Utilisateur non connecté
elsenews:spot-2024-03a:cour-penale-internation [ElseNews]

Outils pour utilisateurs

Outils du site


elsenews:spot-2024-03a:cour-penale-internation

Différences

Ci-dessous, les différences entre deux révisions de la page.

Lien vers cette vue comparative

Les deux révisions précédentes Révision précédente
elsenews:spot-2024-03a:cour-penale-internation [25/12/2025/H23:00:33]
216.73.216.167 supprimée
— (Version actuelle)
Ligne 1: Ligne 1:
-~~NOTOC~~ 
-@DATE@ 
  
- 
- 
----- 
- 
-====== Dans les coulisses de la Cour internationale de justice, au chevet d’un monde en conflit]  ====== 
- 
- 
-[Dans les coulisses de la Cour internationale de justice, au chevet d’un monde en conflit](https://www.lemonde.fr/international/article/2024/03/03/dans-les-coulisses-de-la-cour-internationale-de-justice_6219738_3210.html?lmd_medium=pushweb&lmd_campaign=pushweb&lmd_titre=dans_les_coulisses_de_la_cour_internationale_de_justice_au_chevet_d_un_monde_en_conflit&lmd_ID=6219873 ) 
- 
-<hidden Article Complet (utilisateurs connectés)> 
-<ifauth @user> 
-Vous pouvez partager un article en cliquant sur les icônes de partage en haut à droite de celui-ci.  
-La reproduction totale ou partielle d’un article, sans l’autorisation écrite et préalable du Monde, est strictement interdite.  
-Pour plus d’informations, consultez nos conditions générales de vente.  
-Pour toute demande d’autorisation, contactez syndication@lemonde.fr.  
-En tant qu’abonné, vous pouvez offrir jusqu’à cinq articles par mois à l’un de vos proches grâce à la fonctionnalité « Offrir un article ».  
- 
-https://www.lemonde.fr/international/article/2024/03/03/dans-les-coulisses-de-la-cour-internationale-de-justice_6219738_3210.html?lmd_medium=pushweb&lmd_campaign=pushweb&lmd_titre=dans_les_coulisses_de_la_cour_internationale_de_justice_au_chevet_d_un_monde_en_conflit&lmd_ID=6219873 
- 
-Navigation 
-Retour à la page d’accueil du Monde 
- 
-JM 
- 
-OLAF KRAAK/AFP 
-INTERNATIONAL 
-GÉOPOLITIQUE 
-Dans les coulisses de la Cour internationale de justice, au chevet d’un monde en conflit 
-Par Stéphanie Maupas (La Haye, correspondance) 
-Publié aujourd’hui à 03h30, modifié à 17h59 
-Temps deLecture 13 min. 
- 
-Article réservé aux abonnés 
- 
- 
-Offrir l’article 
- 
- 
-Partager 
-DÉCRYPTAGEL’offensive d’Israël sur Gaza, l’invasion de l’Ukraine par la Russie, mais aussi les obligations des Etats face au réchauffement climatique : quoi qu’il arrive dans le monde depuis 1947, la Cour internationale de justice, à La Haye (Pays-Bas), est amenée à statuer sur des conflits et des enjeux cruciaux pour la planète. 
- 
-C’est un vaste parc où les plantes à épines sont bannies… Sauf les 2 500 rosiers que Mark van IJzendoorn, le jardinier du palais de la Paix, à La Haye (Pays-Bas), a plantés à l’automne. « Les roses, c’est l’exception, dit-il, c’est le symbole de l’amour. » En ce début février, un vent glacial souffle en rafales dans cette enceinte qui abrite la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction des Nations unies. Casquette vissée sur la tête, le Néerlandais invite à « revenir au printemps », le temps pour les roses d’ajuster leurs pétales. De même, le règlement pacifique des conflits du monde requiert la constance d’un jardinier. 
- 
-Née aux dernières heures de la seconde guerre mondiale, la CIJ ne cherche pas à punir, mais à résoudre. « Face à la barbarie des guerres, il s’agissait de bâtir une civilisation humanitaire basée sur le droit », rappelle le juge somalien Abdulqawi Ahmed Yusuf, qui reçoit dans son bureau dominant le jardin. Frontières, eaux territoriales, immunités diplomatiques, conflits armés : depuis soixante-seize ans, au moins cent vingt des 193 Etats membres de l’ONU sont venus s’y affronter, brandissant les armes du droit international. Les juges ont statué dans une centaine d’affaires. Ils ont aussi prononcé une trentaine d’avis consultatifs à la demande des Nations unies. Les Etats en sortent vainqueurs ou vaincus, mais jamais humiliés par une procédure à laquelle ils ont, d’une façon ou d’une autre, consenti. 
- 
-Sur le bureau des juges, les dossiers s’empilent. Liée à l’actualité brûlante, il y a l’affaire de l’Afrique du Sud contre Israël, en cours et au sujet de laquelle la Cour a déjà considéré, en janvier, que l’offensive israélienne dans la bande de Gaza, lancée après les attaques du Hamas, le 7 octobre 2023, créait un « risque plausible de génocide » des Palestiniens. Depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le 24 février 2022, Kiev multiplie les procédures contre Moscou. Dans la foulée du conflit les opposant dans le Haut-Karabakh, en septembre 2021, l’Arménie et l’Azerbaïdjan s’attaquent et contre-attaquent par plaintes déposées. En 2019, la Gambie sommait la Birmanie de « mettre un terme aux atrocités et au génocide contre son propre peuple rohingya ». La CIJ, également appelée « Cour mondiale », doit encore statuer sur l’affaire Canada-Pays-Bas contre Syrie. Cette dernière, accusée d’actes de torture, ayant boycotté les audiences à l’automne 2023… 
- 
-Des arrêts définitifs, pas toujours exécutés 
-« La Cour reflète les dynamiques géopolitiques, note Laurence Boisson de Chazournes, professeure de droit international et avocate franco-suisse. Le blocage des institutions politiques à New York [Conseil de sécurité et Assemblée générale de l’ONU] entraîne les Etats à chercher d’autres espaces. » D’autant, ajoute-t-elle, que « la Cour pénale internationale [CPI] n’a pas toujours fait son travail ». Créée par un traité en 1998 – et non par l’ONU – l’autre Cour de La Haye, distante du Palais de la paix de 3 kilomètres, est censée poursuivre et punir les auteurs de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité et de génocide. Mais en vingt ans d’exercice, les Etats l’ont tellement instrumentalisée qu’elle court après sa crédibilité. 
- 
-Lire le récit : Article réservé à nos abonnés Ukraine : le monde face aux crimes d’une guerre 
- 
-C’est d’ailleurs ce que met en exergue l’ambassadeur d’Afrique du Sud aux Pays-Bas, Vusi Madonsela, pour expliquer la démarche de son pays : « Nous avons estimé que placer tous nos espoirs dans [la CPI] n’était pas la meilleure façon d’obtenir un cessez-le-feu dans la bande de Gaza. » Fin décembre 2023, Pretoria a donc saisi la Cour mondiale. « Signer la requête était très émouvant, confie le diplomate. J’ai lu et relu ce document. Je me suis dit que si la CIJ était bien une cour de justice, alors ses juges ne pourraient pas refuser les ordonnances que nous demandions. » Le dossier a ensuite été remis en main propre au greffier, dans la salle rouge du Palais de la paix, où s’alignent, intimidants, les portraits des anciens présidents. 
- 
-Les arrêts rendus par les juges sont définitifs et sans recours, même s’ils ne sont pas toujours suivis d’effet. « Ils ne sont pas du tout symboliques, mais c’est au Conseil de sécurité de l’ONU de les faire exécuter ! », réagit le tout nouveau président de la Cour, le Libanais Nawaf Salam, qui considère qu’ils le sont « la plupart du temps ». Reste que, depuis l’invasion russe de l’Ukraine, Moscou et Washington ont, tour à tour, opposé leur veto, paralysant le pouvoir exécutif des Nations unies. 
- 
-Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Devant la Cour internationale de justice, Israël accusé d’entraver l’« autodétermination » des Palestiniens 
- 
-Les ordonnances de la CIJ appelant à la paix sont ignorées par la Russie comme par Israël. Mais « il s’agit là d’Etats qui violent ouvertement le droit international depuis toujours, assène le juge français Yves Daudet. Quand la Cour ordonne à la Russie de cesser ses opérations militaires dans le Donbass, elle se doute que M. Poutine ne va pas dire : “Oh la la, la Cour a parlé, arrêtez tout !” » Il n’empêche : « Aucun Etat ne veut être perçu comme un voyou, affirme Jean-Marc Sorel, professeur de droit public et habitué du Palais, qui plaide parfois pour la France. Une mauvaise réputation a des répercussions sur ses relations internationales et pèse sur les investissements étrangers. » Outre leur valeur juridique, les décisions des juges revêtent une indéniable autorité morale. 
- 
-Grandes victoires et camouflets 
-Dotée d’un budget d’à peine 26 millions d’euros par an – « Pas même l’équivalent d’un avion de combat ! », s’amuse le greffier Philippe Gautier –, la Cour a remporté plusieurs succès. L’Ouganda a ainsi payé la première tranche des réparations – 325 millions de dollars, soit 300 millions d’euros – qu’il a été condamné à verser, en février 2022, pour le pillage de l’est de la République démocratique du Congo. La Thaïlande et le Cambodge ont baissé les armes, en 2013, après une ordonnance des juges sur un différend autour du temple de Preah Vihear : « Depuis, les deux parties vivent en paix », dit en souriant le juge Yusuf. Dans le sillage de la décolonisation, la Cour a corrigé des segments de frontières qui avaient été tracées à la règle, facilitant à l’occasion le déplacement des éleveurs et de leurs troupeaux. 
- 
-Le Monde Application 
-La Matinale du Monde 
-Chaque matin, retrouvez notre sélection de 20 articles à ne pas manquer 
-Télécharger l’application 
-Les murs du palais résonnent encore de la « grande affaire » Nicaragua contre Etats-Unis, plaidée dans les années 1980. « C’était incroyable : un tout petit Etat qui s’attaquait à la grande puissance ! », raconte Me Boisson de Chazournes, l’une des rares femmes admises dans le cercle très masculin des conseils. Washington fut condamné pour avoir violé la souveraineté nicaraguayenne. « Toutes les grandes puissances ont eu leur affaire encombrante, sauf peut-être la Chine », souligne M. Sorel. Dans les années 1970, c’est la France qui avait été traînée devant la CIJ. L’Australie et la Nouvelle-Zélande dénonçaient ses essais nucléaires dans le Pacifique Sud. Paris avait boycotté les audiences. « Après la mort de Pompidou, Giscard a promis qu’il n’y aurait plus d’essais nucléaires, et l’affaire a été réglée », raconte-t-il. 
- 
-Concernant l’affaire qui l’oppose à son ancienne colonie de l’île Maurice, le Royaume-Uni a lui aussi essuyé un camouflet. Dans un avis rendu en 2019, les juges ont sommé les Britanniques de mettre fin dans les « plus brefs délais » à leur administration des Chagos, qu’ils ont déclarée « illicite ». Cet archipel de l’océan Indien – dont la population fut contrainte à l’exil, à la fin des années 1960, pour permettre aux Etats-Unis d’y installer une base militaire – est et a toujours été partie intégrante de l’île Maurice, ont décidé les magistrats. Jusqu’à présent, Londres s’obstine à faire la sourde oreille. Mais l’avocat franco-britannique Philippe Sands, qui a représenté Maurice devant la CIJ, pense que Liseby Elysé, qui livra, lors des audiences, un témoignage poignant de son déracinement forcé, pourra un jour retourner sur l’île de ses ancêtres. « Quand on campe sur ses positions [comme le Royaume-Uni actuellement], on fait comme si de rien n’était jusqu’à ce que se présente une occasion de retourner sa veste sans perdre la face », écrit Philippe Sands dans La Dernière Colonie (Albin Michel, 2022). Ce verdict inspire déjà les indépendantistes de Nouvelle-Calédonie, qui ont confirmé à l’ONU, en juin 2023, leur intention de saisir la CIJ. 
- 
-Ni instruction ni procureurs 
-« Ce qui est intéressant, c’est cette égalité des armes. L’Est, l’Ouest, le Sud, le Nord, tous peuvent aujourd’hui aller devant la Cour », note Me Boisson de Chazournes. Tel n’a pas toujours été le cas. En 1966, le verdict rendu dans l’affaire du Sud-Ouest africain (protectorat de l’Afrique du Sud entre 1915 et 1990, aujourd’hui la Namibie) a causé un « grand traumatisme », précise l’avocate, conduisant des pays récemment dégagés de la tutelle coloniale à douter de l’institution. Saisie par le Liberia et l’Ethiopie, qui voulaient mettre un terme à l’apartheid et aux mauvais traitements infligés par l’Afrique du Sud aux habitants du Sud-Ouest africain, la Cour jugea, à l’époque, qu’il était impossible d’introduire des requêtes dans le but de protéger les populations d’un autre pays. Les arrêtés du jugement « plongèrent la Cour dans un abîme de discrédit dont elle n’émergerait que vingt ans plus tard », écrit aussi Philippe Sands dans La Dernière Colonie. 
- 
-Avec son lourd protocole, la Cour a des airs de couronne britannique : le poids des traditions avec un soupçon de modernité. Dans le large couloir menant à la salle d’audience, deux bustes de marbre : le Mahatma Gandhi et Nelson Mandela semblent observer le ballet des délégations s’avançant, l’une après l’autre, vers l’arène de leurs joutes verbales. « En commençant ma plaidoirie, je savais que Mandela nous regardait, raconte l’ambassadeur Madonsela. Je n’avais aucun doute sur le fait que nous faisions la meilleure des choses pour nous-mêmes et pour l’humanité et que “Madiba” devait être fier. » Face aux quinze juges, les Etats impliqués sont toujours assis côte à côte. Et quand ils risquent un regard vers leur adversaire, c’est le plus souvent du coin de l’œil, la mâchoire serrée. 
- 
-« La Cour ! », annonce l’huissier. Les délégations se lèvent comme un seul homme. Les juges entrent en file indienne, dans un silence quasi monacal, ponctué du seul froissement des robes. Ils gagnent leur siège. Les acteurs sont en place, la pièce peut commencer. Si les murs pouvaient parler, ils livreraient les échos de ces temps où les Australiens accusèrent les Japonais de tuer les baleines, où la Bosnie-Herzégovine, exsangue et en guerre, plaida contre la Serbie et la Croatie, accusant ces dernières de génocide. Du jour où, au nom d’un héroïsme supposé ancestral, la Serbie se transforma en David des Balkans face au Goliath de l’OTAN, intervenue au Kosovo en 1999. Débouté, parce que la Cour ne permet pas de poursuivre des entités, Belgrade avait entrepris de poursuivre, un à un, huit Etats de l’Alliance atlantique. France, Belgique, Pays-Bas, Royaume-Uni, Italie, Allemagne, Portugal et Canada se préparèrent à harmoniser leurs stratégies juridiques. La Cour se déclara finalement incompétente, et la Serbie dut s’incliner, une seconde fois. 
- 
-Lire aussi | Article réservé à nos abonnés La Cour internationale de justice conforte l'indépendance du Kosovo 
- 
-« Des centaines d’années d’histoire ont été auscultées », assure Shelley Lightburn, l’archiviste en chef du Palais de la paix. Les dossiers d’audience recèlent de vieux traités, des lettres manuscrites, de magnifiques cartes tracées à la main. Celles de l’affaire du Sahara occidental – ancienne colonie espagnole revendiquée par le royaume du Maroc et la République arabe sahraouie démocratique – forment un véritable atlas, dont la jeune femme, les mains gantées de blanc, tourne les pages. « La façon dont les dossiers étaient présentés reflétait la personnalité de chaque Etat, relève-t-elle, mais avec l’informatique, c’est devenu plus formaté. » A la Cour mondiale, les juges n’enquêtent pas. Il n’y a ni instruction ni procureur. Ce sont les parties qui déposent leurs preuves. L’équipe des cinq archivistes doit « préserver les documents » entreposés ici, dont une partie est gardée dans les greniers – amiantés – du palais. Il faut « protéger ces paroles », dit gravement Mme Lightburn, celles prononcées lors des centaines de plaidoiries. 
- 
-« Ici, c’est le droit qui l’emporte » 
-Devant les juges, les Etats dénoncent, rapportent, promettent. De vieux secrets sont parfois déterrés au détour d’une audience. L’affaire Tchad contre Libye, qui traitait d’un litige frontalier, dans les années 1990, révéla ainsi que les services français avaient mis sur écoute un premier ministre libyen, alors qu’il se trouvait à Paris… pour signer un traité d’amitié. « La Cour oblige les Etats à dévoiler leurs mensonges, leurs non-dits, leurs contradictions, ce qui les rend, en quelque sorte, humains », considère M. Sorel. 
- 
-L’« Ukraine » prend des selfies sur les marches de l’escalier central, réplique de celui de l’Opéra Garnier à Paris. Le « Nicaragua » déambulait en queue-de-pie dans les années 1980, en signe ostentatoire de sa déférence à l’institution. L’ambassadeur de la Palestine aux Nations unies, Riyad Mansour, a réprimé un sanglot, ce 19 février, face aux quinze juges : le droit international « n’a pas protégé [les] vies, [les] espoirs, [les] maisons » des Gazaouis. Trois jours plus tard, c’est le Koweït qui verse une larme en déplorant « ces âmes perdues et cette absence de conscience parmi les pays du monde ». A l’heure du verdict, combien de fois les parties adverses ont-elles, des deux côtés, crié victoire avec une mauvaise foi désarmante ? 
- 
-Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Riyad Mansour, ambassadeur palestinien aux Nations unies, devant la Cour internationale de justice : « C’est si douloureux d’être palestinien aujourd’hui » 
- 
-A l’issue d’une des multiples batailles juridiques lancées par Kiev contre Moscou, l’Ukraine a essuyé une petite défaite, le 2 février. Ravi, le délégué russe a sorti son téléphone portable pour photographier le document, oubliant qu’à l’étape précédente les juges avaient spécifié que Moscou avait violé le droit international en envahissant l’Ukraine. Sur le dossier est apposé le sceau de cire rouge avec l’emblème de la CIJ : Dame Justice tenant une balance de sa main gauche et, de l’autre, une gerbe de céréales. Elle ne porte ni glaive vengeur ni bandeau sur les yeux. « Les gens me demandent toujours qui a gagné, dit le juge Yusuf. Je leur réponds : “Personne ! Ni la Russie ni l’Ukraine. Ici, c’est le droit qui l’emporte.” » 
- 
-Six mois pour rendre une décision 
-Comme tout ici, le délibéré est soumis à un protocole strict. Dans l’aile qui leur est réservée, extension moderne du palais, construite dans les années 1970, les juges prennent place autour de l’imposante table en forme de fer à cheval, au centre de la salle des délibérations. Un comité de rédaction prépare un projet, débattu au cours de deux lectures. « Je n’ai jamais assisté à des pugilats, mais j’ai assisté à des moments difficiles, se souvient le juge Daudet. Aujourd’hui encore, en période de délibéré, il m’arrive encore d’avoir des insomnies. » C’est que « la responsabilité est très lourde », commente le juge Yusuf, avec gravité. Dans le parc, le Spectre de la guerre, une sculpture de l’artiste chilienne Rebeca Matte Bello (1875-1929), rappelle que des conflits font rage hors de l’enceinte paisible du palais. Eclairée par de gros projecteurs, une longue forme drapée figurant la mort piétine des cadavres. 
- 
-Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Victoire très partielle de l’Ukraine devant la Cour internationale de justice 
- 
-Les délibérations durent, en général, autour de six mois. Le temps d’une rose ? Selon Mark van IJzendoorn, le jardinier, les arbres du parc ont été « choisis pour leurs petites feuilles, afin de laisser la lumière pénétrer et permettre aux juges de travailler dans la clarté, pas les ténèbres ». Au restaurant des juges, avec vue sur le parc, « on ne doit pas parler de l’affaire, on ne doit pas s’influencer les uns, les autres », raconte encore le juge Daudet. Est-ce un internat ? Un monastère ? Une académie, peut-être, où les curriculum vitae des élus alignent diplômes, thèses avec mentions et publications. Celles qui alimentent les soixante mille ouvrages de leur bibliothèque. 
- 
-Dans l’attente du verdict, le petit monde de la justice internationale se livre à des pronostics. Le jeu consiste à deviner comment voteront les juges (les décisions sont prises à la majorité), selon leur nationalité. En 2022, les magistrats russe et chinois avaient voté contre une ordonnance qui condamnait Moscou et exigeait la suspension immédiate des opérations militaires en Ukraine. « Si vous entendez qu’ils ont voté sur instruction de leur gouvernement, je pense que c’est faux, avance le juge Daudet. Si vous entendez qu’ils ont voté en accord avec les options de leur gouvernement, c’est probablement vrai. » Car, une fois élus, les juges déposent leurs bagages à La Haye, chargés de leur histoire, de leur culture et de leurs traditions juridiques. Et puis, la CIJ n’est pas non plus à l’abri de tentatives d’instrumentalisation politique. Les Etats utilisent parfois des conventions – il en existe plus de trois cents – pour lancer des procédures et engranger des victoires à court terme, comme des ordonnances délivrées en urgence avant que l’affaire soit plaidée sur le fond. 
- 
-Les quinze juges sont élus par le Conseil de sécurité et l’Assemblée générale des Nations unies pour un mandat de neuf ans, renouvelable par tiers tous les trois ans. La tradition voulait que les cinq puissances « aient » chacune leur juge. Elle a été brisée en 2017 – un affront dont les Britanniques peineraient encore à se remettre. Cette année-là, le juge indien Dalveer Bhandari avait ravi le fauteuil du Britannique Christopher Greenwood, comme une pichenette donnée par l’ancienne colonie au vieux maître. Les derniers magistrats élus ont prêté serment le 6 février. Cette fois, c’est la Russie qui a perdu son siège. 
- 
-Un lieu souvent chahuté 
-Nawaf Salam défend l’indépendance des juges et assure que « nombre d’entre eux ont voté contre les positions de leur propre pays ». Par souci d’équilibre, les Etats peuvent nommer un juge ad hoc, le temps d’une affaire, si aucun de la nationalité requise ne siège : « Son rôle consiste alors à s’assurer que tous les arguments de la partie qui a fait appel à lui sont pris en compte », explique M. Daudet. Contrairement à tous les pronostics, le juge ad hoc Aharon Barak – nommé par Israël pour siéger dans l’affaire intentée par l’Afrique du Sud – a voté en faveur de deux des mesures ordonnées par la Cour. L’une exigeant qu’Israël laisse passer l’aide humanitaire à Gaza, l’autre punissant l’incitation au génocide. Ce magistrat de 87 ans serait, depuis, qualifié de « traître » par certains de ses concitoyens, assure une source proche de la Cour, « mais il s’en fiche ». 
- 
-Lire aussi | Guerre Israël-Hamas : Stéphane Séjourné explique le refus de Paris de soutenir l’Afrique du Sud pour son action devant la CIJ 
- 
-Les saisons passent sur le jardin, l’histoire s’imprime en ces lieux. L’esplanade du Palais de la paix se souviendra longtemps des sympathisants propalestiniens clamant : « Free Palestine ! » Comme elle se souvient des Israéliens venus déposer, en 2004, la carcasse d’un bus couvert de sang après un attentat-suicide palestinien. Elle a aussi vu des Rohingya exilés réclamant à grands cris l’inculpation pour génocide du général birman Ming Aung Hlaing, devenu chef de la junte au pouvoir depuis le coup d’Etat du 1er février 2021. Et encore les dizaines de drapeaux du Népal, d’Arménie ou de Syrie, étendus sur le monument dédié aux victimes de la seconde guerre mondiale pour dénoncer les crimes commis contre ces peuples. 
- 
-En janvier, sur les réseaux sociaux, les stars de la série Game of Thrones ont lu l’intégralité de la requête sud-africaine contre Israël. La chanteuse à succès du Vanuatu, Vanessa Quai, a enregistré un tube sur une affaire cruciale pour la planète : à l’unanimité des 193 membres qui la compose, l’Assemblée générale de l’ONU a demandé à la CIJ de rendre un avis sur les obligations et les responsabilités des Etats pollueurs dans le changement climatique. Le jardinier du palais suivra ce dossier « de près », dit-il, en regardant les hêtres bordant le parc : « Ils ne survivront pas à la hausse des températures. » Mark van IJzendoorn plantera bientôt des arbres capables d’affronter les cent années à venir. La paix semble parfois beaucoup plus fragile. 
- 
-Stéphanie Maupas 
-La Haye, correspondance 
-Contribuer 
-Nos lecteurs ont lu ensuite 
- 
-Article réservé à nos abonnés La « protestation extrême » d’Aaron Bushnell, qui s’est immolé pour la Palestine à Washington 
- 
-Article réservé à nos abonnés Exit Pouchkine, Dostoïevski, Tolstoï… Grand ménage dans les bibliothèques d’Ukraine 
- 
-Plainte contre le réalisateur André Téchiné pour harcèlement sexuel : le parquet ouvre une enquête 
- 
-Article réservé à nos abonnés « Je suis sobre depuis trois ans. J’ai appris que ce n’est pas parce que l’on souffre que l’on doit faire souffrir les gens autour de soi » 
- 
-Article réservé à nos abonnés Olga Smirnova, ex-danseuse étoile du Bolchoï : « Je ne reviendrai pas dans une Russie sans liberté » 
- 
-Article réservé à nos abonnés Depuis le 7 octobre, la grande fracture des juifs de gauche 
- 
-SERVICES LE MONDE 
- 
-GUIDES D'ACHAT LE MONDE 
- 
-CODES PROMO 
- 
-LE MONDE À L'INTERNATIONAL 
- 
-SERVICES PARTENAIRES 
- 
-SITES DU GROUPE 
-NEWSLETTERS DU MONDE 
- 
-Recevoir les newsletters du Monde 
-APPLICATIONS MOBILES 
- 
-Sur iPhone 
-Sur Android 
-ABONNEMENT 
- 
-Archives du Monde  
-S’abonner / Se désabonner  
-Se connecter  
-Consulter le Journal du jour Évenements abonnés Jeux-concours abonnés Contacter Le Monde 
-Mentions légales 
-Charte du Groupe 
-Politique de confidentialité 
-Gestion des cookies 
-Conditions générales 
-Aide (FAQ) 
-SUIVEZ LE MONDE 
- 
-Facebook 
-Youtube 
-Twitter 
-Instagram 
-Snapchat 
-Fils RSS 
- 
-Offrir cet article 
-Plus d’informations 
- 
-</ifauth> 
-</hidden> 
× iphelper toolbox

you see this when javscript or css is not working correct

Untested
IP Address:
First usable:
Subnet:
Last usable:
CIDR:
Amount of usable:
Network address:
Reverse address:
Broadcast address: