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| ====== [Le Monde – Ces jeunes diplômés heureux dans les « big corpos » : « J’ai envie de gagner des sous, et je ne vais pas arrêter de faire ce que je fais pour aider la collectivité »]( ====== | |
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| [Le Monde – Ces jeunes diplômés heureux dans les « big corpos » : « J’ai envie de gagner des sous, et je ne vais pas arrêter de faire ce que je fais pour aider la collectivité »](https://www.lemonde.fr/campus/article/2023/12/04/ces-jeunes-diplomes-heureux-dans-les-big-corpos-j-ai-envie-de-gagner-des-sous-et-je-ne-vais-pas-arreter-de-faire-ce-que-je-fais-pour-aider-la-collectivite_6203799_4401467.html?lmd_medium=al&lmd_campaign=envoye-par-appli&lmd_creation=android&lmd_source=default ) | |
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| XAVIER LISSILLOUR | |
| Ces jeunes diplômés heureux dans les « big corpos » : « J’ai envie de gagner des sous, et je ne vais pas arrêter de faire ce que je fais pour aider la collectivité » | |
| Par Diane Merveilleux | |
| Par Diane Merveilleux | |
| Par Diane Merveilleux | |
| Aujourd’hui à 06h00, modifié à 15h06 | |
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| ENQUÊTE Bien que conscients des enjeux environnementaux, une large partie des jeunes diplômés des grandes écoles intègrent des multinationales, préférant faire passer leurs ambitions professionnelles avant leur utilité sociale et écologique. | |
| Lecture 7 min | |
| « Et votre éthique, comment elle se porte ? » A l’hiver 2022, au pied du siège de TotalEnergies à la Défense, où elle travaille en tant qu’analyste CO2, Léa (qui, comme nos autres interlocuteurs, a requis l’anonymat) est accueillie par un micro et une caméra de journaliste. « Aussi bien que la vôtre », répond calmement l’ingénieure de 25 ans avant de pénétrer dans la tour. Cette scène, décrite par Léa au Monde, n’a jamais été diffusée, les juristes de l’entreprise ayant poussé les employés à faire valoir leur droit à l’image. Pour Léa, le souvenir de l’intérieur de cette tour, si grande qu’on s’y sent « comme hors du temps », est associé à sa première année de jeune diplômée tout juste recrutée. « Depuis mon bureau au vingt-cinquième étage de l’immeuble, l’agitation en bas me faisait un peu sourire », admet-elle. Au début de l’année 2023, au moment où sit-in militants et jets de peinture sur la façade ponctuaient la vie au siège de la major pétrolière française, les salariés prenaient leur café en regardant, sur les grands écrans du hall, les images des activistes présents juste derrière les portes. | |
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| Epinglée par les ONG pour son mégaprojet pétrolier Eacop, en Ouganda et en Tanzanie, ou pour ses 19,1 milliards d’euros de bénéfice net en 2022, la multinationale, contactée par Le Monde, affirme pourtant que son « attractivité demeure solide ». Elle déclare avoir reçu en moyenne 170 candidatures pour chaque annonce de CDI publiée en 2022. Et TotalEnergies n’a rien d’une exception. Les grandes entreprises continuent de recruter parmi les jeunes diplômés. Pour preuve, l’enquête « Insertion » 2023 de la Conférence des grandes écoles montre qu’entre décembre 2022 et avril 2023, sur les trois dernières promotions des 194 établissements sondés, les entreprises de plus de 5 000 salariés ont capté presque un tiers (31 %) des 191 000 diplômés. | |
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| Des jeunes qui, comme Léa, assument y travailler tout en restant « des gens bien », pour reprendre les mots de la jeune ingénieure chimiste. Et si cette dernière a quitté TotalEnergies au bout d’un an pour une grande entreprise autrichienne de traitement de l’eau, c’est pour travailler sur des missions plus stimulantes. « Certainement pas par honte », malgré le regard parfois critique de son entourage sur la grande entreprise du CAC 40. | |
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| Lire aussi : | |
| Des jeunes de 18 à 30 ans de plus en plus exigeants sur la responsabilité environnementale des entreprises | |
| Plusieurs études récentes montrent que les démarches de responsabilité sociétale des entreprises (RSE) comptent de plus en plus dans le rapport au travail des jeunes diplômés. Selon un sondage Harris Interactive commandé par le collectif Pour un réveil écologique – un groupe d’étudiants de grandes écoles ayant manifesté leur volonté de valoriser l’écologie dans leur futur emploi – et réalisé en juin auprès d’un échantillon représentatif de 2 000 jeunes Français, 82 % considèrent comme important, voire prioritaire, d’avoir le sentiment que leur emploi est utile à la société et respecte l’environnement. Ceux que les grandes entreprises qualifient de « jeunes talents » continuent pourtant, selon cette même étude, à privilégier à 92 % le salaire et les avantages financiers, ainsi que l’ambiance au travail. | |
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| Jolie ligne sur le CV | |
| L’impression selon laquelle le prestige des « big corpos » – les grandes entreprises – serait entamé au point que les jeunes diplômés s’en détourneraient en masse reste donc à relativiser. Comme le résume le sociologue Jean-Baptiste Comby, spécialiste des dynamiques de classes sur le terrain écologique, « il ne s’agit pas de juger, mais de comprendre » : « Quand, chez les classes dominantes, il y a un attachement à un statut social, à des modes de vie, les changements de vie radicaux ne sont pas possibles, ni même envisagés. » | |
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| LA SUITE APRÈS CETTE PUBLICITÉ | |
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| Le chemin des futurs ingénieurs et manageurs semble d’abord tout tracé. Souvent soutenus par leurs proches, dans la droite ligne de ce qui est attendu d’eux en sortie d’école, ils sont encouragés de toute part à s’orienter vers les plus grandes entreprises. Pour la jolie ligne sur le CV, l’encadrement, les missions à responsabilité… C’est ce qu’explique Sarah (son prénom a été modifié), alternante en RH chez Danone pendant deux ans et tout juste engagée dans un grand groupe industriel pharmaceutique : « On te vend pendant tes années d’études : “Vous pourrez gagner tant, les gens viendront vous chercher.” Donc, tu sors d’école, tu as aussi envie de te prouver que tu n’as pas fait tout ça pour rien. Et les entreprises très écolos ne sont pas celles qui payent le plus. » Aller vers une multinationale était pour la jeune femme une évidence, mais aussi la voie ouverte par sa formation. Sur les vingt personnes de sa promotion de master, dix-neuf étaient déjà en alternance dans de grandes entreprises. | |
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| Même constat pour Augustin, diplômé d’une école d’ingénieurs lilloise et en passe de partir en VIE (volontariat international en entreprise) au Mozambique pour TotalEnergies : « Le chemin classique, c’est d’aller dans les grosses boîtes avec lesquelles tu as travaillé pendant les cinq ans de formation. » Un double mouvement s’opère : les multinationales viennent vers les étudiants, incités par leur école à intégrer une grande entreprise. | |
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| La part des élèves en bac + 5 qui s’orientent, diplôme en poche, vers les multinationales aurait même tendance à augmenter ces deux dernières années, selon Aurélie Robertet, directrice du cabinet d’études Universum, spécialisé dans le conseil en « marque employeur » à destination des entreprises. Ces nouveaux entrants étant en situation de quasi-plein emploi, « les candidats sont en position de force, note-t-elle. Ils sont plus exigeants, plus mobiles ». Ils visent en priorité les salaires les plus élevés, les missions les plus responsabilisantes, les marques les plus prestigieuses qui facilitent l’employabilité pour la suite. « Les critères altruistes deviennent alors moins importants », conclut Aurélie Robertet, offrant un portrait plus contrasté de cette nouvelle génération. | |
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| Lire aussi l’enquête : | |
| Plongée dans les « prisons dorées » des multinationales : « C’était irrésistible. A 30 ans, je triplais, voire quadruplais, mon salaire » | |
| Sarah l’avoue : pour elle, « l’écologie passe quasiment au dernier plan », notamment derrière les questions d’inclusivité, auxquelles la jeune femme est plus sensible. Celle qui se définit comme « très corpo » (de l’anglais corporate, « esprit d’entreprise ») est loin d’être seule à faire passer ses ambitions professionnelles avant son utilité sociale et écologique. Il y a une continuité claire entre les valeurs de travail, les logiques managériales enseignées dans les écoles et l’orientation vers de grandes entreprises. Pierre, 22 ans et en stage de master dans une grande banque française, le concède : « Il y a beaucoup d’égoïsme aussi. J’ai envie de faire ma vie, de gagner des sous, et je ne vais pas arrêter de faire ce que je fais pour aider la collectivité, il faut être honnête. » Car c’est aussi dans ces grandes entreprises que le salaire à l’embauche est le plus important – en moyenne 38 184 euros en 2023, selon la CGE – et les perspectives d’évolution parfois mirifiques. | |
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| « Une entreprise qui va de l’avant » | |
| De son côté, Léo, diplômé de Centrale Lille en 2023 et engagé chez Bouygues Construction après une alternance dans la même entreprise, avoue ne pas avoir eu le réflexe ou ressenti le besoin de se renseigner sur l’impact environnemental de la boîte qu’il rejoignait : « Nous les ingénieurs, on est un peu surchargés et dans notre monde. Et avec mes camarades de promo, l’environnement faisait rarement partie de nos sujets de discussion. » Comme d’autres, il se contente de la communication interne de son entreprise sur ses engagements RSE. « Quand je vois qu’on construit des bungalows en bois et qu’on investit dans le béton bas carbone, je me dis que c’est bien », lâche le jeune homme sans grande conviction. | |
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| XAVIER LISSILLOUR | |
| Sans être très engagés, ces jeunes salariés des multinationales n’ont pourtant rien de climatosceptiques. La plupart sont conscients des enjeux environnementaux, ou y ont été formés. Ils sont adeptes des « petits gestes », tendent à faire attention à leurs modes de consommation, de transport, sont adeptes d’une écologie réformatrice. « Une “transition” vers un monde plus écologique qui se veut incrémentale, progressive, sectorisée, et sans toucher aux hiérarchies sociales », définit le sociologue Jean-Baptiste Comby. C’est ainsi que les discours de transition écologique ont bien été intégrés par les entreprises, qui centrent leur image de marque sur leurs investissements dans l’évolution de leur secteur d’activité. De quoi « attirer les jeunes talents », comme le disent les ressources humaines. | |
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| C’est le cas du géant français Safran, où Quentin, étudiant en école de commerce, fait son alternance. L’entreprise, spécialisée dans l’aéronautique, l’espace et la défense, affiche comme objectif une aviation décarbonée d’ici à 2050, ce à quoi le jeune homme est très sensible. « La responsabilité environnementale, c’est compliqué dans le milieu de l’aéronautique, parce que dans l’immédiat on a plus l’impression de participer au problème que de trouver une solution », reconnaît Quentin. Pour autant, la perspective d’avions 100 % électriques le motive à se lever le matin, et il reste fier de travailler pour « une entreprise qui va de l’avant ». | |
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| Lire aussi : | |
| L’aviation peut-elle vraiment devenir propre ? Comprendre en trois minutes | |
| Pour ces jeunes diplômés, l’entreprise devient un acteur légitime et utile de la transition écologique. Pour Jérôme, étudiant de 22 ans en master de finance à Sciences Po Paris, en stage chez TotalEnergies dans le secteur des énergies renouvelables, « il faut être pragmatique sur les questions d’énergie ». Sur les bancs de Sciences Po comme en soirée, le jeune homme se retrouve à débattre avec des camarades engagés bien plus à gauche que lui sur l’échiquier politique. Il déplore une « position dogmatique d’une partie des militants écologistes », et résume deux positions possibles : « Soit tu dis que la planète est foutue si l’on n’invente pas un système anticapitaliste. Et ça s’entend. Soit tu te dis qu’on est en 2023, que la situation est dramatique, et que pour éviter l’apocalypse il faut laisser les grosses boîtes se décarboner. » | |
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| « Changer le système de l’intérieur »… ou pas | |
| De ce dilemme rhétorique se dégage une position courante parmi ces jeunes engagés dans des multinationales : celle d’une foi en l’innovation, qui implique de considérer que le système n’a pas besoin de radicalement changer pour dépasser collectivement les défis posés par le réchauffement climatique. Une étude qui doit sortir en décembre porte sur une cohorte d’étudiants parmi les plus de 30 000 ayant signé le « Manifeste pour un réveil écologique » depuis sa publication en septembre 2018. Elle tend à montrer que, parmi ces étudiants sensibles à l’écologie, les moins critiques du système peuvent rejoindre des entreprises polluantes, quitte à essayer de les faire « changer de l’intérieur ». | |
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| Le sociologue du travail Hugo Touzet, coauteur de l’étude, précise : « Les jeunes les plus engagés à gauche et radicaux dans leur engagement écologique ont plutôt tendance à s’orienter vers le secteur non marchand, et les moins engagés à aller vers le secteur privé, comme les grandes entreprises. » Deux manières opposées d’éviter le conflit au sein du monde de l’entreprise. | |
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| En conséquence, les sphères militantes tendent à se détacher de l’univers des multinationales, au point d’oublier qu’aujourd’hui celles-ci emploient une partie de la jeunesse diplômée. Pour Jean-Baptiste Comby, « il y a un danger à rester dans le déni de l’inertie du monde social ». Autrement dit, à oublier que les jeunes élites ne désertent pas en masse le monde de l’entreprise, bien au contraire. Dans les écoles d’où viennent les diplômés en bac + 5, l’écologie est souvent déconflictualisée et dépolitisée. Et tout en étant conscients des enjeux liés au réchauffement climatique, les jeunes cadres s’insèrent dans un système qu’ils n’ont aucun intérêt à véritablement transformer. « On se laisse porter », résume Sarah. On reste optimistes pour l’avenir, on croit au progrès. Et puis sans culpabiliser. Comme le dit Pierre, futur banquier, « c’est aussi marrant d’être dans le gang des méchants ». | |
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| Diane Merveilleux | |
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