement contrôlables. 
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-Recrues ukrainiennes 
-A l’instar de Kiev, Moscou manque de plus en plus d’officiers qualifiés et d’encadrement pour les troupes – environ 22 000 auraient été tués ou blessés depuis le début de la guerre, d’après l’IFRI. Les cycles de formation ont été considérablement raccourcis, au point de varier de deux semaines à trois mois, selon les spécialités. Les désertions ont également tendance à augmenter, selon les chiffres officiels. En 2023, environ 5 000 cas de désertion ont été portés devant les tribunaux, soit, en moyenne, un peu plus de 400 affaires par mois (650 affaires depuis mars). Mais, du fait de la très forte coercition exercée sur les troupes, ces chiffres demeurent relativement « insignifiants », observe l’IFRI. 
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-La Russie a par ailleurs commencé, pour la première fois, à renforcer ses rangs avec de jeunes Ukrainiens provenant des territoires qu’elle occupe. Dans le cadre du cycle bisannuel de conscription russe de l’automne, des recrues venant des régions de Kherson et de Zaporijia ont été intronisées, lors d’une cérémonie officielle à Simferopol, en Crimée, annexée par Moscou en 2014. Le bureau de Crimée de RIA Novosti, contrôlée par le Kremlin, a publié, le 16 novembre, des images montrant ces Ukrainiens prêtant serment sur une base militaire. Des responsables ukrainiens ont également affirmé, le 18 novembre, avoir pu observer ces nouvelles recrues en Crimée et dans le sud de la Russie, dans les régions de Rostov-sur-le-Don et de Krasnodar. 
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-Un bureau de recrutement pour rejoindre la 3ᵉ brigade d’assaut « Azov », à Kiev, le 9 janvier 2024. 
-Un bureau de recrutement pour rejoindre la 3ᵉ brigade d’assaut « Azov », à Kiev, le 9 janvier 2024. RAFAEL YAGHOBZADEH POUR «LE MONDE» 
-Le ministère des affaires étrangères ukrainien a protesté contre cette campagne de mobilisation menée dans les régions placées sous le joug russe, en Crimée, à Donetsk, à Louhansk, à Zaporijia et à Kherson. Dans un communiqué, publié le 1er octobre, il a exhorté les conscrits à se souvenir « de [leur] lignée, de [leurs] racines et à ne pas [se] laisser embourber dans les crimes du régime du Kremlin ». Le ministère a aussi appelé les citoyens ukrainiens vivant dans ces territoires à « quitter ces unités dès que possible et à retourner sur le territoire ukrainien, ou à partir vers des pays tiers ». Un phénomène toutefois appelé à durer si la « Russie conserve un contrôle à long terme des territoires ukrainiens », a souligné, défaitiste, l’Institute for the Study of War, dans une note du 18 novembre. 
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-Plusieurs lois douloureuses 
-Face aux projets très incertains de Donald Trump vis-à-vis du conflit ukrainien, Vladimir Poutine a en tout cas pris les devants. En septembre, il a publié un décret portant les effectifs autorisés des forces russes à 1,5 million de personnes au total. Une façon de permettre l’augmentation de ses troupes d’au moins 180 000 hommes, sans officiellement annoncer, à ce stade, une nouvelle vague de mobilisation partielle. 
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-Le pari est risqué, et cette hausse ne permettra pas, dans l’immédiat, au Kremlin d’aligner des troupes en plus grand nombre face aux pays du flanc est de l’OTAN, si la situation devait se dégrader avec eux. « Mais les enjeux de la mobilisation russe doivent toujours être pris en compte en regardant la dynamique avec l’Ukraine, rappelle M. Van Bladel. Le but, aujourd’hui, c’est de savoir ce que Kiev est capable d’aligner en face. » 
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-Or, côté ukrainien, la pression est très forte aussi sur le recrutement, et une véritable course contre la montre est lancée face au risque de montée en puissance des forces russes. Au printemps, plusieurs lois vécues comme très douloureuses au sein de la société ukrainienne, visant à améliorer la mobilisation, ont été votées. En particulier l’abaissement de l’âge légal de 27 à 25 ans pour être mobilisé. Les hommes précédemment considérés comme ayant une « aptitude limitée » pour servir ont aussi été appelés à repasser devant des commissions médicales. 
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-En mai, le Parlement a également voté une loi allouant un délai de soixante jours aux conscrits âgés de 18 à 60 ans, pour enregistrer leurs documents militaires, afin de fluidifier les procédures. Les réfractaires risquent des amendes allant jusqu’à des centaines d’euros ou de se faire retirer leur permis de conduire. A la mi-juillet, le ministère de la défense annonçait que 4,7 millions d’Ukrainiens avaient mis leurs données à jour. 
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-« Inégalité entre les nantis et les démunis » 
-Selon les autorités militaires, l’abaissement de l’âge de la mobilisation est censé permettre à l’armée de disposer de 400 000 à 500 000 recrues supplémentaires, sachant que le « réservoir » de mobilisés est estimé entre 3 et 5 millions d’hommes âgés de 25 à 60 ans. En fait, il s’agit d’un vœu pieux, le chiffre de 400 000 à 500 000 hommes n’étant qu’une recommandation faite par les militaires au gouvernement, en décembre 2023. 
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-Une projection qui se heurte à la réalité, les civils rechignant toujours à s’engager volontairement dans ces proportions, malgré les législations assorties d’incitations financières et administratives, et en dépit des efforts accomplis pour une plus grande transparence dans les procédures de recrutement et d’exemption. En octobre, la direction militaire a admis que le rythme s’était ralenti. 
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-L’absence d’une clause sur la démobilisation des militaires, impossible, selon l’état-major, en raison du manque de soldats sur le front, est une des raisons souvent avancées par ceux qui refusent de rejoindre l’armée, rapporte une enquête publiée, fin juillet, par le centre de recherche ukrainien Public Interest Journalism Lab. Une autre problématique, dévoilée par cette étude réalisée avec des experts internationaux sur la base d’entretiens avec des civils et des militaires, tient également à un sentiment d’injustice dans la manière dont la mobilisation est menée. Les Ukrainiens ressentent de fait une « inégalité entre les nantis et les démunis », entre ceux qui peuvent se permettre financièrement, par le « biais de relations et de pots-de-vin », d’éviter la mobilisation, et les autres, qui n’ont pas le choix. Plus généralement, les hommes qui refusent de rejoindre l’armée craignent d’être mal équipés, pas assez ou mal entraînés, de mourir, de dépendre d’un commandant qui ne compte pas les pertes. 
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-« Depuis la fin de l’année 2023, les problèmes liés à la mise en œuvre des plans de mobilisation se sont intensifiés, tandis que les unités militaires qui combattent sur le front ont besoin de renforts réguliers pour retrouver leur pleine capacité de combat. Le vieillissement du personnel militaire est un autre problème. L’âge moyen des soldats ukrainiens est d’environ 35-40 ans, ce qui soulève des inquiétudes quant à leur efficacité dans les conditions difficiles du champ de bataille. En outre, le nombre de volontaires désireux de rejoindre les forces armées ukrainiennes pour des raisons patriotiques a considérablement diminué », souligne un rapport sur la mobilisation en Ukraine, publié, le 20 novembre, par le Centre pour les études orientales, un centre de réflexion polonais. 
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-Les différentes brigades ont une certaine autonomie dans le recrutement et ont recours à des campagnes d’affichage pour attirer les volontaires. Les plus prestigieuses – c’est-à-dire les mieux entraînées et les mieux équipées – arrivent sans doute encore à recruter. « Mais d’autres, plus “classiques”, ont davantage de difficultés. Beaucoup ne comptent plus que un millier d’hommes, contre 4 000 à 5 000 au début de la guerre, souligne Philippe Gros, chercheur à la Fondation pour la recherche stratégique. Avec des bataillons envoyés ici ou là au gré des besoins. Cela devient kafkaïen à gérer. » Les brigades doivent aussi composer avec des soldats envoyés au front après seulement quelques semaines de formation. 
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-« La Russie ne compte pas ses pertes » 
-Pour endiguer la poussée des forces russes dans l’est du pays, l’Ukraine envisage donc de mobiliser 160 000 soldats supplémentaires dans les mois à venir. « Je pense que c’est un scénario tout à fait réaliste. Les centres de formation [en Ukraine] et les centres de formation parmi les pays partenaires fonctionnent beaucoup plus efficacement qu’au début ou au milieu de la guerre. Tout le monde comprend très bien, désormais, quel type de technologies doit être utilisé pendant les entraînements, et tout fonctionne de nouveau. La loi, moyennant des modifications, est plus efficace, et le président propose en permanence diverses mesures incitatives qui permettront d’en faire plus », a soutenu par téléphone, au Monde, le 21 novembre, Mykhaïlo Podoliak, le conseiller du président Volodymyr Zelensky. 
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-Selon lui, la question cruciale pour Kiev n’est pas tant celle des hommes que celle des équipements. « Si vous manquez d’équipements de haute technologie, en matière de ressources, vous n’égalerez toujours pas la Russie. Pourquoi ? Parce que le prix de la vie en Ukraine et le prix de la vie en Russie ne sont pas comparables. C’est-à-dire que la Russie ne compte pas ses pertes », a-t-il rappelé. 
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-Redoutant la pénurie de combattants, l’armée ukrainienne a toutefois décidé, depuis l’automne, d’ouvrir des centres d’information et de recrutement à l’étranger, pour faciliter l’aiguillage des Ukrainiens ayant fui le pays au début de la guerre, qui auraient la volonté de revenir pour combattre. Ces centres sont également ouverts aux candidats étrangers, les forces ukrainiennes ayant, comme la Russie, largement recruté à l’international, notamment chez les Occidentaux. La « légion internationale » ukrainienne compte ainsi des Américains, des Suédois, des Polonais ou des Français. Certains sont d’anciens militaires et peuvent avoir une expérience du combat. D’autres sont formés brièvement aux rudiments de la guerre aux côtés des Ukrainiens. 
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-Le nombre de déserteurs en hausse 
-L’Ukraine est par ailleurs elle aussi confrontée à un nombre exponentiel de déserteurs. Le 1er décembre, le Financial Times a révélé que près de 100 000 Ukrainiens avaient déserté depuis le début de la guerre. Entre janvier et octobre, les procureurs ukrainiens ont ouvert 60 000 dossiers contre des soldats pour abandon de poste, soit près de deux fois plus que les années 2022 et 2023 réunies, a dévoilé le quotidien britannique. S’ils sont reconnus coupables, ces hommes risquent jusqu’à douze ans de prison. 
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-Les confidences d’un responsable américain à l’agence Associated Press, le 28 novembre, ont mis le feu aux poudres. « La simple vérité est que l’Ukraine ne mobilise ni n’entraîne actuellement suffisamment de soldats pour remplacer les pertes subies sur le champ de bataille, tout en suivant le rythme de croissance de l’armée russe », a déclaré ce fonctionnaire sous le couvert de l’anonymat, assurant que Washington souhaitait désormais que Kiev abaisse l’âge de recrutement à 18 ans. Une hypothèse exclue par l’Ukraine, jeudi 5 décembre. 
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-Retrouvez l’intégralité de nos dossiers géopolitiques ici. 
-Chloé Hoorman, Thomas d’Istria (Kiev, correspondant), Marie Jégo, Elise Vincent et Faustine Vincent 
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