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+===== Article du Monde : Réouverture de Notre-Dame : Trump, Macron et les « hommes forts » =====
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+Réouverture de Notre-Dame : Trump, Macron et les « hommes forts »
+Le chef de l’Etat, qui doit s’entretenir avec le président américain élu, en marge de la réouverture de la cathédrale, cultive les contacts personnels en matière diplomatique, misant sur son pouvoir de persuasion. Une méthode aux résultats contrastés.
+Par Philippe Ricard
+Publié aujourd’hui à 10h06, modifié à 12h12
+Temps deLecture 4 min.
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+Poignée de mains entre Donald Trump et Emmanuel Macron, à Bruxelles, le 25 mai 2017. JONATHAN ERNST / REUTERS
+Etait-ce afin de lui parler à l’oreille entre l’ouverture des portes et le Te Deum ? Durant les préparatifs de sa venue à Paris, Donald Trump a d’abord insisté pour être assis au côté d’Emmanuel Macron lors de la réouverture de Notre-Dame, samedi 7 décembre en soirée. Bien que le protocole soit resté discret jusqu’à la dernière minute sur l’agencement des lieux, le président américain élu et le chef de l’Etat devaient se retrouver dans ce décor improbable, cinq ans après l’incendie qui ravagea la cathédrale, en 2019. Un dîner est prévu ensuite à l’Elysée, en compagnie de la cinquantaine d’invités étrangers présents, dont l’épouse du président américain Joe Biden.
+Lire aussi | En direct, Notre-Dame de Paris : Donald Trump est arrivé à Paris, un dispositif de sécurité exceptionnel
+Avant même la cérémonie, les deux dirigeants doivent s’entretenir à l’Elysée des principaux sujets chauds du moment : Iran, Proche-Orient, risques de contentieux commercial transatlantique et, bien sûr, guerre en Ukraine. L’Elysée espérait même organiser une rencontre inédite, à trois, avec Volodymyr Zelensky. Le président ukrainien, dont la venue a été confirmée vendredi, est soucieux, lui aussi, de sonder les intentions du républicain, pour mieux plaider la cause de son pays, après plus de mille jours de combats contre l’envahisseur russe.
+Minuté, le ballet diplomatique rappelle une constante des années Macron : la propension du chef de l’Etat à parler aux « hommes forts », comme Donald Trump, et autres dirigeants plus ou moins autocratiques, à la tête des puissances désinhibées qui alimentent la chronique. « Depuis son arrivée au pouvoir, Macron cultive les contacts personnels et croit en sa capacité de retourner les situations grâce à son pouvoir de persuasion, observe l’ancien diplomate Michel Duclos. Il n’entend pas s’arrêter aux différences idéologiques et accepte les limites d’une diplomatie transactionnelle. »
+Autocrates de tout bord
+A peine élu, en mai 2017, l’ex-banquier d’affaires tente de nouer une relation forte avec Donald Trump, en marge d’un sommet de l’OTAN à Bruxelles, resté dans les mémoires pour la longue poignée de main virile échangée entre les deux hommes. Quelques jours plus tard, M. Macron établit le dialogue avec Vladimir Poutine, invité au château de Versailles, avant de s’aventurer dans une infructueuse politique de rapprochement avec Moscou, interrompue définitivement par l’invasion de l’Ukraine, en février 2022.
+Cette double démarche marque le point de départ d’une longue série d’échanges avec des autocrates de tout bord : le Chinois Xi Jinping, reçu à Paris mais aussi dans les Hautes-Pyrénées, en mai, le Turc Recep Tayyip Erdogan, l’Indien Narendra Modi, l’Egyptien Abdel Fattah Al-Sissi, le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane – revu cette semaine à Riyad, ou le libertarien argentin, Javier Milei, croisé à Buenos Aires juste avant le G20 de Rio, mi-novembre. « Par les temps qui courent, il est toujours utile d’essayer de parler à ces dirigeants, souvent devenus incontournables, même si cela échoue. Tout le monde le fait discrètement, mais M. Macron le met volontiers en scène, observe Arancha Gonzalez, ancienne ministre des affaires étrangères espagnole (2020-2021), et doyenne de l’école d’affaires internationales de Sciences Po. Il ne faut cependant pas se faire d’illusion. »
+Lire aussi | Article réservé à nos abonnés La venue de Donald Trump en France pour la cérémonie de réouverture de Notre-Dame, un coup diplomatique pour Emmanuel Macron
+Car la méthode donne des résultats très variables. « Macron croit beaucoup à la personnalisation de la politique étrangère. Sa démarche a plutôt porté ses fruits avec Narendra Modi, mais elle n’a rien arrangé, au contraire, avec Recep Tayyip Erdogan », observe Tara Varma, chercheuse invitée à la Brookings Institution, à Washington : « Face à Xi Jinping, l’approche de Macron est un peu trop personnelle, au même titre que celle du chancelier allemand Scholz. Il vaudrait mieux que les Européens agissent ensemble, mais chacun se croit en mesure de régler les choses seul. »
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+Avec Trump aussi, le bilan est ténu. Quelques jours après leur prise de contact à Bruxelles, le républicain annonçait la sortie des Etats-Unis des accords de Paris sur le climat. Même revers, un an plus tard, au sujet de l’accord censé empêcher l’Iran de se doter de l’armé nucléaire. Emmanuel Macron a alors beaucoup tenté, mais sans parvenir à dissuader Trump de dénoncer unilatéralement le compromis négocié avec Téhéran sous l’égide des Européens et de son prédécesseur démocrate, Barack Obama.
+Trump « bien mieux préparé »
+« Avec Trump, il y a eu des hauts et des bas pendant leur premier mandat. Leurs discussions n’ont pas suffi pour le convaincre ni sur le climat, ni sur l’Iran, ni sur les enjeux commerciaux, mais cela a permis de ne jamais rompre, et probablement d’éviter que la France ne soit trop dans le collimateur de la Maison Blanche », juge Michel Duclos. A ses yeux, c’est plutôt l’Allemagne d’Angela Merkel qui a alors essuyé les foudres de Donald Trump, en raison d’excédents commerciaux record avec les Etats-Unis…
+Cette fois, la première visite en Europe du républicain depuis sa victoire constitue sans aucun doute un coup diplomatique pour le chef de l’Etat français, plus que jamais soucieux d’exister sur la scène internationale, en raison de la profonde crise politique suscitée en France par sa décision de dissoudre l’Assemblée nationale, en juin. On l’a constaté au Liban, à l’occasion du cessez-le-feu annoncé le 26 novembre, avec Joe Biden, face à un autre interlocuteur illibéral, le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou.
+« Macron a l’avantage d’être un des rares dirigeants européens à avoir déjà travaillé avec Donald Trump, tout comme le Hongrois Viktor Orban. Mais leurs relations risquent d’être plus difficiles que pendant le premier mandat, car Trump arrive bien mieux préparé, avec une armée de gens censés appliquer ses décisions avec une totale loyauté », prévient Tara Varma.
+Les retrouvailles avec Donald Trump surviennent alors que M. Macron comme ses homologues européens s’interrogent sur ses intentions, et cherchent à peser, sans grande certitude, sur ses initiatives, tout en lui démontrant leur engagement aux côtés de Kiev, afin d’éviter d’entrer dans une négociation précipitée qui serait trop favorable à la Russie. « Je ne vois pas Trump promettre quoi que ce soit pour l’instant ; il va surtout essayer de diviser les Européens, pour dénigrer l’Union européenne et ses dirigeants, même s’il aura envie de travailler avec un certain nombre d’Etats membres, redoute Tara Varma. Le risque existe que les chefs d’Etat européens, à commencer par Macron et Scholz, aillent chacun le voir pour parler de sécurité européenne, sans trop se concerter. » Une sorte de mise en garde avant la rencontre de Notre-Dame.
+Philippe Ricard
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